Le Ruthénois Édouard Liron, spécialiste design chez Artcurial, à Paris : "Je suis un défricheur d’objets"

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  • Chez Artcurial depuis 2022, le Ruthénois Édouard Liron poursuit une carrière prometteuse.
    Chez Artcurial depuis 2022, le Ruthénois Édouard Liron poursuit une carrière prometteuse. Emmanuel Pons
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A Paris, Emmanuel Pons

Diplômé de droit et d’histoire de l’art, le Ruthénois Édouard Liron est spécialisé dans le design français post 1950 au sein de la prestigieuse maison de vente aux enchères Artcurial, basée à Paris.

Édouard Liron est curieux, par nature. "Petit, je fouillais à la recherche de fossiles, de pyrites dans les gorges de la Dourbie… Et quand j’étais ado, c’était la détection de métaux, dans les champs, surtout en Lozère, sur le causse Méjean." Une curiosité et un intérêt pour les objets anciens qu’il continue de cultiver, au quotidien, lui qui avoue être aussi passionné d’archéologie. "Je suis un défricheur d’objets", dit l’Aveyronnais, spécialiste design chez la prestigieuse maison de vente aux enchères Artcurial, basée à Paris.

Une vocation née donc assez tôt.

Histoire de l’art à l’école du Louvre

"Plus jeune, j’avais vu un reportage à la télé. Je voulais devenir commissaire-priseur."

Alors le jeune homme quitte son Aveyron natal – il a grandi entre Millau où il a été à l’école et Rodez où il était collégien à Saint-Jo et décroche son bac S au lycéen à François-d’Estaing – pour s’inscrire en fac de droit, à Toulouse. "J’allais pas mal sur les vide-greniers, les déballages, chez les bouquinistes."

Licence de droit privé en poche, il poursuit à Paris pour étudier l’histoire de l’art. Et retente le très sélectif concours de l’école du Louvre. "Je l’avais raté d’un point la première fois, à dix-huit ans." Et sa persévérance paye puisqu’il est admis, en septembre 2011.

Édouard Liron, dans les salons de la maison Artcurial, à Paris, où prennent place les expositions présentant les pièces proposées à la vente.
Édouard Liron, dans les salons de la maison Artcurial, à Paris, où prennent place les expositions présentant les pièces proposées à la vente. Emmanuel Pons.

Il participe alors à ces premiers travaux dirigés devant des œuvres (TDO), une expérience qui le marque. Et qui le forme. "On passe une heure et demie dans un musée, assis, avec un carnet, à un mètre, face à une œuvre. Ça permet d’exercer son œil, d’être au plus près de la texture, de la matière, de la lumière…"

Et il découvre aussi la vie parisienne. Et sa richesse culturelle.

Mais se concentre surtout sur ses cours. "C’est un enseignement très rigoureux, c’est très dense !, insiste-t-il. Pour l’examen annuel, on devait faire le commentaire de quatre clichés d’œuvres parmi cinq cents, dont une qu’on n’avait jamais étudiée. C’est un formidable exercice qui me sert encore aujourd’hui."

Un passage formateur rue de Seine

Après cinq années passées dans cette école renommée et tout juste diplômé, Édouard Liron fait un stage, rue de Seine – "la rue des galeries" – à Paris. Il passe ainsi chez Berthet-Aittouarès – "J’ai vu de très belles choses ! C’est une super formation" – avant de poursuivre, non loin de là, dans la galerie de design "Meubles et lumières" où il est finalement embauché. "Je chinais les objets pour eux. J’ai fait quelques jolis coups !, se souvient-il. Guilhem Faget et d’Alexandre Goult m’ont beaucoup appris." L’occasion aussi pour le jeune Aveyronnais de découvrir plusieurs salons, le PAD Paris, PAD Londres et le plus prestigieux, le Design Miami/Basel à Bâle, en Suisse. Il participe alors à la recherche de pièces d’exception, dans les salles des ventes, les foires professionnelles, les déballages ou encore en ligne. "Tout ça m’a bien formé", insiste-t-il.

Le bureau créé en 1951 par l’Italien Carlo Mollino a été vendu par Artcurial, en mars 2023, pour la somme de 590 000 € avec les frais. "On a quelquefois de belles surprises", souligne Édouard Liron.
Le bureau créé en 1951 par l’Italien Carlo Mollino a été vendu par Artcurial, en mars 2023, pour la somme de 590 000 € avec les frais. "On a quelquefois de belles surprises", souligne Édouard Liron. Reproduction L'Aveyronnais

Mais cette période faste prend fin avec l’arrivée de la pandémie de Covid et l’annulation de nombreux salons. Le Ruthénois décide alors de se lancer à son compte, dans l’achat-vente et dans le courtage, "via internet, sur Instagram". Il travaille aussi avec l’un de ses meilleurs amis, rencontré à l’école du Louvre, qui tient un magasin de vente de disques vinyles, aux puces de Saint-Ouen. Les vinyles, son autre passion (lire par ailleurs). Mais c’est grâce à une autre rencontre que sa carrière va prendre un nouveau tournant. Un ami, croisé chez "Meubles et lumières", qui est alors consultant chez Artcurial. "J’ai postulé et j’ai été pris en septembre 2022."

Spécialisé dans le design français post 1950

Au sein de cette belle maison de vente aux enchères, Édouard Liron est spécialisé dans le design français post 1950. "Je suis chargé d’identifier les objets qu’on me présente ou que j’ai dénichés, les valoriser, les expertiser. Notre parole fait foi, précise-t-il. Mon département organise aussi les ventes, qui doivent avoir une certaine cohérence." Les objets sont ainsi exposés dans les immenses – et magnifiques – salons du rond-point des Champs-Élysées. "Quatre cents mètres carrés d’exposition gratuite, ouverte au public, durant trois à quatre jours avant la vente, précise Édouard Liron. Et les pièces sont aussi présentées sur le site internet." Au rythme d’une douzaine de ventes par an pour un chiffre d’affaires de quinze à vingt millions d’euros pour le département Art Déco/Design.

Passionné de Vinyles

"J’ai découvert les disques vinyles grâce à mon beau-père Claude. J’avais une douzaine d’années. Il a formé mes goûts musicaux." Et c’est en arrivant à Toulouse, pour ses études supérieures, que le jeune Édouard commence à acheter et à collectionner les vinyles. "Aujourd’hui, j’en possède plus de sept cents !"

À bientôt trente-cinq ans, le Ruthénois poursuit une belle carrière à Paris. Mais il n’oublie pas d’où il vient, lui qui a d’ailleurs fait un passage par le musée Soulages de Rodez, aux côtés du conservateur en chef Benoît Decron, durant l’été 2014 alors qu’il était étudiant à l’école du Louvre. "Je garde un fort attachement à l’Aveyron. La nature me manque, les causses, les gorges du Tarn…" Et comme un hommage à ses origines, Édouard Liron portait, le jour de notre rencontre, la veste de mariage de son grand-père maternel, griffée "G. Verdier – Tailleur à Rodez". Il n’y a pas de hasard.

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