Les marchés financiers dans l'angoisse d'une vie sans la Fed

  • Le président de la Fed, Ben Bernanke, le 19 juin 2013 à Washington DC
    Le président de la Fed, Ben Bernanke, le 19 juin 2013 à Washington DC Getty Images/AFP - Alex Wong
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AFP

La perspective d'un retrait prochain par la banque centrale américaine, la Fed, de ses mesures exceptionnelles de soutien à l'économie a fait trembler jeudi les marchés financiers, de l'Asie aux Etats-Unis en passant par l'Europe où la chute a été particulièrement brutale.

Marchés actions, devises, or, titres de dettes souveraines, matières premières: aucun actif financier n'a été épargné par un mouvement de vente généralisé provoqué par des investisseurs inquiets, brusquement devenus rétifs à la prise de risque.

Habitués à vivre avec le soutien de la Réserve fédérale américaine, qui injecte tous les mois des milliards de dollars d'argent frais dans le système via des achats d'actifs, ils se résignent mal à l'idée qu'ils devront bientôt devoir marcher sans cette béquille.

Mercredi lors de sa réunion, la Réserve fédérale américaine (Fed) a certes indiqué qu'elle maintiendrait en l'état sa politique de soutien exceptionnel à la reprise économique aux Etats-Unis, mais son président Ben Bernanke a fait savoir qu'elle pourrait la ralentir d'ici à la fin de l'année.

Cette précision sur le calendrier a "surpris" les marchés, a expliqué Renaud Murail, gérant de Barclays Bourse.

En conséquence, "les actions (ont été) prises dans un mouvement agressif de vente à travers le monde", indique de son côté Ishaq Siddiqi, stratégiste chez ETX Capital.

Tokyo a perdu 1,74% à la clôture jeudi matin. Shanghai a fini en baisse de 2,77%, Hong Kong de 2,85%, également plombées par un mauvais indicateur en Chine.

La chute a été encore plus sévère en Europe où les places financières ont pratiquement toutes terminé en baisse de plus de 3%. Londres a frôlé ce seuil avec -2,98%, mais Paris l'a largement dépassé à -3,6%, ainsi que Madrid (-3,41%), Francfort (-3,28%) ou Milan (-3,09%). C'est en Turquie que la baisse a été la plus forte avec une chute de la bourse d'Istanbul de près de 7% jeudi.

A New York, Wall Street a suivi le mouvement, le Dow Jones enregistrant sa pire séance en sept mois (-2,34%).

Le mouvement de vente n'a pas épargné les titres de dette d'Etat, particulièrement en Europe. Les taux auxquels se financent les Etats, qui évoluent en sens inverse du prix et de la demande, sont nettement remontés des deux côtés de l'Atlantique, mais aussi dans les pays émergents et en Asie. Le taux espagnol sur dix ans est ainsi remonté à 4,857% contre 4,532% mercredi soir. Cela n'a toutefois pas empêché le Trésor espagnol d'emprunter plus de quatre milliards d'euros avec un taux légèrement en hausse sur dix ans par rapport à la précente émission de dette début juin.

Dans la foulée, l'or, pourtant valeur refuge, est tombée sous le seuil de 1.300 dollars l'once pour la première fois depuis près de trois ans.

La fin de l'argent facile procuré par la Fed éloigne encore davantage les craintes d'un regain de l'inflation dans les mois à venir, ce qui pèse sur les cours de l'or, également considéré comme une protection contre la hausse des prix, ont expliqué les analystes.

Les prix du pétrole ont eux aussi fortement baissé, le WTI, à New York, dégringolant de 2,84 dollars et le Brent, à Londres, de 3,97 dollars.

L'euro aussi était fragilisé, même s'il limitait ses pertes, cotant 1,3226 dollar vers 20H45 GMT contre 1,3297 mercredi soir.

Enfin, les devises des pays émergents, accusant le contre-coup des ventes massives d'actifs dans ces régions jugées plus risquées, ont souffert, à l'image de la roupie indienne qui a chuté jeudi à un nouveau plus bas face au dollar.

"La Fed donne le cap et les investisseurs perdent le nord", ont résumé jeudi les stratégistes du Crédit Mutuel CIC.

Dans ce mouvement d'inquiétude généralisé, les marchés "ont ignoré le point positif dans le plan de la Fed", soutient ainsi M. Siddiqi.

La Réserve fédérale table en effet sur une amélioration prochaine de la situation économique aux Etat-Unis, condition sine qua non à tout changement de politique monétaire.

Plutôt court-termistes, les marchés ne s'appuient pas encore sur les meilleures perspectives économiques également avancées par la Fed, ils anticipent avant tout le ralentissement puis l'arrêt des injections de liquidités massives, dont ils ont largement profité ces derniers temps.

Pourtant, "l'essentiel est bien là", souligne Pascal Plunet, gérant chez Barclays Bourse. "Une amélioration des conditions économiques devrait réjouir les investisseurs après cinq années de doute", assure-t-il.

Source : AFP

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