Tourisme de la drogue: la fronde des coffee shops de Maastricht

  • Des touristes regardent la devanture d'un coffe shop fermé, le 24 mai 2013 à Maastricht
    Des touristes regardent la devanture d'un coffe shop fermé, le 24 mai 2013 à Maastricht AFP/Archives - Nicolas Delaunay
  • Des policiers contrôlent l'identité des clients d'un coffe shop de Maastricht, le 2 mai 2012
    Des policiers contrôlent l'identité des clients d'un coffe shop de Maastricht, le 2 mai 2012 ANP/AFP/Archives - Marcel van Hoorn
  • Marc Josemans, propriétaire de l'Easy Going, posté à l'entrée de son coffee shop, le 1er mai 2012 à Maastricht
    Marc Josemans, propriétaire de l'Easy Going, posté à l'entrée de son coffee shop, le 1er mai 2012 à Maastricht ANP/AFP/Archives - Marcel van Hoorn
  • Une photo du 24 mai 2013 montre la péniche du coffee shop Mississippi river à Maastricht, fermé par les autorités
    Une photo du 24 mai 2013 montre la péniche du coffee shop Mississippi river à Maastricht, fermé par les autorités AFP/Archives - Nicolas Delaunay
Publié le
AFP

Les coffee shops de Maastricht bravent ouvertement la municipalité, lassée du tourisme de la drogue, qui leur a interdit de vendre du cannabis aux étrangers. Résultat? Un bras de fer marqué par des poursuites pénales et la fermeture de la majorité des coffee shops de la ville.

Depuis le 1er janvier, chaque municipalité néerlandaise peut ordonner à ses coffee shops de ne vendre du cannabis qu'aux résidents des Pays-Bas. Il s'agit de lutter contre les nuisances -embouteillage, dealers dans les rues, tapage nocturne- provoquées par la venue de millions d'étrangers chaque année dans ces quelque 650 établissements du pays.

Maastricht, une des plus touchées par ces nuisances car coincée entre les frontières belges et allemandes, applique la législation, comme d'autres villes du Sud. Amsterdam et les villes du Nord, plus éloignées de la Belgique, de l'Allemagne et de la France, ne l'appliquent pas.

Les coffee shops de Maastricht, qui assurent refuser toute "discrimination" et se voient privés de 65% de leur clientèle, sont opposés à cette législation.

Ils avaient interprété comme un feu vert une décision du 25 avril d'un tribunal administratif selon laquelle la municipalité avait eu tort d'ordonner la fermeture de l'"Easy Going" en mai 2012 pour infraction à la législation (dans le Sud du pays, elle était entrée en vigueur plus tôt que le 1er janvier 2013).

Les établissements membres de l'Association des coffee shops de Maastricht (VOCM), qui rassemble 13 des 14 coffee shops de la ville, ont dès lors recommencé à vendre aux étrangers à partir du 5 mai, mais pas pour longtemps...

Les contrôles policiers et sanctions de fermeture temporaire ont suivi, et les coffee shops de la VOCM ont fermé les uns après les autres.

Huit propriétaires et employés de coffee shops comparaîtront en outre le 12 juin dans le cadre d'une procédure au pénal. D'autres devraient suivre. Municipalité et VOCM attendent le résultat de cette procédure afin que la jurisprudence puisse être établie.

Le 14ème coffee shop de Maastricht reste ouvert.

"A la suite d'un jugement récent, l'idée incorrecte selon laquelle les coffee shops pouvaient à nouveau vendre aux étrangers s'est propagée", soutient le parquet dans un communiqué, assurant que le tribunal n'avait pas critiqué la législation elle-même mais uniquement la manière dont la municipalité avait justifié la décision de fermer l'"Easy Going".

Selon les autorités locales, il suffit de remédier à ce point de procédure pour légitimer les ordres de fermeture.

Les coffee shops jouent les victimes

"Les coffee shops sont malins", assure à l'AFP Gertjan Bos, porte-parole de la municipalité. "Par exemple, cette histoire de fermeture est une vaste blague, ils jouent les victimes".

En effet, assure-t-il, les établissements dont la fermeture a été ordonnée peuvent, s'ils soumettent une requête en ce sens, rester ouverts tant que la procédure engagée devant un tribunal administratif n'est pas terminée.

Contactée par l'AFP, la VOCM n'a pas souhaité commenter. Selon les médias néerlandais, un coffee shop au moins a décidé de ne pas introduire une telle requête afin d'accélérer la procédure.

Pour le président de la VOCM, Marc Josemans, la situation actuelle est en partie la faute des pays voisins qui, en interdisant la vente de cannabis, précipitent les consommateurs aux Pays-Bas. "Si les gouvernements des pays voisins prenaient leurs responsabilités, nous n'en serions pas là".

Techniquement illégale, la possession, la consommation et la vente, dans les coffee shops, de moins de 5 grammes de cannabis par personne sont tolérées aux Pays-Bas depuis 1976.

"Bonne herbe!"

Gertjan Bos estime que l'introduction de la législation a réduit de 1,5 million à 300.000-400.000 le nombre d'étrangers rendant chaque année visite aux coffee shops de Maastricht.

Mal informés ou tentant malgré tout leur chance, certains touristes constatent, frustrés, que les coffee shops sont fermés; tout bénéfice pour les dealers de rue, qui gravitent en permanence autour pour vendre du cannabis moins cher ou des drogues plus dures.

La municipalité reconnaît que leur nombre n'a pas diminué et qu'ils sont même plus pressants qu'auparavant. Pour la VOCM, leur nombre a même augmenté.

"Nous ne pouvons pas le prouver, mais nous pensons que certains dealers de rue sont engagés par les coffee shops eux-mêmes", soutient Gertjan Bos.

Le long du fleuve traversant la ville, la Meuse, il est quasiment impossible de ne pas se faire accoster par des dealers, les plus hardis criant haut et fort "Bonne herbe!".

La présence policière a dès lors été renforcée alors que le conseil municipal a décidé de mener une enquête sur la possible délocalisation de la moitié des coffee shops de Maastricht à l'extérieur de la ville, une mesure évoquée à plusieurs reprises par le passé.

Les coffee shops du centre-ville resteraient interdits aux étrangers tandis que ceux situés à l'extérieur leur seraient ouverts, avec le risque, alors, de créer des ghettos du cannabis.

Source : AFP

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