Prière de rue et Occupation: relaxe requise pour Marine Le Pen

  • Marine Le Pen le 20 octobre 2015 au tribunal de Lyon
    Marine Le Pen le 20 octobre 2015 au tribunal de Lyon AFP - JEAN-PHILIPPE KSIAZEK
  • Marine Le Pen quitte le tribunal de Lyon, le 20 octobre 2015
    Marine Le Pen quitte le tribunal de Lyon, le 20 octobre 2015 AFP - PHILIPPE DESMAZES
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Centre Presse Aveyron

Le procureur a requis mardi la relaxe pour Marine Le Pen, poursuivie pour avoir comparé les prières de rue de musulmans à l'Occupation allemande durant la Seconde guerre mondiale, estimant qu'elle n'avait fait qu'exercer sa "liberté d'expression".

"Mme Le Pen, en dénonçant ces prières dans l’espace public, imputables non à l'ensemble de la communauté musulmane, mais a une minorité, n'a fait qu’exercer sa liberté d'expression", a argumenté Bernard Reynaud, en demandant la relaxe.

M. Reynaud s'en est tenu au droit, en rappelant que pour "occuper", ne serait-ce que momentanément, l'espace public, "il faut se soumettre à certaines règles". En revanche, il s'est refusé à entrer dans le débat sur la référence, ou pas, à la Seconde Guerre mondiale.

Marine Le Pen encourt une peine d'un an d'emprisonnement et 45.000 euros d'amende. La décision a été mise en délibéré au 15 décembre à 14H00.

Venue se défendre en personne, la présidente du Front National - qui comparaissait pour la première fois devant un juge - était arrivée en tout début d'après-midi tout sourire, assaillie par des dizaines de caméras du monde entier.

Elle a d'abord feint de s'étonner de la date de sa convocation devant la Justice: "Il ne vous étonne pas ce calendrier ? Nous sommes à un mois d'une élection régionale alors que cette affaire a cinq ans !". Et de critiquer une nouvelle fois une justice française aux ordres, selon elle, du pouvoir socialiste.

Pour ce procès, qui lui donne une tribune inespérée, sa ligne de défense est claire: elle n'a "commis aucune infraction" et elle entend "défendre la liberté d'expression".

L'affaire, qui avait fait grand bruit, remonte à décembre 2010. Marine Le Pen est alors en campagne pour la présidence du Front national face au Lyonnais Bruno Gollnisch. Elle assiste à une réunion publique de militants dans la capitale rhône-alpine.

L'entreprise de dédiabolisation du parti a déjà commencé et pourtant elle déclare: "Je suis désolée, mais pour ceux qui aiment beaucoup parler de la Seconde Guerre mondiale, s'il s'agit de parler d'Occupation, on pourrait en parler, pour le coup, parce que ça c'est une occupation du territoire".

Avant d'ajouter: "C'est une occupation de pans du territoire, des quartiers, dans lesquels la loi religieuse s'applique, c'est une occupation. Certes, il n'y a pas de blindés, pas de soldats, mais c'est une occupation tout de même et elle pèse sur les habitants".

D'ailleurs, elle a nié pendant son intervention d'une demi-heure avoir fait une référence explicite à la Seconde Guerre mondiale. Elle explique avoir parlé d'occupation pour justement se détacher des propos de son rival d'alors et de son père qui prennent souvent la Seconde Guerre en référence.

"J'ai voulu m'intéresser aux problèmes des Français et non pas me lancer dans des références au passé ou à l'histoire 70 ans en arrière. En 2005, j'ai déjà eu un conflit assez sévère à la suite de propos du président du FN (son père, ndlr)", a-t-elle plaidé, très à l'aise dans une salle d'audience, elle qui est avocate de profession.

- "une explication politique, pas juridique" -

Tailleur noir et chemisier gris, Mme Le Pen était convoquée devant la 6e chambre, celle de la presse, du tribunal de grande instance de Lyon, prise d'assaut pour l'occasion. Le chef de file du FN pour les régionales en Auvergne-Rhône-Alpes Christophe Boudot était assis à ses côtés.

Elle était poursuivie par plusieurs associations de lutte contre le racisme et l'Observatoire national contre l'Islamophobie du Conseil français du culte musulman (CFCM).

"Sa justification ne m'a pas convaincu. Elle a surtout apporté une explication sur le plan politique, pas sur le plan juridique", a analysé Me Matthieu Hénon, avocat d'une des parties civiles, le Mrap, devant la presse.

"Dans ses propos, elle met en relation les prières de rue avec l'Occupation. La succession des mots est très claire (les soldats, les blindés...). On nous dit ce sont des ennemis qui viennent occuper le territoire (...), on a l'idée d'un ennemi qu'il faut combattre et cet ennemi, c'est l'ensemble des musulmans", a de son côté plaidé Me Henri Braun, avocat du Collectif contre l'islamophobie en France (CCIF).

L'audience était présidée par le juge Gérard Gaucher, qui s'était illustré il y a deux ans en déplaçant de manière exceptionnelle une audience dans un campement insalubre de Roms, pour mieux juger une expulsion.

Source : AFP

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