Bassin de Decazeville : quand le stockfish s’est "ancré" au territoire

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  • Une gabarre au port de Boisse-Penchot, fin XIXe siècle.
    Une gabarre au port de Boisse-Penchot, fin XIXe siècle. Photo Collection ASPIBD
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D.L.

Du XIIIe à la fin du XVIIIe siècle, le stockfish se répand et apporte un nouveau plat sur le Bassin et la vallée du Lot.

Le stockfish, ou poisson-bâton, avec sa forme plissée et ratinée une fois séchée, est arrivé dans le Bassin decazevillois par le biais de plusieurs canaux d’importation, principalement par la rivière Lot, "le chemin qui marche", disait l’inventeur, philosophe, moraliste et théologien Blaise Pascal. Ce produit nourricier venait principalement de Norvège et des îles Lofoten, véritable royaume de la morue, symbolisant pour certains le savoir-faire ancestral dans la technique du séchage.

Appréciant des températures entre 2° et 7° et raffolant du hareng, il pullulait aussi près de l’Islande, du Groenland, du Labrador et de Terre-Neuve. Les pêcheurs à l’époque se vantaient que "l’on pouvait marcher sur l’eau", tellement la morue abondait. Au fil des siècles, les bancs se sont amenuisés, notamment celui de Terre-Neuve, exemple frappant d’une ressource alimentaire qui s’effondre pour cause de surexploitation et de mauvaise gestion par les hommes. Depuis peu, suite à la fermeture de la pêcherie au début des années 1990, ces poissons reviennent.

Toujours est-il qu’à partir des XIIIe et XIVe siècles, le stockfish devient progressivement important, notamment pour remédier aux nombreux jours de carême imposés par l’Église catholique, interdisant entre autres de consommer de la viande. Une fois pêché dans les garde-mangers immenses que représentaient les régions maritimes citées plus haut et correctement séchée, le stockfish devint très présent le long dans la vallée du Lot et traverse les siècles. Quand on le déchargeait des ventres des navires à Bordeaux, une grande animation régnait tout autour, indiquant l’importance du produit. Des travaux furent entrepris sur la "belle vallée" pour rendre la rivière Lot plus navigable. Marchands, armateurs et bateliers firent alors sillonner les fameuses gabarres jusqu’à la fin du XIXe siècle. En 1552, Entraygues aurait ainsi possédé pas moins de 25 bateaux.

D’abord, les familles de mariniers, les maîtres de bateaux, charpentiers, constructeurs de gabarres, commerçants et aubergistes firent de la morue séchée un mets de choix, malgré les fortes odeurs qui imprégnaient les maisons pour sa réhydratation et sa préparation. Le stockfish devint très connu dans les ports du territoire : Laroque-Bouillac, Boisse-Penchot, Livinhac-le-Haut, Port-d’Agrès, améliorant la nourriture quotidienne.

Puis, il se répandit dans les campagnes. Mais du fait que le Lot se montrait en ce temps-là erratique, avec des périodes de sécheresse ou de fortes crues, sa livraison n’était pas régulière.

Napoléon s’y intéressa

Même Napoléon, en sa qualité de Premier consul, montra son attirance pour ce poisson séché. Il signa, en mars 1803, un arrêté contenant une nouvelle fixation du droit d’entrée du stockfish en France qui sera de huit francs par 50 kg. Cette anecdote a été dénichée par le Decazevillois Francis Arniac. Cela montre l’importance que l’on accordait à ce poisson en France. Nonobstant, le stockfish, était aussi attendu que les gabariers après plusieurs semaines d’absence car "il apportait du mystère, un parfum de voyage, le vent et les odeurs du large", ont joliment écrit Christian Bernad et Daniel Crozes.

Il prit encore plus d’ampleur sur les tables du Bassin et les campagnes environnantes avec la recette appelée "estofinade" qui ne sera préparée à base de pomme de terre qu’après la Révolution française. En effet, la culture des patates dans le Quercy et le Rouergue prend son ampleur à partir des années 1780, ouvrant une nouvelle page à l’histoire du stockfish.

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