Rodez : l'art tout en transparence de Roselyne Blanc-Bessière

  • L’artiste puise son inspiration dans la matière.  Ses diverses réalisations sont issues de cette approche de la nature et des formes abstraites en général.
    L’artiste puise son inspiration dans la matière. Ses diverses réalisations sont issues de cette approche de la nature et des formes abstraites en général. Eric Guillot
  • L’artiste puise son inspiration dans la matière.  Ses diverses réalisations sont issues de cette approche de la nature et des formes abstraites en général.
    L’artiste puise son inspiration dans la matière. Ses diverses réalisations sont issues de cette approche de la nature et des formes abstraites en général. Eric Guillot
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Eric Guillot

L’artiste verrier accueille dans son atelier-galerie les aquarelles de Gérard Fournier, jusqu’au 31 décembre.

C’est au 5, rue de l’Embergue, à Rodez, que Roselyne Blanc-Bessière a installé son atelier avec un four de fusing. Surmontée d’un mécanisme de vérins hydrauliques, la cloche qui se rabat sur la sôle (partie horizontale sur laquelle sont posés les produits pour la cuisson) est constituée de briques réfractaires. L’artiste rajoute une plaque de lave sur la sôle, un matériau qui s’avère idéal pour ce genre de travail. Elle utilise ensuite un démoulant, le kaolin (matière destinée à fabriquer de la porcelaine) et de l’alumine, voire du plâtre, ce qui se nomme en terme technique un séparateur. Ainsi, après la cuisson, le verre posé sur la plaque d’enfournement doit pouvoir se démouler sans risque d’adhérer au support. Par ailleurs, explique Roselyne « Certaines plaques de laves sont vendues, notamment en Auvergne, dont des professionnels fabriquent des crédences ou des tables pour des cuisines. »


Mais juste avant la cuisson, et une fois la préparation du four terminée qui nécessite au minimum trois semaines, Roselyne prend en photos ses réalisations, en tenant compte de leurs emplacements sur la sôle, puisque la température n’est pas toujours homogène. Ainsi, avec des écarts de 10°, et en fonction de la température, le résultat provoque des déformations du verre, plus ou moins prononcées, qui se découvrent après la cuisson. L’artiste procède parfois à une dévitrification de ses œuvres. Pour cela, elle maintient la température du four entre 750 et 800° pendant un long palier, afin d’obtenir une structure vitreuse, généralement pour faire apparaître un côté opalescent au cœur de la pièce.


En règle générale, qu’il s’agisse d’une réduction de températures ou d’une fusion, les fluctuations thermiques offrent des résultats opposés : en dessous d’une certaine chaleur, les matériaux sont vitreux, au-dessus, ils deviennent liquides. Mais ici, des superpositions de plaques de verre vont se ramollir au cours de la cuisson, les couleurs vont apparaître plus ou moins vives, comme le noir, le vert, le pourpre ou encore le blanc. Malgré ce matériau particulièrement exigeant, Roselyne Blanc-Bessière maîtrise parfaitement la technique et les effets tant convoités sont toujours au rendez-vous. « Seules les erreurs amènent des expériences et un certain renouvellement » s’amuse-t-elle. La patience est donc de mise !

Une enfant de Mai 68 !

Avec un parcours atypique, Roselyne Blanc-Bessière est une enfant de Mai 68 ! Elle a seulement accompagné deux de ses amies au lycée public de Rodez, le jour de l’examen du Bac, préférant, quant à elle, voler de ses propres ailes ! Après avoir occupé quelque temps un poste de « pionne », elle part travailler dans une usine à Limoges et prend des cours du soir en art déco ; puis dans la foulée intègre, à Paris, une école de céramique. À la suite du décès tragique de son frère survenu à l’âge de 22 ans, d’un accident de moto, la jeune femme revient dans sa ville natale et poursuit ses travaux de céramiste durant une dizaine d’années. Et c’est tout à fait par hasard, qu’elle réalise une cuisson de verre à 800 degrés. Mais un jour son programmateur n’a plus fonctionné «tout s’est écroulé, tout était fondu sur la plaque du four », note-t-elle. Pour autant ces objets aplatis furent une révélation. Cet épisode a provoqué chez la future verrière une forte émotion et un effet catalyseur.

