Turquie: le drame minier fait monter la colère contre Erdogan

  • Schéma expliquant la catastrophe et localisation de Soma
    Schéma expliquant la catastrophe et localisation de Soma AFP - -, K.Tian, J.Jacobsen
  • Des manifestants le 15 mai 2014 à Istanbul
    Des manifestants le 15 mai 2014 à Istanbul AFP - Gurcan Ozturk
  • Recep Tayyip Erdogan le 14 mai 2014 sur le site de la mine de Soma
    Recep Tayyip Erdogan le 14 mai 2014 sur le site de la mine de Soma AFP - Bulent Kilic
  • Coup de pied d'un assistant de Recep Tayyip Erdogan, à un contestataire tenu à terre par des policiers le 15 mai 2014 à Soma
    Coup de pied d'un assistant de Recep Tayyip Erdogan, à un contestataire tenu à terre par des policiers le 15 mai 2014 à Soma AFP - Depo Photos
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AFP

La catastrophe minière en Turquie a provoqué une nouvelle colère sociale contre le régime du Premier ministre islamo-conservateur Recep Tayyip Erdogan à l'orée d'une élection présidentielle tandis que d'ultimes efforts étaient mobilisés vendredi pour dégager les derniers corps de mineurs.

L'émotion suscitée par la mort de près de 300 mineurs s'est rapidement muée en fronde contre le Premier ministre qui doit annoncer dans les prochaines semaines sa candidature à un premier scrutin au suffrage universel, prévu le 10 août.

Depuis l'accident survenu dans la mine de charbon de Soma, dans l'ouest de la Turquie, des milliers de Turcs sont descendus dans les rues pour manifester leur mécontentement contre le gouvernement, sous le feu des critiques, qu'ils accusent de laxisme et d'indifférence au sort des travailleurs en général.

Déjà fortement contesté par une mobilisation populaire inédite lors d'un mouvement qui a duré trois semaines dans toute la Turquie en été 2013, le pouvoir a tenté de calmer les esprits promettant de faire "toute la lumière" sur cette pire catastrophe industrielle de l’histoire du pays.

"Il y aura une enquête approfondie", a assuré mercredi M. Erdogan qui s'est rendu sur place mais a aussi mis l'accident sur le compte de la fatalité en donnant en exemple des accidents survenus notamment en France au début du siècle précédent, exacerbant la colère populaire.

"Les accidents sont dans la nature même des mines", a renchéri M. Erdogan avant d'être hué et violemment pris à partie par la population locale, malgré l'impositif dispositif de sécurité qui l'entourait.

- Erdogan accusé d'avoir giflé un manifestant -

Selon des images qui ont circulé sur les réseaux sociaux, M. Erdogan, connu pour ses coups de colère, s'en serait même physiquement pris à un manifestant qui l'accablait de critiques, une information qui n'a pu être vérifiée de source officielle.

"Le Premier ministre a giflé un citoyen!", titrait vendredi le journal d'opposition Sözcü.

Un de ses assistants à ajouté à la controverse, en donnant un coup de pied à un autre contestataire tenu à terre par des policiers armés jusqu'aux dents. La photo du conseiller a choqué le pays, indignant une Turquie meurtrie et en deuil.

La police est sur le qui-vive dans toute la Turquie depuis l'accident et réprime violemment tout rassemblement comme c'était le cas jeudi à Izmir (ouest) ou Istanbul, faisant au moins une dizaine de blessées, selon les médias.

La police anti-émeute a dispersé avec des grenades lacrymogènes des cortèges de militants syndicaux en grève dans plusieurs autres villes, dont Ankara.

Partout, les mêmes slogans visant le régime: "Gouvernement démission".

Les opposants d’Erdogan insistent sur la carence du contrôle des lieux de travail par les pouvoirs publics, et notamment dans le secteur minier.

Fragilisé pendant plusieurs mois après la révélation en décembre d'un vaste scandale de corruption mettant en cause son régime et sa personne, M. Erdogan est sorti néanmoins renforcé d'élections municipales que son parti de la justice et du développement (AKP) a remporté haut la main le 30 mars.

Il n'y a aucun doute que l'homme fort et charismatique du pays se présentera au scrutin présidentiel qu'il a toutes les chances de remporter, de l'avis des observateurs.

Sur place, les quelque 500 secouristes continuaient de s'affairer pour extirper du puits les derniers corps.

"Un maximum de 18 mineurs sont encore coincés dans la mine", a annoncé vendredi le ministre de l'Energie Taner Yildiz qui a dit que le bilan total de la tragédie devrait ainsi s'élever à "301 ou 302 morts". La compagnie privée qui exploite la mine de Soma, a pour sa part démenti toute "négligence".

"Nous n'avons commis aucune négligence dans cet accident", a affirmé Akin Celik, le directeur d'exploitation de Soma Kömür Isletmeleri A.S devant la presse, précisant qu'une explosion de poussière de charbon pouvait être à l'origine de l'explosion qui a provoqué le drame et non pas un court-circuit d'un transformateur électrique évoquée dès le début de l'accident.

Le PDG de la compagnie, Alp Gürkan, a pour sa part évoqué une "tragédie incroyable", affirmant que la mine respectait toutes les normes de sécurité.

M. Gürkan qui serait un proche du parti au pouvoir, est accusé depuis l'accident par la presse d'avoir fait primer la rentabilité et le profit sur la sécurité des mineurs.

En 2012, dans un entretien à un journal turc, le même homme d'affaires s'était vanté d'être parvenu à réduire les coûts de production à 24 dollars la tonne contre 130 avant la privatisation de la mine.

Les formations d'opposition au parlement avaient demandé il y a trois semaines la création d’une commission d’enquête parlementaire sur les conditions de travail dans les mines de charbon de Soma, ville minière. L’AKP s’y était opposée.

Source : AFP

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