INTERVIEW. IVG en Aveyron : "Il y a des territoires qui sont des zones blanches", l'accès n'est pas le même pour toutes

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  • Marie Da Costa, coprésidente du planning familial, au siège à Rodez et qui milite pour l’accès à l’IVG pour toutes.
    Marie Da Costa, coprésidente du planning familial, au siège à Rodez et qui milite pour l’accès à l’IVG pour toutes. Centre Presse Aveyron
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Propos recueillis par Salima Ouirni

Marie Da Costa est coprésidente du planning familial en Aveyron. Une association qui a toujours milité pour les droits des femmes, dont notamment l’accès à l’interruption volontaire de grossesse (IVG). Aujourd’hui, cette liberté a été inscrite dans la Constitution, avant la journée du 8 mars, journée internationale des droits des femmes. Un symbole !

Le droit à l’interruption volontaire de grossesse a été gravé dans le marbre, lundi 4 mars. Qu’est-ce que cela vous inspire ? Qu’en pense le planning familial, connu pour ses luttes dans ce sens ?

Nous sommes très heureux que le droit à l’IVG soit inscrit dans la Constitution, d’autant plus que nous sommes le premier pays, au monde, à le faire. Nous sommes, en revanche, moyennement satisfaits, par rapport aux termes retenus. On aurait préféré celui du droit à celui de liberté. On nous a tout de même expliqué que la Constitution garantit ce droit. Cette question de la constitutionnalisation, nous la défendons depuis des années.

Combien y a-t-il de plannings familiaux en Aveyron ?

Nous en avons un à Rodez, un à Millau, et un autre à Saint-Affrique. Nous venons de réaliser une embauche pour investir la région de Decazeville. Nous avons identifié un vrai besoin dans le Bassin.

Sur le territoire aveyronnais, que peut-on dire de l’accès à l’IVG ?

Il y a des territoires qui sont des zones blanches, comme autour de Laguiole. Il n’y a aucun accès. C’est parfois le cas pour les zones rurales. Les Nord-Aveyronnaises doivent se rendre à Rodez. Certaines villes sont accessibles, selon la durée des grossesses.

À Rodez, les femmes peuvent pratiquer une IVG, au-delà des 12 semaines de grossesse mais ce n’est pas le cas ailleurs à ma connaissance. Elles sont orientées vers d’autres villes, à Toulouse ou à Montpellier. Pour ce qui concerne l’IVG médicamenteuse (jusqu’à 7 semaines de grossesse), on peut y avoir accès relativement facilement dans le département.

Au-delà, des 12 semaines, la situation devient plus compliquée pour les femmes. Que se passe-t-il à ce moment-là ?

Au-delà de ce délai, dans la majorité des cas, on ne peut pas facilement faire d’IVG instrumentale après 12 semaines en Aveyron mis à part à Rodez. Ailleurs, la femme sera donc orientée à Rodez, ou alors à Toulouse ou à Montpellier, avec tout ce que cela comporte comme problèmes d’organisation. Il faut prendre une journée lorsqu’on travaille. Au niveau anonymat, on doit se faire accompagner, donc expliquer les raisons… Cela peut mettre la personne en difficulté. Quand il y a des transports en commun, cela fonctionne encore, mais ce n’est pas le cas partout dans le département de l’Aveyron.

C’est donc un vrai problème pour les Aveyronnaises que de ne pas pouvoir accéder à l’IVG partout, après les 12 semaines, sachant que la loi l’autorise depuis mars 2022. Les femmes aveyronnaises sont donc lésées dans leur droit ?

La loi a avancé. Des décisions ont été prises, mais comme pour tout changement, cela nécessite un accompagnement. Il faut encourager les équipes, les former par rapport au passage de l’élargissement des délais, de 12 à 14 semaines. Il faut mieux former les professionnels. Il y a aussi parfois un problème d’équipement matériel. Et puis, il faut que les équipes soient soutenues. Nous en avons qui portent un peu tout. Ce problème d’effectif est lié à notre désert médical. Déjà que peu de médecins se positionnent pour faire des IVG, si en plus, il faut venir en Aveyron… C’est parfois compliqué. Rappelons qu’en Aveyron, on n’arrive pas à faire venir des généralistes…

Est-ce que cette problématique d’accès à l’IVG au-delà des 12 semaines est aussi liée à la fermeture des maternités ?

En 20 ans, nous pouvons affirmer qu’il y a 50 % des centres IVG qui ont fermé. Cela n’aide pas. Nous devons rester vigilantes pour que la loi soit respectée.

Les sages-femmes en libéral pourraient être invitées à plus pratiquer ces IVG au-delà des 12 semaines, afin de favoriser cet accès en Aveyron ?

J’ai vu que le décret permettant aux sages-femmes en libéral de réaliser les IVG instrumentales, allait être réexaminé car les conditions posées étaient restrictives. Cela participera également à améliorer l’accès à l’IVG.

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