Escrime : Tifaine et les garçons

  • La Ruthénoise de 20 ans a quitté les catégories jeunes pour évoluer désormais chez les seniors
    La Ruthénoise de 20 ans a quitté les catégories jeunes pour évoluer désormais chez les seniors JLB
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Guillaume Verdu

Sport. Depuis la rentrée de septembre, l’épéiste de Rodez a intégré le Creps de Reims où elle s’entraîne au quotidien avec des hommes. Un cas unique à travers l’hexagone. En garde !

Un changement de monde. La reprise de la saison, en septembre, a marqué une évolution importante dans la carrière de l’escrimeuse Tifaine Pierre-Cavaignac. À double titre. La Ruthénoise de 20 ans a quitté les catégories jeunes pour évoluer désormais chez les seniors. Surtout, elle est passée du Centre régional d’éducation physique et sportive (Creps) de Bordeaux à celui de Reims. Non pas qu’elle préfère le champagne au vin...

La sociétaire de l’Escrime Rodez Aveyron a rejoint la cité champenoise pour se lancer dans un projet novateur, en intégrant une section réservée jusque-là aux garçons. Une première en France. Actuellement, les différents Creps sont exclusivement composés de filles pour les uns, de garçons pour les autres. La Fédération française d’escrime souhaite mettre fin à ce système et instaurer une part de mixité. La jeune épéiste endosse, dans ce cadre, un rôle de pionnière.

«Quand on m’a proposé ce projet, j’ai foncé»

«Tifaine a le gabarit, le mental et le niveau pour intégrer une formation avec les garçons. Mais seulement deux ou trois filles en France peuvent prétendre à cela», explique Bruno Gares, maître d’armes de l’Era et beau-père de l’épéiste. «Quand on m’a proposé ce projet, j’ai foncé», lance-t-elle très enthousiaste. Deux mois après son arrivée à Reims, l’Aveyronnaise est satisfaite de son choix.

Elle s’entraîne au quotidien avec une quinzaine d’escrimeurs qui évoluent en catégorie junior. «Au début, ce n’était pas toujours facile, dit Bruno Gares. Elle prenait des 15-2, des 15-3 à l’entraînement. 

En deux mois et demi, elle n’a pas gagné un assaut. Il faut avoir la solidité mentale pour accepter cela. Maintenant, cela va un peu mieux. Les matches se terminent plutôt à 15-7 ou 15-8.» Tifaine Pierre-Cavaignac assure avoir fait des progrès aux niveaux «physique et tactique». «Elle est plus costaude, plus régulière dans les assauts, se relâche moins. Ce n’est que du positif», apprécie son mentor.

«Je suis avec les derniers, mais je suis là» 

Des assauts à la course, la Ruthénoise participe aux mêmes exercices que ses homologues masculins lors des deux heures d’entraînement quotidiennes. «À ma grande surprise, je ne suis pas à la traîne, se réjouit-elle. Je suis avec les derniers, mais je suis là.» Une exception, toutefois: la musculation. «Nous faisons les mêmes exercices. Mais quand je pousse 20 kilos, eux ils ont le double ou le triple.» La jeune femme, qui est en parallèle en deuxième année de BTS communication, assure également avoir fait des progrès dans la dimension mentale. Mais cette fois, ce n’est pas dû à ses enraînements avec les garçons. «Contrairement à Bordeaux, le Creps de Reims dispose d’un préparateur mental, explique-t-elle. C’est d’ailleurs un des arguments qui fait que je suis venue ici. Avec lui, j’apprends à mieux aborder les assauts, à ne pas stresser. Il me fait travailler sur la respiration et sur la concentration, afin de ne pas avoir trop de pensées parasites.» 

Un premier podium sur le circuit national

Rassurez-vous, malgré les apparences, Tifaine Pierre-Cavaignac n’est pas toute seule au milieu des mâles. «Je partage le vestiaire et l’internat avec des judokates, des basketteuses, des joueuses de tennis... » Et, de toute manière, les relations avec ses partenaires d’entraînement sont plutôt bonnes. «Ils m’ont accueillie comme un des leurs, assure-t-elle. Ils m’encouragent beaucoup mais ce n’est pas parce que je suis une fille qu’ils se relâchent quand ils tirent contre moi.»

Ses performances récentes montrent que son choix semble fructueux. L’Aveyronnaise a décroché, il y a une dizaine de jours, la troisième place lors d’une manche du circuit national, à Mâcon. Son meilleur résultat dans une épreuve de ce niveau. Avec, en prime, une victoire de prestige, obtenue contre Julie Mestres, numéro 4 française. Cette saison, l’épéiste de l’Era a prévu de participer aux autres manches du circuit national, ainsi qu’à des épreuves de niveau international réservées aux moins de 23 ans ou encore aux championnats de France individuels et par équipes.

Troisième des derniers championnats de France junior, en mai, sélectionnée par le passé dans les équipes de France de jeune, Tifaine Pierre-Cavaignac a un bel avenir devant elle. Même si la Ruthénoise assure «faire son petit bonhomme de chemin sans trop se fixer d’objectifs», de nouvelles perspectives s’ouvrent à elle depuis son arrivée à Reims. La ville surnommée la cité des sacres... De quoi lui donner des idées. 

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