L’atelier de lithographie va pouvoir se mettre à l’ouvrage

En voyant une telle machine, on ne peut s’empêcher de penser, bien à tort d’ailleurs, à cette réflexion de Degas qui disait en substance que l’Art n’est pas de ces amours légitimes qu’on épouse, mais qu’on viole. Cette imposante machine en question, c’est la presse lithographique Marinoni-Voirin qui est arrivée mercredi matin à 9 heures, chargée sur une semi-remorque, dans le quartier La Prade de Flagnac.

Et c’est dans l’excitation et la fébrilité que le comité d’accueil l’a réceptionnée avant de prêter main-forte à la délicate manœuvre de transfert à l’intérieur de son nouvel atelier. Il y avait là quatre des cinq artistes qui en ont fait l’acquisition : Colette Marin, Laurent Nicolaï, Luc Laumet et André Stengle, mais aussi Pierre Tieulié, le maire du village qui a bien accompagné la création de l’atelier d’art 6026, (comme le nombre en cm² de la surface imprimable utile) auquel est destinée cette belle machine.

Sept tonnes de sensibilité

La belle afficherait presque les proportions d’une locomotive et son seul cylindre celui d’un rouleau compresseur. Pourtant, malgré ses quelque sept tonnes de fonte, d’acier et de laiton, qui évoquent une puissance infinie, c’est un véritable trésor de sensibilité qui sait se faire légère pour caresser et la pierre et le papier pour déposer en passes successives des promesses de lumière et de douce matière colorée…

Bichonnage

En cessation d’activité depuis une trentaine d’années, la belle endormie n’a que peu souffert. Ses nouveaux dépositaires vont à présent la bichonner, effacer les légères meurtrissures du temps qui se sont déposées en une fine pellicule de rouille sur les parties de métal nu.

«Le plus dur, précise André Stengele, consistera à enlever les croûtes de graisse qui se sont sédentarisées dans l’ensemble des rouages de la presse. Mais ce n’est rien de rédhibitoire. Quelques dizaines de longues journées de travail tout au plus…»

Il sera temps alors de faire connaissance avec la bête, d’en connaître tous les rouages, de régler les pressions d’encrage pour l’apprivoiser et dompter en quelque sorte sa force brute.

Des amis techniciens de Paris, lithographes et mécaniciens viendront alors à Flagnac pour partager avec les cinq artistes locaux leur savoir-faire et leur connaissance de la machine. Car si le «club des cinq» est rompu à la technique lithographique, il a encore tout ou presque à apprendre du métier de conducteur d’une 6026 Marinoni-Voirin! Le mois d’août y sera consacré et vers la fin août, début septembre le public sera convié à une inauguration en fonctionnement.

Un village d’Art

Si Pierre Tieulié est aussi impliqué dans ce projet c’est parce qu’il souhaite faire de Flagnac un village d’art. La municipalité a contribué à hauteur de 15 000€ (sans subvention) à la viabilisation de cet atelier (création d’une dalle, d’un bloc toilettes, assainissement) et il est question d’implanter un autre atelier d’artiste avec un logement au dessus… Mais ne grillons pas les étapes. Pour l’heure il est question de souhaiter longue et heureuse vie à la nouvelle venue qui était vouée, rappelons-le, à la casse.