INTERVIEW. "Ces années au « 36 », elles resteront à jamais gravées", confie Philippe Dussaix, nouveau patron de la police en Aveyron

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  • Philippe Dussaix, 59 ans, nouveau directeur départemental de la sécurité publique. Philippe Dussaix, 59 ans, nouveau directeur départemental de la sécurité publique.
    Philippe Dussaix, 59 ans, nouveau directeur départemental de la sécurité publique. Centre Presse Aveyron - Mathieu Roualdès
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Propos recueillis par Mathieu Roualdès

Nouveau patron des 250 effectifs de police du département depuis juin, le commissaire se confie sur son nouveau rôle, après une carrière passée en grande partie dans la police judiciaire et au célèbre 36, quai des Orfèvres.

Vous avez pris vos fonctions de directeur départemental de la sécurité publique lors du mois de juin, en provenance de la police judiciaire de Toulon. Ce nouveau rôle vous anime-t-il ?

J’ai toujours été un passionné. Depuis mon plus jeune âge, je veux faire ce métier et j’ai tout fait pour. Cette passion, elle ne m’a jamais quittée et elle est toujours intacte du haut de mes 59 ans. Ce poste de directeur départemental de la sécurité, je l’assimile à un médecin généraliste de la police. Et je le prends comme un honneur après de nombreuses années passées dans l’investigation. Si je suis venu ici, c’est par choix. On ne m’a rien imposé.

Avez-vous pu définir une feuille de route pour vos hommes ?

Je ne connaissais absolument pas l’Aveyron. Mais j’aime son esprit de terroir. Je suis fils d’un éleveur en Auvergne et j’ai comme l’impression de revenir à mes racines. Ce que j’ai dit à mes hommes, c’est qu’ils vivent ici, qu’ils sont Aveyronnais pour la grande majorité, attachés au territoire et que c’est en équipe que nous devons rendre au mieux notre service à la population. Il y a parfois ici le sentiment d’être oublié, d’être regardé de loin, mais ce n’est pas parce qu’il y a moins de délinquance qu’ailleurs, que les équipes réalisent du mauvais travail. Tout est question de curseur. On doit mettre autant d’envie à résoudre une série de cambriolages que des enquêteurs d’autres circonscriptions mettent à poursuivre un tueur en série.

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La question des moyens dans une circonscription comme l’Aveyron est également souvent au centre des questions. Récemment, plusieurs agents de police du commissariat de Rodez ont fait état de leur mal-être, via des voix syndicales. Cette gestion humaine sera-t-elle l’une de vos priorités ?

On m’a bien entendu parlé des antécédents. Mais je préfère regarder vers l’avenir et voir ce que l’on peut réaliser ensemble. Avant d’évoquer les moyens, il faut parler d’organisation. C’est sur ce point qu’on peut améliorer les choses, travailler plus efficacement. Car nous ne sommes pas moins bien dotés qu’ailleurs en termes d’effectifs. Et l’on ne peut pas se contenter de dire qu’il n’y pas de délinquance ici et, donc, ne rien faire. Rien ne doit être sous-estimé, de la plus petite délinquance à la plus grande. Par exemple, lors des récents événements en banlieues (émeutes à la suite de la mort de Nahel, NDLR), on a dit que l’Aveyron n’était pas touché. Mais nous avons eu des problèmes à Millau, comme à Rodez : ici aussi, on a retrouvé des cocktails molotov et des mortiers prêts à être utilisés.

Avec vos quatorze années au sein du 36, quai des Orfèvres, vous arrivez avec l’étiquette d’un « grand flic ». Cela peut-il permettre de relancer une dynamique ?

« Grand flic » ? Non, n’exagérons pas ! J’ai simplement fait mon boulot, celui pour lequel je vibrais. Ces années au « 36 », elles resteront à jamais gravées. Si on me proposait de les refaire, je signerai tout de suite. J’étais comme un môme. Et j’ai connu de grands patrons. Eux, c’étaient des grands flics. Je citerai par exemple Martine Monteil, avec laquelle on a traqué Guy Georges durant des années, ou encore Frédéric Péchenard. Ils m’ont transmis une passion, une envie. Et c’est que je veux reproduire ici avec mes effectifs. Car avant toute chose, il faut se faire plaisir dans son travail. C’est comme cela que chacun y gagne. Et avant tout les victimes à qui on doit des réponses.

Lors de votre récent passage à la PJ de Toulon, vous avez beaucoup travaillé sur le narcobanditisme. En Aveyron, la justice alerte depuis plusieurs mois sur des trafics de stupéfiants qui prennent de l’ampleur. Aurez-vous un regard tout particulier sur cette délinquance ?

Derrière le trafic de stupéfiants, il y a toute une délinquance générée, du cambriolage au règlement de comptes. Maintenant, c’est facile de dire qu’il faut arrêter tous les trafiquants. Moi, j’ai surtout envie de dire aux consommateurs, à cette bande d’amis qui prend un rail de coke le samedi soir pour que la fête soit plus belle, à Monsieur et Madame Tout-le-monde qui fume un joint, qu’ils contribuent à quelque chose de dangereux. Ils doivent avoir conscience des répercussions, d’où va leur argent et des drames qu’il peut générer. Puis, on l’a vu récemment avec une actualité particulièrement médiatique mais en consommant, on peut détruire sa vie… et celle des autres.

Entre 2017 et 2020, vous avez rangé l’uniforme pour devenir « le Monsieur sécurité » de Laurent Wauquiez, président de la Région Auvergne-Rhône-Alpes. Pourquoi ce choix et ne craigniez-vous pas qu’il vous marque politiquement ?

Je n’ai jamais été encarté politiquement et j’ai travaillé tout autant au service de gouvernements de gauche que de droite. Surtout, que ce soit Laurent Wauquiez ou un autre, j’aurais accepté ce poste. Je n’étais pas dans une structure politique, mais administrative. Cela me permettait de me rapprocher de mon Auvergne natale et tout travail qui permet d’améliorer la sécurité me plaît. Durant ces années, j’ai pu améliorer des choses comme par exemple des outils pour prévenir la délinquance dans les gares. Je ne regrette pas du tout ce choix et ça m’a enrichi. Et si certains en doute, je travaillerai ici avec tous les élus, de tous les bords, sans exception. Ce sont eux les premiers confrontés aux problématiques de sécurité et receptacles des doléances des citoyens.

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