Russie: la nostalgie de l'URSS se porte bien, 25 ans après

  • Des communistes russes rendent hommage au dictateur soviétique Joseph Staline au pied du Kremlin sur la place Rouge à Moscou, en Russie, le 21 décembre 2016
    Des communistes russes rendent hommage au dictateur soviétique Joseph Staline au pied du Kremlin sur la place Rouge à Moscou, en Russie, le 21 décembre 2016 AFP/Archives - Natalia KOLESNIKOVA
  • Des Moscovites font la queue pour acheter des produits alimentaires avant les fêtes de la fin d'année à Moscou, le 29 décembre 1990
    Des Moscovites font la queue pour acheter des produits alimentaires avant les fêtes de la fin d'année à Moscou, le 29 décembre 1990 AFP/Archives - ANDRE DURAND
  • Le président russe Boris Eltsine (g) et le président du Soviet Suprême de la Biélorussie Stanislav Chouchkevitch signent un document statuant que l'URSS n'existe plus, à Minsk, le 8 décembre 1991
    Le président russe Boris Eltsine (g) et le président du Soviet Suprême de la Biélorussie Stanislav Chouchkevitch signent un document statuant que l'URSS n'existe plus, à Minsk, le 8 décembre 1991 AFP/Archives - DAVID BRAUCHLI
  • Des visiteurs au mausolée Lénine, fondateur de l'URSS, à Moscou sur la place Rouge, le 11 octobre 2016
    Des visiteurs au mausolée Lénine, fondateur de l'URSS, à Moscou sur la place Rouge, le 11 octobre 2016 AFP - Natalia KOLESNIKOVA
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Centre Presse Aveyron

Vingt-cinq ans après la fin de l'URSS, une grande partie de la population russe regrette la chute de l'empire, un sentiment entretenu par le Kremlin qui s'emploie depuis des années à réhabiliter le passé soviétique.

A la question "Regrettez-vous la chute de l’URSS", 56% des personnes interrogées répondent oui, 28% non, et 16% ne se prononcent pas, selon un sondage réalisé en novembre par l'institut indépendant Levada.

"Le souvenir des pénuries et de la pauvreté a disparu chez les personnes âgées. Et l'image idéalisée de l'époque soviétique sert de comparaison pour critiquer la situation actuelle", relève le directeur du centre Levada, Lev Goudkov.

La jeune génération, elle, a du mal à se faire une idée de ce qu'était l'Union des Républiques socialistes soviétiques, dirigée pendant plus de 70 ans par un parti unique (le parti communiste) à l'idéologie marxiste-léniniste, sans liberté politique ou religieuse, avec une répression qui a fait des millions de morts, fusillés, envoyés au Goulag ou exterminés par la faim.

"Les jeunes disposent d'une image très empreinte de nostalgie transmise par l'ancienne génération ou des clichés idéologiques véhiculés par la télévision", regrette Lev Goudkov.

- Une expérimentation sociale grandiose -

Que penser de l'URSS 25 ans après ? Le patron du groupe de presse d'Etat Rossia Segodnia, Dmitri Kisselev, a donné le ton à la mi-décembre sur la TV Rossia 24: "Le but était de réaliser le paradis sur terre. On a réussi à faire beaucoup".

Il s'agissait d'une "expérimentation sociale grandiose", a-t-il ajouté dans un reportage intitulé "L'expérience bénéfique de l'URSS".

A la télévision comme au cinéma, de nombreux films donnent une image positive de l'Union soviétique, que ce soit des documentaires consacrés aux anciens dirigeants Léonid Brejnev et Iouri Andropov ou une série qui passe actuellement sur la première chaîne, "Une passion secrète", où les agents du KGB chargés de traquer les dissidents sont présentés sous un jour favorable.

A l'opposé, ceux qui s'occupent aujourd'hui des pages sombres de ce "passé lointain", comme l'ONG Memorial qui étudie les répressions sous le régime soviétique, de 1917 à 1991, sont régulièrement accusés de se livrer à des activités "non patriotiques".

Mais pourquoi le Kremlin s'appuie-t-il sur le passé soviétique ?

D'une part, le sentiment que la Russie a par essence vocation à être un Empire est toujours vivace dans la population. D'autre part, en entretenant le "mythe soviétique", les autorités espèrent "opposer la Russie au reste du monde" pour mieux justifier sa politique de "citadelle assiégée", estime l'historien Nikita Petrov, de l'ONG Memorial.

Les relations délétères entre Moscou et Occidentaux, notamment dans les dossiers syrien et ukrainien, ravivent aussi le souvenir des années de confrontation entre l'URSS et les pays de l'Otan, renforçant l'idée d'une opposition naturelle entre les deux camps. Jamais depuis la dislocation de l'Union soviétique, Russes, Américains et Européens n'ont-ils autant parlé d'une nouvelle Guerre froide.

- Staline et Lénine sur la place Rouge -

L'URSS a cessé d'exister et le communisme n'est plus l'idéologie officielle mais des milliers de rues et de monuments honorent toujours en Russie la mémoire des bolchéviks, à commencer par Lénine.

Le corps embaumé du chef de la révolution de 1917 et fondateur de l'Etat soviétique repose encore aujourd'hui dans son mausolée sur la place Rouge, devant les murailles du Kremlin, à quelques mètres de la tombe de Staline.

"En gardant la symbolique de l'époque soviétique et en laissant Staline et Lénine sur la place Rouge, les autorités veulent créer un lien allant des princes russes jusqu'au secrétaire général du parti communiste de l'URSS pour dire qu'il s'agit toujours de la même Russie sous des incarnations différentes", estime Nikita Petrov.

Le politologue pro-Kremlin Dmitri Orlov rejette cette vision des choses: "Les autorités ne cherchent pas à réhabiliter l'URSS. Lénine et Staline sur la place Rouge, c'est un fait sans importance. Pour la jeune génération, le mausolée, c'est comme les pyramide égyptiennes, un passé lointain".

En 2005, Vladimir Poutine avait résumé son credo: "La chute de l'URSS a été la plus grande catastrophe géopolitique du siècle". Peu après, il avait ajouté: "Celui qui ne regrette pas la chute de l'Union soviétique n'a pas de coeur. Et celui qui veut la reconstituer n'a pas de cerveau".

Source : AFP

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