Ce jour de printemps lui aura révélé sa destinée professionnelle. Cerise sur le gâteau : comme elle travaillait déjà des décors sur porcelaine «à petit feu» (des émaux à oxydes métalliques) et maîtrisant une palette de couleurs qui fonctionnait bien avec le verre, ceci lui facilita la tâche dans ses nouvelles recherches artistiques. Quelquefois, Roselyne Blanc-Bessière se sert d’une partie des pièces, déjà cuites et dévitrifiées une première fois, La dévitrification est une transformation physique du verre. Dès lors, ce dernier devient translucide. Ces parties dévitrifiées sont posées ensuite sur des verres transparents. « Quand on dévitrifie on crée un début de cristallisation qui offre un résultat étonnant, ne sachant pas s’il s’agit réellement du verre », explique à juste titre l’artiste qui puise son inspiration dans la matière. Ce sont des œuvres sensibles qui apparaissent ensuite sous les regards attentifs.


Ses diverses réalisations sont issues de cette approche de la nature et des formes abstraites en général. Les émotions et la vision de certains paysages qui, consciemment ou inconsciemment façonnent son travail, se reflètent inéluctablement dans ses œuvres. L’alchimie devient alors effective grâce à la sensibilité qui s’établit entre la créatrice et ses hôtes. À l’image d’un Nu descendant un escalier de Marcel Duchamp, les dernières recherches de Roselyne Blanc-Bessière se portent sur la manière de jouer avec la transparence du verre et son côté 3D : « Je découpe des bandes de verre de deux ou trois centimètres de large sur des longueurs de 30 à 60 centimètres et plus selon le format de mon tableau ou de ma sculpture. À l’aide d’oxydes métalliques, de poudre de verre je crée des signes sur celles-ci qui sont posées les unes à côté des autres sur ma table à dessin. Quand je suis satisfaite de mon graphisme je dispose les lames de verre dans le four en les faisant se chevaucher. Le résultat après la cuisson offre un panneau en relief dont le dessin apparaît ou disparaît presque en fonction du déplacement de la personne qui le regarde. Ce matériau est à la fois solide, dur et fragile et ses contraintes techniques sont nombreuses. Pour moi, il a une force d’évocation quasi magique : ses possibilités de transformations sont infinies. On peut rester des heures devant une œuvre en verre et la voir évoluer à chaque moment de la journée. » En parcourant sa galerie, le visiteur est séduit par le large éventail des créations exposées. En fonction de la lumière, tels des talismans, les nuances de ses œuvres uniques se découvrent en prismes étincelants qui oscillent dans une dominance verdoyante ou bleutée. Du plus bel effet, qui n’est pas sans rappeler ce magnifique vers d’André Breton : «du vase en cristal de bohème».

Des « affinités subjectives »

Dans cette démarche artistique sans cesse renouvelée, Roselyne Blanc-Bessière a le plaisir d’accueillir dans sa galerie, les aquarelles de Gérard Fournier. Ces « haïkus picturaux » traduisent également un aboutissement d’un lyrisme accompli. « Je ressens cette exposition comme un air de sérénité et de plénitude », déclare la propriétaire des lieux. Un espace qui se découvre comme un havre de paix, assurément. D’autant que si les aquarelles du maître sont ainsi nommées « c’est parce qu’elles sont faites dans le même état d’esprit que ces poèmes japonais extrêmement brefs qui célèbrent l’évanescence des choses et les sensations qu’elles suscitent… », précise Gérard Fournier avant de conclure : « Espace, lumière, geste, composer avec le vide suffisent en ce moment à mon expression picturale. »

Visible jusqu’au 31 décembre, cette exposition est à ne manquer sous aucun prétexte.
 

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