"Chicano Dream", le meilleur de l'art contemporain chicano à Bordeaux

  • Une oeuvre de l'artiste américain Cesar Martinez exposée au Musée d'Aquitaine, à Bordeaux, le 26 juin 2014
    Une oeuvre de l'artiste américain Cesar Martinez exposée au Musée d'Aquitaine, à Bordeaux, le 26 juin 2014 AFP/Archives - Mehdi Fedouach
  • Une oeuvre de l'artiste américain John Valadez présentée le 26 juin 2014 au Musée d'Aquitaine, à Bordeaux
    Une oeuvre de l'artiste américain John Valadez présentée le 26 juin 2014 au Musée d'Aquitaine, à Bordeaux AFP/Archives - Mehdi Fedouach
  • Des oeuvres de l'artiste américaine Sonia Romero, le 26 juin 2014 au Musée d'Aquitaine, à Bordeaux, dans une exposition sur l'art chicano
    Des oeuvres de l'artiste américaine Sonia Romero, le 26 juin 2014 au Musée d'Aquitaine, à Bordeaux, dans une exposition sur l'art chicano AFP/Archives - Mehdi Fedouach
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Centre Presse Aveyron

Deux hyènes noires aux crocs menaçants se détachent d'un fond de ciel rouge sang et attendent, au bout d'une enfilade d'affiches politiques: l'impossible "Chicano dream" ("Rêve Chicano") s'expose à Bordeaux, accrochage intense du meilleur de l'art contemporain des descendants de Mexicains aux Etats-Unis.

Les hyènes barrent la route menant à l'Hôtel de ville de Los Angeles (Californie) sur cette toile du peintre Alfredo de Batuc (1986), qui fait partie de la collection de Cheech Marin, acteur américain ayant prêté 70 des 120 oeuvres exposées au Musée d'Aquitaine.

Cette exposition, qui rassemble des oeuvres de 28 artistes jusqu'au 26 octobre, en hommage au jumelage entre Bordeaux et Los Angeles, où plus de la moitié de la population est hispanique, est très rare en France: la dernière sur l'art des Chicanos remonte à 1989, à Nantes.

Or, depuis 1989, des artistes ont émergé, d'autres ont mûri. Dans les années 1970, ils étaient "politiques" et s'inspiraient du syndicaliste Cesar Chavez, des peintres engagés Diego Rivera et Frida Kahlo. Ils peignaient sauvagement et participaient au mouvement pour un "Chicano Power" des descendants des immigrés mexicains.

Les artistes chicanos sont ainsi à l'origine du "muralisme", s'exprimant sur les murs délabrés des bas-quartiers de Los Angeles et racontant au petit peuple son histoire, ses icônes.

- "Peinture rebelle" -

Pourtant, comme l'explique la conservatrice Katia Kukawka, il ne s'agissait pas de "peinture naïve", mais d'une peinture "rebelle". Leurs oeuvres vont de "manière délibérée et consciente vers les comics, l'expressionnisme tiré vers le fauvisme", résume-t-elle.

"Les latinos sont théâtraux par nature", ironise aussi Cheech Marin. Ils sont donc parfois très proches de "l'expressionnisme allemand, l'une de leurs principales inspirations", dit-il à l'AFP. C'est pourquoi on songe parfois à Otto Dix en déambulant dans le musée, secoué de couleurs vives, de caricatures, grimaçes et sentiments débordants.

Ainsi, Franck Romero, artiste de Los Angeles, avec son dyptique de 3,6 m sur 2,4, qui dépeint l'arrestation douloureuse de "paleteros", petits vendeurs à la sauvette dont ce monsieur portant un bouquet de ballons, acculé à la fuite par un policier. Ou le drôle de chien antropomorphe de Gilbert "Magu" Lujan.

A l'étage, une peinture de John Valadez, un des principaux représentants vivants de l'art chicano, interpelle: "Catch of the day", portrait d'une prostituée photographiée dans les années 1980 et remise en scène dans un univers fantastique et marin, eau à mi-mollets, tenant un poisson menaçant.

John Valadez décrit l'histoire de ces artistes: "La frontière (avec le Mexique) nous a traversés", dit-il à l'AFP en résumant sa généalogie, avec une mère descendante de Mexicains devenus américains après la vente d'un pan entier de ce pays aux Etats-Unis à l'issue de la guerre américano-mexicaine de 1846-1848, et un père "de l'intérieur", ayant traversé la frontière.

"J'appartiens à une quatrième génération" de descendants de Mexicains, raconte le peintre, né en 1951, et "nous étions punis quand nous parlions espagnol". "Je ne parle pas ma langue, mais être Chicano, c'est devenir positif" sur cette culture que "j'apprends en permanence".

Et, comme d'autres, John Valadez a évolué: au départ, "jeune Mexicain Américain tentant de devenir un artiste", il est maintenant "un Chicano qui fait de l'art". "Les artistes très politiques au commencement ont ensuite développé leurs visions très personnelles", résume Cheech Marin.

De cette évolution témoigne le bouquet final de l'exposition avec les très contemporains Sonia Romero, Albert Lopez Jr, Carlos Donjuan, tous dans la trentaine et maîtrisant toutes sortes de techniques, de la classique huile sur toile à la sérigraphie en passant par le bois.

Un homme en tenue de rue et au masque de tigre vert et blanc, de Carlos Donjuan, amène aux incroyables tableaux de Shizu Saldamando, raffinée comme sa mère descendante de Japonais et intense comme son père mexicain, militant de la cause amérindienne. Deux femmes s'embrassent sur un fond en feuilles d'or. Un Chicano au bras tatoué "mi unico amor" ("mon seul amour") a trouvé sa parfaite couleur de peau dans le bois utilisé comme support.

Source : AFP

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