Maroc: l'actrice de "Much Loved" quitte le pays, où "les femmes libres dérangent"

  • L'actrice marocaine Loubna Abidar reçoit le Valois de la meilleure actrice pour son rôle dans "Much Loved" le 30 août 2015, au 8e festival du film francophone d'Angoulême
    L'actrice marocaine Loubna Abidar reçoit le Valois de la meilleure actrice pour son rôle dans "Much Loved" le 30 août 2015, au 8e festival du film francophone d'Angoulême AFP/Archives - Yohan Bonnet
  • L'actrice marocaine Loubna Abidar (g) et le réalisateur franco-marocain Nabil Ayouch du film "Much Loved", le 26 août 2015 à Angoulême
    L'actrice marocaine Loubna Abidar (g) et le réalisateur franco-marocain Nabil Ayouch du film "Much Loved", le 26 août 2015 à Angoulême AFP/Archives - Yohan Bonnet
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Centre Presse Aveyron

La comédienne marocaine Loubna Abidar, actrice principale du film "Much Loved" interdit au Maroc, explique avoir décidé de quitter son pays car "les femmes libres dérangent", jeudi dans une tribune sur le site du quotidien français Le Monde.

La comédienne, qui avait reçu des menaces pour avoir joué dans ce film traitant de la prostitution au Maroc, est arrivée dimanche à Paris, après avoir publié sur les réseaux sociaux une vidéo où elle apparaît avec le visage tuméfié.

Dans cette vidéo, elle affirme avoir été agressée jeudi dernier à Casablanca. Cette agression n'a pas pu être confirmée par des sources officielles au Maroc.

"Au fond, on m'insulte parce que je suis une femme libre. Et il y a une partie de la population, au Maroc, que les femmes libres dérangent, que les homosexuels dérangent, que les désirs de changement dérangent", écrit Loubna Abidar dans cette tribune intitulée "Pourquoi je quitte le Maroc".

La comédienne explique avoir été la cible d'une "campagne de détestation" et d'un "mouvement de haine" sur les réseaux sociaux et dans la population marocaine après la présentation du film au dernier festival de Cannes.

"Pendant des semaines, je ne suis pas sortie de chez moi, ou alors uniquement pour des courses rapides, cachée sous une burqa (quel paradoxe, me sentir protégée grâce à une burqa…)", détaille-t-elle.

Elle revient également sur son agression "par trois jeunes hommes". "J'étais dans la rue, ils étaient dans leur voiture, ils m’ont vue et reconnue, ils étaient saouls, ils m'ont fait monter dans leur véhicule, ils ont roulé pendant de très longues minutes et pendant ce temps ils m’ont frappée sur le corps et au visage tout en m’insultant".

"Much Loved dérangeait, parce qu’il parlait de la prostitution, officiellement interdite au Maroc, parce qu’il donnait la parole à ces femmes qui ne l’ont jamais", estime Loubna Abidar.

- 'Incroyablement seule' -

D'autre part, l'actrice met en cause l'attitude des services publics après son agression. "Les policiers au commissariat se sont ri de moi, sous mes yeux. Je me suis sentie incroyablement seule", écrit-elle.

De son côté, la Direction générale de la sûreté nationale marocaine (DGSN) a décidé de déposer une plainte contre Loubna Abidar pour des propos jugés "diffamatoires", selon un communiqué relayé jeudi par plusieurs médias marocains.

Il s'agit de propos tenus dans une vidéo ayant circulé sur les réseaux sociaux, dans lesquels Mme Abidar accusait la police de Casablanca d'avoir réfusé d'enregistrer sa déclaration quelques heures après son agression supposée.

Selon la DGSN, les déclarations de l'actrice sont "erronées" et "portent atteinte" à ses fonctionnaires. "L’avocat de la DGSN a saisi le procureur du roi pour qu’une enquête soit ouverte sur les propos qualifiés de diffamatoires par les autorités marocaines", indique le site d'information Al Yaoum 24.

"Much loved" avait été doublement récompensé au festival du film francophone d'Angoulême, fin août, avec le Valois d'or pour le film, réalisé par Nabil Ayouch, et celui de la meilleure actrice pour Loubna Abidar.

Le film suit le parcours de Noha, Randa, Soukaina et Hlima, quatre prostituées de Marrakech. Sur les écrans français depuis septembre, il devait sortir en salles au Maroc à l'automne, mais avait été interdit préventivement, en mai, par le gouvernement marocain qui avait évoqué "un outrage grave aux valeurs morales et à la femme marocaine".

Source : AFP

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