Devenu un "vieillard libidineux", l'ancien professeur abusait de sa petite fille

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  • Me Bruce Flavier, du barreau de l'Aveyron, a eu la difficile tâche de défendre le prévenu.
    Me Bruce Flavier, du barreau de l'Aveyron, a eu la difficile tâche de défendre le prévenu. Centre Presse - C.C.
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Prévenu d'agressions sexuelles sur mineure, le sexagénaire au comportement particulièrement sordide a été condamné par le tribunal judiciaire de l'Aveyron à quatre ans de prison dont 30 mois de sursis probatoire. 

Quoi de plus normal pour une fillette de vouloir s'asseoir sur les genoux de son grand-père pour partager un moment de complicité ? Pour commune qu'elle soit, la manœuvre éveillera pourtant chez le papy un comportement des plus douteux:  les câlins prendront assez rapidement une tournure moins pateline de la part de cet homme qui se qualifiera lui-même, à l'heure de répondre de ses actes, de "vieillard libidineux".  La fillette a 11 ans, il en a 76 et durant deux ans, il abusera d'elle par des agressions sexuelles récurrentes, à chaque fois qu'elle est confiée par ses parents, à la grand-mère et au compagnon de celle-ci. C'est ce dernier qui était jugé mercredi en chambre correctionnelle du tribunal judiciaire de Rodez.

Sous la présidence de Marc Gambaraza, l'audience résonnera de la longue liste des faits reprochés au sexagénaire. Jusqu'à la nausée. Attouchements, caresses appuyées voire plus sur les parties génitales de la jeune victime, priée à son tour de caresser le sexe du grand-père qui se libère sur la cuisse de l'enfant... On en passe, la liste est longue. À l'écoute du déroulé de ses actes, de janvier 2020 à mai 2021, le prévenu est fébrile, tremble, saisit le pupitre des deux mains. Comment en est-il arrivé là ? Il aime se raconter en bon professeur de français qu'il fut 42 ans durant, dans des établissements secondaires ruthénois. Il se veut didactique, il n'est que théâtral, bafouillant parfois avant de se reprendre pour "assumer". Il reconnaît les faits par un "oui" tonitruant à chaque énoncé.

"Je pensais bien faire pédagogiquement" 

Explications ? " Ma petite fille, comme beaucoup d'enfants de son âge, me posait beaucoup de questions... Comment lui répondre quand ces questions deviennent sensibles et me laissent pantois. Je n'ai pas trop su..."  Le président le coupe dans son plaidoyer: "Vous n'êtes pas ici pour vos réponses mais pour vos actes". En fait, le papy avait pris le parti de montrer les choses, ne sachant trouver les mots. "Je pensais bien faire pédagogiquement" dit-il quand il "proposait" à la fillette de lui montrer ce qu'étaient des pénétrations digitales, suscitant chez elle, qui les refusait, "la peur d'être enceinte"

Dans ce contexte délétère, la jeune victime n'osera se rebiffer. Elle glisse vers l'anorexie, ses résultats scolaires sombrent. Elle en parle à une copine du collège qui lui conseille de faire une vidéo à l'insu du papy. Elle la fera. La montrera à sa tante pour ne pas effrayer ses parents. La grand-mère, au courant de rien (les faits se produisaient à l'abri de tout regard) est informée, elle est abasourdie,  chasse son compagnon de la maison, l'affaire devient enfin judiciaire. Lui, sera tenté par le suicide, le whisky dont il fait une consommation mal raisonnée, lui permettra, si l'on peut dire, de garder la tête haute pour affronter la réalité. 

"Entre elle et moi, la tentation érotique"

Il reconnaît tout, sauf les pénétrations digitales et les bisous sur la bouche. Il se dit confiant de sa responsabilité d'adulte, parle d'un piège "dans lequel on s'était enfermés" :  il dit "on" quand il évoque son comportement envers la fillette comme si avec elle ils formaient un couple. Cette étrange vision des choses n'échappera pas au tribunal et aux parties civiles. Il poursuit: "Je me suis senti prisonnier d'une addiction... Il s'agit d'une démission momentanée par rapport à mes responsabilités, à mon autorité morale sur ma petite fille". Et puis: "Il y avait entre elle et moi, une tentation érotique, de part et d'autre"

Les psychologues pointent chez le prévenu un déni partiel des faits, des troubles de la sexualité, un narcissisme, une excitation pédophilique. L'ancien prof, pourtant, n'avait jamais eu de tels comportements quand il était au contact de ses élèves, l'enquête le démontrera. C'est avec sa petite-fille que tout a basculé dans le plus sordide des scénarios.  Il est devenu "un prédateur physique, sexuel et psychologique", lance Me Chasson du barreau de Toulouse, conseil des parties civiles (la victime et ses parents). Elle préfère parler du calvaire de la fillette, du traumatisme que seule la justice parviendrait à atténuer. 

Manipulateur narcissique

La procureure de la république, Emilie Passier, assure que le dossier ne laisse pas de place au doute, en reprenant les faits. Relève chez le prévenu "un comportement déterminé, insistant pour obtenir ce qu'il voulait... Ses justifications des passages à l'acte sont insupportables, c'est un manipulateur narcissique qui agit dans son seul intérêt et ce qui l'inquiète surtout c'est d'être seul aujourd'hui, toute la famille faisant bloc autour de la victime". Émilie Passier requiert quatre ans de prison assortis d'un sursis probatoire d'un an  avec obligation de soins et interdiction de voir sa victime et tout autre mineur. 

Dure tâche, pour Me Bruce Flavier, du barreau de l'Aveyron, de défendre l'indéfendable, "ces faits extrêmement graves, ce comportement inacceptable". Et de louer "le courage de la victime de dénoncer ces faits auxquels il n'a pas su mettre un terme". Son client est aujourd'hui âgé de 79 ans, reconnaît qu'il a "tout gâché", est "hanté par cette affaire tous les jours". Et l'avocat de poursuivre: "La punition, il la vit au quotidien... Sanctionner, est-ce détruire?", lance-t-il avant de plaider pour "une peine équilibrée, aménageable, dénuée de vengeance. Une peine humaine"

Au terme d'une longue délibération, le tribunal condamnera le presque octogénaire à quatre ans de prison assorti d'un sursis probatoire de 30 mois (reste donc 18 mois de prison ferme) courant sur trois ans et l'obligeant à des soins et à ne pas rentrer en relation avec sa victime et ses parents et d'approcher tout enfant mineur. 

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