Aveyron : les éleveurs de plus en plus inquiets de la future Pac

  • Il y a quinze jours les éleveurs de la FDSEA avaient manifesté dans quatre communes du département.
    Il y a quinze jours les éleveurs de la FDSEA avaient manifesté dans quatre communes du département. J.-A. T
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Guilhem Richaud

La première mouture du projet de politique agricole commune est très défavorable aux exploitations bovines. De quoi mettre directement en danger l’élevage aveyronnais selon la FDSEA.

L’inquiétude ne cesse de grandir. Les éleveurs de la FDSEA ont déjà tapé deux fois du poing sur la table en quelques semaines, en traversant le viaduc de Millau en tracteurs au mois de février, puis en allumant des feux d’alertes dans plusieurs communes du département il y a maintenant quinze jours. Ils voulaient alerter sur la nécessité de ne pas oublier l’élevage de montagne dans les négociations actuelles, au niveau de l’Etat français, des modalités de la future politique agricole commune, qui doit entrer en vigueur en 2023.

Un mouvement préventif qui visiblement était nécessaire puisque dans les premiers documents de préfigurations, parus il y a quelques jours, les mesures envisagées font trembler de nombreux éleveurs aveyronnais. "Le ministère de l’Agriculture a publié un document de travail qui n’est pas encore définitif, détaille Dominique Fayel, éleveur dans le Nord-Aveyron et expert du sujet à la FNSEA. Il peut et il va encore évoluer, mais il est très représentatif des intensions du ministère."

Dans celui-ci, qui traite du premier pilier de la Pac, celui des aides à l’élevage et aux filières, il est notamment prévu de s’organiser pour devenir autonome dans la production de protéines végétales (plantes fourragères, colza…). Sauf que l’enveloppe globale allouée par l’Europe n’augmentant pas, il faut prendre ailleurs ce qui sera donné à ces productions. Et le projet prévoit de puiser en grande partie dans les aides aujourd’hui allouées à l’élevage bovin.

Pour Dominique Fayel, celles-ci pourraient diminuer, en fonction des exploitations, de 30 à 60 %. "Il est également prévu de regrouper les aides pour les élevages de bovins laits et viandes, mais aussi de retirer la référence au fait qu’il faut faire naître des veaux." Jusque-là, en effet, pour toucher les aides, il était obligatoire d’avoir des veaux, si le texte ne bouge pas, ce ne sera plus le cas. Et pour l’Aveyron, ce serait un problème. "C’est assez significatif d’une volonté d’aller vers une décroissance du cheptel, analyse l’ancien président de la FDSEA, toujours très impliqué dans la vie du syndicat. C’est un signal fort qui aura des conséquences dans le temps. S’il y a une diminution des cheptels, cela va avoir pour conséquence des pertes économiques pour les exploitations. Et dans des territoires où l’élevage est l’activité dominante, comme l’Aveyron, cela va avoir un impact important. On est sur de la décroissance forcée."

Les agriculteurs voient dans ce projet la volonté de l’Europe de prendre en compte les sujets environnementaux autour de l’agriculture. "Nous ne sommes pas contre, reprend Dominique Fayel. Mais on voudrait qu’il y ait une réflexion sur comment le faire. Là, on est sur une vision très urbaine…" Pour ce spécialiste, le cheptel aveyronnais qui est actuellement de 160 000 vaches allaitantes pourrait diminuer de 15 à 20 % si le texte n’évolue pas.

Grande manifestation à Clermont jeudi

Pour Romain Déléris, président des Jeunes agriculteurs (JA) de l’Aveyron, ce projet de réforme de la Pac est particulièrement néfaste. "Pour s’installer, on a besoin de visibilité et de confiance en l’avenir, lance-t-il. Là, c’est une réelle incertitude alors même que la pyramide des âges est très défavorable. Avec 3 000 éleveurs sur 10 000 qui ont plus de 58 ans, on n’a pas besoin de ça." Les membres de la FDSEA sont également inquiets pour l’impact que pourrait avoir cette réforme sur le territoire, avec des répercussions pour tous les secteurs qui travaillent de près ou de loin avec les éleveurs (agroalimentaire, mécanique agricole, transformation…).

Alors avec la totalité des territoires de montagnes, ils ont décidé de se mobiliser. Une grande manifestation est prévue ce jeudi 25 mars à Clermont-Ferrand, avec un rassemblement symbolique sur la place de Jaude, là où trône la statue de Vercingétorix. L’Aveyron sera bien représentée, avec au moins sept cars remplis d’éleveurs de prévus. Un convoi de bétaillères et de tracteurs va aussi s’y rendre, en remontant l’A75, avec un départ à 4 heures du matin de Lacalm, dans le Nord-Aveyron.

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