Procès du Prestige: 11 ans après, la justice espagnole rend son verdict

  • Le pétrolier Le Prestige, coupé, en deux coule au large de la Galice, le 19 novembre 2002
    Le pétrolier Le Prestige, coupé, en deux coule au large de la Galice, le 19 novembre 2002 AFP/Archives
  • Apostolos Mangouras (g), le commandant du pétrolier Le Prestige et le chef mécanicien Nikolaos Argyropoulos (2e g) arrivent au tribunal de La Corogne, le 13 novembre 2013
    Apostolos Mangouras (g), le commandant du pétrolier Le Prestige et le chef mécanicien Nikolaos Argyropoulos (2e g) arrivent au tribunal de La Corogne, le 13 novembre 2013 AFP - Rafa Rivas
  • Des volontaires nettoient une plage de la pollution provoquée par le naufrage du pétrolier Le Prestigue, le 1er décembre 2002, à Nemina, en Espagne
    Des volontaires nettoient une plage de la pollution provoquée par le naufrage du pétrolier Le Prestigue, le 1er décembre 2002, à Nemina, en Espagne AFP/Archives - Christophe Simon
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AFP

Onze ans jour pour jour après le SOS lancé par le Prestige, la justice rend son verdict mercredi dans le procès de la plus grave marée noire de l'histoire de l'Espagne, dans lequel trois accusés, dont le commandant grec du pétrolier, risquent entre cinq et 12 ans de prison.

Le procès, après une instruction longue et complexe, s'était ouvert le 16 octobre 2002 devant le tribunal supérieur de justice de Galice, à La Corogne, dans le nord-ouest de l'Espagne. Il s'était achevé le 10 juillet après huit mois d'auditions.

Le juge Juan Luis Pia donnera lecture mercredi du verdict: le parquet a requis entre cinq et 12 ans de prison pour le commandant, Apostolos Mangouras, âgé de 78 ans, le chef mécanicien du Prestige, Nikolaos Argyropoulos, grec lui aussi, et le directeur de la Marine marchande espagnole de l'époque, José Luis Lopez-Sors, ainsi que 4,328 milliards d'euros de dommages et intérêts.

Un quatrième accusé, l'officier en second philippin Ireneo Maloto, est en fuite.

Les accusés, tous âgés de plus de 70 ans, devraient pour cette raison échapper à la prison.

Le premier SOS avait été lancé le 13 novembre 2002, lorsque le Prestige, un pétrolier libérien à coque simple battant pavillon des Bahamas, construit en 1976 et chargé de 77.000 tonnes de fuel, subissait une voie d'eau en pleine tempête, dans l'Atlantique au large de la Galice.

Pendant six jours, le navire, sa coque déchirée, avait dérivé en pleine tempête, les pouvoirs publics ayant pris la décision controversée de l'éloigner des côtes au lieu de le faire rentrer dans un port pour y contenir la fuite.

Le pétrolier s'était finalement brisé en deux et avait coulé à 8 heures du matin le 19 novembre, à 250 kilomètres des côtes par près de 4.000 mètres de fond, crachant un fuel épais et visqueux qui avait pollué plus de 1.700 kilomètres de littoral, en Espagne, mais aussi au Portugal et en France.

Pendant le procès, durant lequel le tribunal a entendu plus de 200 témoins et experts, le commandant et l'armateur du Prestige ont accusé le gouvernement espagnol d'avoir provoqué le naufrage en ordonnant au navire de prendre le large. 1.500 plaignants au total s'étaient rassemblés en 55 parties civiles.

Les autorités "nous ont donné le cap 320", c'est-à-dire vers le nord-ouest. "C'était un cap peu sûr. Le navire a une voie d'eau et ils l'envoient au large, dans l'océan", avait raconté à la barre du tribunal Apostolos Mangouras, poursuivi pour atteinte à l'environnement.

"C'était la pire option. Ils nous transformaient en un cercueil flottant et ils nous envoyaient à la noyade", avait-il ajouté, s'interrompant un moment en larmes. "Nous attendions une tempête pour le 15 novembre. Où allions-nous?", avait-il poursuivi, rappelant que huit marins restaient alors à bord après l'évacuation d'une partie de l'équipage.

"C'était une simple fuite en avant", avait déclaré l'avocate de l'armateur Mare Shipping, propriétaire du Prestige, pour qui ce choix était un "cap suicidaire".

Seul représentant des autorités parmi les accusés, José Luis Lopez-Sors avait lui défendu cette décision. "Il me semblait mieux que le bateau coule loin de la côte pour minimiser les dégâts environnementaux", avait-il expliqué.

Onze ans plus tard, il ne reste aucune trace de la catastrophe sur les plages et les rochers de Galice.

Mais les écologistes estiment que les leçons de la marée noire n'ont jamais été tirées et avaient dénoncé, à l'ouverture du procès, l'absence sur le banc des accusés des responsables politiques de l'époque.

Parmi eux, l'actuel chef du gouvernement espagnol, Mariano Rajoy, qui en était alors le numéro deux et avait tenu des propos minimisant l'impact de la catastrophe: il s'était refusé à parler de "marée noire" mais seulement de "filaments, comme de la pâte à modeler" pour désigner les amas de fioul noir qui, pendant plusieurs semaines, s'étaient déversés sur les côtes.

Source : AFP

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