Mort de Morgan Keane : l'interdiction de chasser le mercredi et le dimanche déjà aux oubliettes ?

  • Toujours pas de jour non chassé prévu pour l'instant en France.
    Toujours pas de jour non chassé prévu pour l'instant en France. archives CP
Publié le , mis à jour

Les propositions de la mission d'information du Sénat sur la sécurité de la chasse doivent être dévoilées au mois de septembre. Elles ne satisfont pas pour l'instant l'association "Un jour un chasseur", créée après la mort du jeune Aveyronnais tué dans un accident de chasse. Mais elle a décidé la Cour des comptes à lancer une enquête sur le financement public des fédérations de chasse.


 

L'association "Un jour un chasseur" a vu le jour sur Facebook le 16 décembre 2020, exactement deux semaines après la mort de Morgan Keane, un jeune de 25 ans d'origine aveyronnaise tué lors d'un accident de chasse dans le Lot par un chasseur de Montbazens. Un peu plus d'un an plus tard, le 19 février 2022, un autre jeune aveyronnaise, Mélodie Cauffet, elle aussi 25 ans, subissait le même sort dans le Cantal, tuée par une balle perdue tirée par une jeune chasseuse de 17 ans.

Sous l'impulsion de l'association, le Sénat a lancé depuis décembre 2021 une mission d'information afin de formuler des propositions sur la sécurité de la chasse. Ces propositions doivent être révélées dans environ deux mois, au mois de septembre 2022, mais selon Public Sénat, les principales demandes de l'association "Un jour un chasseur", comme l'interdiction des armes de chasse les plus puissantes, devraient rester lettre morte. "Les chasseurs pourront donc continuer à chasser avec des armes létales à 5 km", déplore l'association sur son site Facebook. Il en va de même pour l'interdiction de chasser le mercredi et le dimanche, principale revendication de l'association lotoise. La raison invoquée par le sénateur LR Patrick Chaize, le rapporteur de cette mission ? "75 % de la forêt française appartient à des privés. Et c’est là toute la difficulté parce que les chasseurs sont souvent sur des espaces privés qui leur appartiennent […] On ne peut rien interdire sur des espaces privés, les chasseurs sont chez eux, ils font ce qu’ils veulent", dit-il, cité par Public Sénat. "Ce sont des espaces privés, et alors ? La loi elle s’applique partout", rétorque son collègue écologiste Damien Salmon, lui aussi membre de la mission. Pour "Un jour un chasseur", qui regrette que la France soit encore l'un des rares pays européens qui n'ait pas de jour non chassé, Patrick Chaize "oublie de préciser que 75% des forêts ne sont pas la propriété des chasseurs. Dans les ACCA (Assocations communales de chasse agréées, qui représentent selon l'association 1/3 du territoire français), nos propriétés privées, considérées d’office comme des terrains de chasse, sont comprises dans ces 75%".

Seuls points de satisfaction pour l'association, le renforcement de la réglementation existante avec inscription des règles de sécurité dans les Schémas départementaux de gestion de la chasse (SDGC), un permis de chasse plus exigeant et une formation continue pour les chasseurs.

Une enquête sur le financement public des fédérations de chasse en 2023

Seule victoire de l'association : la Cour des comptes a retenu sa proposition d’enquête sur les "dizaines de millions d'euros" d'argent public destiné aux fédérations de chasseurs et de l'usage qu'elles en font. "Un jour un chasseur" avait formulé cette proposition via la plateforme citoyenne de l'institution. "En mai dernier, nous avions demandé à la Cour des comptes d’enquêter sur les financements nationaux, régionaux, départementaux et communaux destinés à la chasse, qui représentent des sommes conséquentes, et d’étudier également des alternatives, qui pourraient éviter à l'État plusieurs dizaines de millions d'euros de dépenses inutiles", fait savoir l'association. La Cour des comptes, relevant que le dernier contrôle de la Fédération nationale des chasseurs remontait à 2013 et qu'il n'y ait auxune "vision globale du montant des subventions publiques versées aux fédérations", publiera donc un rapport sur le sujet "au cours de l'année 2023".

Un nouvel accident de chasse passé sous silence durant près de six mois

Dans ce contexte de tentative d'encadrer mieu la pratique de la chasse, Public Sénat a révélé cette semaine un nouvel accident de chasse passé sous silence depuis près de six mois. Aloyse Boehler, un chasseur de 64 ans, a été tué le 28 janvier 2022 par un de ses collègues lors d'une partie de chasse en Moselle. Dans un premier temps, les secours parlent d'un infarctus à sa famille, mais c'est bien une balle dans le cou qui est la cause de son décès

Sa famille a choisi aujourd'hui de parler. "L’enquêteur nous a dit qu’il ne fallait pas l’ébruiter, ne rien dire, donc ça nous a fait peur", raconte par exemple Anne Boehler, la fille de la victime. A ce jour, les conclusions de l'enquête ne sont pas rendues, tout comme l'expertise balistique. "Que ce soit volontaire ou non, il y a un mort, ce n’est pas digne de l’enjeu et de l’homicide qui a eu lieu. Plus on attend, plus les preuves sont susceptibles de disparaître, commente Me Benoît Coussy, l'avocat de la famille. Dans l’affaire Keane, on avait eu le résultat de l’expertise en moins de deux mois". 

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