Jean-Baptiste de Panafieu : "Il reste beaucoup à faire pour le bien-être animal"

  • Jean-Baptiste de Panafieu, inlassable observateur de la biodiversité .
    Jean-Baptiste de Panafieu, inlassable observateur de la biodiversité . REPRO CPA
Publié le , mis à jour
Propos recueillis par Aurélien Delbouis

Biologiste de formation et auteur de livres jeunesse et scientifiques, Jean-Baptiste de Panafieu vient de publier "L’Éveil", qui raconte comment un mystérieux virus a doté les animaux d’intelligence. Un roman d’anticipation qui touche à la problématique "brûlante" du bien-être animal. Une problématique qu'il a eu l'occasion d'aborder lors de conférences données en Aveyron, un département qui lui est cher, où il possède quelques racines et dans lequel il revient très régulièrement. 

Vous êtes biologiste de formation… Pourquoi l’écriture ?

J’ai fait une thèse en océanographie, c’est d’abord ça qui m’intéressait, j’ai ensuite enseigné pendant une quinzaine d’années, mais j’avais toujours envie de faire des films, des livres en lien avec les sciences biologiques, la nature. Quelque chose que j’imaginais depuis tout petit. En 95, j’ai arrêté l’enseignement progressivement avant de faire pas mal de films pour la télévision. Parallèlement, j’ai commencé à écrire des livres, et c’est devenu mon activité principale.

Parmi vos thèmes de prédilection, on retrouve l’environnement ou l’évolution du monde animal. Deux thématiques "brûlantes" aujourd’hui.

C’est vrai. Mais je n’ai pas attendu cette période pour m’intéresser aux animaux, à la nature. Je ne sais même quand j’ai commencé à m’intéresser à ces sujets… À 3 ans, j’avais des livres sur l’océan, j’adorais ça… D’après ce qu’on m’a dit, à vrai dire je ne m’en souviens pas (rires). Cette passion m’accompagne depuis.

Difficile d’évoquer le monde animal sans parler des mesures annoncées mardi par la ministre de la transition écologique sur le "bien-être de la faune sauvage captive". La ministre confirmant la fin des animaux sauvages sous chapiteaux de cirques itinérants ou dans les bassins de delphinarium notamment. Ce texte est-il suffisant selon vous ?

Non, ça ne l’est toujours pas. Il y a tant à faire. Pour la faune sauvage captive, des choses sont déjà prévues et devraient être appliquées. Mais il existe toujours des parcs zoologiques qui ne sont pas aux normes, ou qui ne font pas attention. Certains ont pris des mesures mais à la marge. Heureusement, la question du bien être animal est de plus en plus prise en compte. On la rencontre tout le temps. C’est devenu très important et c’est normal.

On reproche pourtant au texte de ne pas aborder les vrais sujets, les plus clivants : l’élevage intensif et la chasse.

Le sujet est délicat en effet. Mais ce que je remarque, c’est que de plus en plus de gens se rendent compte que ces questions ont été trop longtemps abandonnées. La question du modèle agricole par exemple, des méthodes d’élevage, d’abattage… Les gens se les posent, pas en termes du tout ou rien, c’est-à-dire, face à ça on arrête tout, ce qui paraît complètement bizarre comme vision du monde.

Et si en Aveyron la sensation est encore très différente de celle que l’on ressent devant une "usine à cochons", ces questions se posent. La tradition n’est pas forcément une garantie : l’élevage traditionnel de canard pour le gavage, ça fait un peu froid dans le dos.

Dans "l’éveil" vous racontez comment un mystérieux virus a doté les animaux d’intelligence. Doit-on y voir une mise en garde dans le contexte de crise du Covid ?

Non, dans l’Éveil, le virus est un prétexte. Il faut qu’il y ait un fond de sérieux scientifique pour que l’histoire ne soit pas complètement invraisemblable : ce n’est pas une opération magique. Mais la question des virus se pose en effet.

Avec la fonte des sols gelés de l’Arctique, on peut voir apparaître de nouveaux virus. Mais ce n’est pas ce qui pose problème aujourd’hui. Aujourd’hui, on parle d’une épidémie – de Covid – qui touche le monde depuis plusieurs mois. Mais il y a déjà eu par le passé de petites épidémies de la sorte, heureusement jugulées très vite, notamment en Asie. Des études très sérieuses démontrent en effet que ces virus apparaissent à des endroits très denses en termes de faune et de flore, mais ils apparaissent surtout là où cette faune et cette flore sont victimes du braconnage, de la déforestation. C’est clairement la destruction du milieu naturel qui accélère la transmission des microbes à l’espèce humaine. On en verra certainement d’autres.

Entre autres projets, vous publiez très prochainement une BD qui aborde l’extinction des espèces. Le constat est à ce point dramatique ?

La situation n’est pas bonne. En parlant d’extinction on pense au mammouth, au Dodo mais moins aux espèces moins flamboyantes comme le perce-oreille géant de Sainte-Hélène. Qui connaît ? Et il y en a bien d’autres, des insectes, des araignées, tous ces animaux que l’on fait disparaître sans s’en rendre compte. En 30 ans, la moitié des insectes a disparu de la surface du globe. Je ne parle pas des espèces d’insectes mais de la quantité d’espèces qui a tout simplement disparu dans les campagnes, idem pour la plupart des oiseaux. Et là, on commence à voir que tout s’accélère. D’un point de vue de la santé de l’environnement dont notre santé dépend aussi, c’est clair, la situation n’est pas bonne.

Comme vos personnages dans "l’Éveil" peut-on encore être optimiste ?

Mes personnages font ce même constat, dramatique, mais il y a du positif ! Beaucoup de gens agissent pour la protection de l’environnement. Ils sont de plus en plus nombreux. Que ce soit au niveau local, pour protéger un petit bois menacé par une opération immobilière, ou au niveau mondial, avec la création de parcs maritimes géants. L’intérêt est grandissant autour de ces problématiques. J’ai donné des conférences, sur l’Aubrac notamment, et les gens sont venus. Une salle pleine pour parler de biodiversité… Tout ça démontre que le grand public a pris conscience des enjeux et se rend compte que tout ça n’était finalement pas une simple histoire "d’amoureux de la nature". Et le Covid a encore appuyé sur le bouton !

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