Quand Taylor Swift pousse les maisons de disques à limiter les réenregistrements d’albums

  • Taylor Swift a déjà réenregistré quatre de ses six disques, à savoir "Fearless (Taylor's Version)", "Red (Taylor's Version)", "Speak Now (Taylor's Version)" et "1989 (Taylor's Version)".
    Taylor Swift a déjà réenregistré quatre de ses six disques, à savoir "Fearless (Taylor's Version)", "Red (Taylor's Version)", "Speak Now (Taylor's Version)" et "1989 (Taylor's Version)". VALERIE MACON / AFP
Publié le
ETX Daily Up

(ETX Daily Up) - Taylor Swift semble mettre le monde à ses pieds grâce à sa tournée Eras Tour et au documentaire d’AMC qui lui est dédié. Si les économistes se réjouissent de ce qu’ils appellent l’"effet Taylor Swift", les maisons de disques s’inquiètent que d’autres artistes suivent l’exemple de la chanteuse et réenregistrent leurs précédents opus pour gagner leur indépendance. Explications.


L’heure est à la consécration pour Taylor Swift. La partie nord-américaine de sa tournée mondiale devrait rapporter, à elle seule, 2,2 milliards de dollars, selon une étude QuestionPro relayée par CNN. Et il ne s’agit que d’une estimation se basant sur les ventes primaires de tickets en Amérique du Nord. De plus, le long-métrage consacré à cet événement, "The Eras Tour Film", projeté depuis le 13 octobre dans des milliers salles de cinéma d’une centaine de pays, a déjà engendré plus de 200 millions de dollars de recettes, d’après CNBC. Il pourrait devenir, d’ici la fin de la tournée mondiale de 146 dates de la star, en novembre 2024, l’un des plus gros succès de l'Histoire pour un film-concerts.

Mais l’influence de Taylor Swift ne se fait pas seulement ressentir sur l’économie. Elle est devenue experte dans l’art de susciter l’engouement autour de sa musique, qu’elle soit récente ou plus ancienne. En effet, la chanteuse a annoncé en 2019 son intention de réenregistrer ses six premiers albums pour obtenir son indépendance artistique. Elle a pris cette décision après que le patron de son ancien label, Scott Borchetta, ait vendu ses masters (enregistrements originaux) à Scooter Braun, un producteur et manager américain. Ce dernier a lui-même cédé les droits des enregistrements de ces opus à une société d’investissement, sans que Taylor Swift n’ait eu son mot à dire.

Une tendance qui inquiète les majors

À l’heure actuelle, Taylor Swift a déjà réenregistré quatre de ses six disques, à savoir "Fearless (Taylor's Version)", "Red (Taylor's Version)", "Speak Now (Taylor's Version)" et "1989 (Taylor's Version)". Ces nouvelles versions ont connu un grand succès commercial. "Red (Taylor's Version)" a même battu le record de Spotify de l’album d’une artiste féminine le plus écouté en une journée, suite à sa sortie, le 12 novembre 2021, tandis que le nouveau "1989" se vend même mieux que l’original, selon des chiffres Luminate révélés par le Financial Times.

Si cette réussite est une belle revanche pour la chanteuse, elle fait craindre aux majors du disque que d’autres artistes retournent en studio pour récupérer les droits sur leurs créations. Universal Music Group, Sony Music Entertainment et Warner Music Group auraient récemment revu les contrats de leurs nouvelles recrues, selon les informations de Billboard. Certains leur auraient même demandé d’attendre dix, quinze voire même trente ans pour réenregistrer leurs chansons après avoir quitté leur label.

Il s’agit de délais sans précédent. En effet, les maisons de disques exigeaient traditionnellement que leurs artistes patientent cinq à sept ans après la sortie de leur album, ou deux ans après la fin de leur contrat, pour créer de nouvelles versions de leurs opus. "Maintenant, à cause de toute cette histoire avec Taylor Swift, nous devons négocier encore plus. C'est terrible. Nous voyons beaucoup de 'perpétuité'", a déclaré Dina LaPolt, une avocate spécialisée dans le domaine de la musique, à Billboard. Une stratégie payante pour Taylor Swift

Un porte-parole d’Universal Music Group a nié le fait que ce changement de politique soit en lien avec la chanteuse américaine. Le Wall Street Journal avait déjà révélé en 2021 que la maison de disques avait revu ses contrats d’enregistrement pour essayer de se protéger au cas où d’autres artistes voudraient ultérieurement réenregistrer leur discographie.

Car cette stratégie peut s’avérer très lucrative pour celles et ceux qui ont fait ce choix. La plus grosse partie de la fortune de Taylor Swift, que Bloomberg estime à plus d’un milliard de dollars, repose sur son catalogue musical. Les titres qu’elle a sortis depuis 2019 lui auraient rapporté quelque 400 millions de dollars, ce qui montre que son pari d’enregistrer de nouvelles versions de six premiers disques s’est révélé gagnant.

Cependant, rares sont les artistes à suivre son exemple, aussi inspirant et lucratif soit-il. En 2018, la chanteuse américaine JoJo a réenregistré ses deux premiers albums, "JoJo" et "The High Road", pour tirer un trait sur le conflit qui l’a longtemps opposé à l’un de ses anciens labels, Blackground Records. Plus récemment, le groupe de rock alternatif Switchfoot est, lui aussi, retourné en studio pour imaginer une nouvelle version de son quatrième opus, "The Beautiful Letdown".Mais, contrairement à Taylor Swift et à JoJo, ce disque n’était pas une tentative de reprendre le contrôle de son catalogue musical, mais plutôt un cadeau à leurs fans. "Nous parlions du disque et nous nous sommes dit : "Et si nous faisions cet album, mais cette fois-ci, au lieu de le faire pour [les dirigeants de Sony], nous l'enregistrerions pour tous ceux qui nous ont soutenus au cours des 23 dernières années, pour tous ceux qui ont chanté avec nous sur ces chansons", a expliqué en septembre l’un des membres du groupe, Jon Foreman, à Billboard.

Voir les commentaires
Réagir
Vous avez droit à 3 commentaires par jour. Pour contribuer en illimité, abonnez vous. S'abonner

Souhaitez-vous recevoir une notification lors de la réponse d’un(e) internaute à votre commentaire ?