Pays-Bas: apprendre à cuisiner couscous et hamburgers avec des insectes

  • Un étudiant cuisine des sauterelles lors d'un cours à Sittard, le 24 octobre 2013
    Un étudiant cuisine des sauterelles lors d'un cours à Sittard, le 24 octobre 2013 AFP/Archives - Nicolas Delaunay
  • Des étudiants cuisinent des insectes lors d'un cours à Sittard, le 24 octobre 2013
    Des étudiants cuisinent des insectes lors d'un cours à Sittard, le 24 octobre 2013 AFP/Archives - Nicolas Delaunay
  • Un plat de couscous aux sauterelles et aux vers présenté lors d'un cours de cuisine à Sittard, le 24 octobre 2013 Un plat de couscous aux sauterelles et aux vers présenté lors d'un cours de cuisine à Sittard, le 24 octobre 2013
    Un plat de couscous aux sauterelles et aux vers présenté lors d'un cours de cuisine à Sittard, le 24 octobre 2013 AFP/Archives - Nicolas Delaunay
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AFP

"Voilà, on va faire revenir les sauterelles à la poêle puis on les ajoutera au couscous", explique Cécile à ses trois élèves d'un soir : à la recherche d'alternatives à la viande comme source de protéines, ces Néerlandais apprennent à cuisiner ce qui rebute encore de nombreux Européens.

A Sittard, dans le sud-est des Pays-Bas, la cuisine de Cécile grouille d'activité. Richard, 41 ans, Mariet, 53 ans et Seppo, 43 ans, s'affairent à réaliser le menu du jour : couscous, hamburger et baklava, tous agrémentés de vers de farine, sauterelles ou autres larves d'insectes. Coût de la leçon d'un soir : 50 euros par personne.

"Le but, c'est vraiment de trouver une alternative à la viande, pas forcément de la supprimer de mon alimentation, mais en tout cas de la réduire", explique Mariet. "C'est plus facile si quelqu'un vous l'apprend".

"Je veux vivre de manière saine, mais être végétarien, c'est un peu trop dur pour moi", renchérit Richard en souriant, précisant avoir découvert les mets à base d'insectes lors d'un voyage en Asie.

A l'heure où l'élevage industriel est confronté à des problèmes de pollution, les insectes, riches en protéines et pauvres en graisse, se profilent en effet comme une alternative sérieuse à la viande.

Selon l'université de Wageningen (est des Pays-Bas), il faut environ dix fois plus de nourriture pour produire un kilo de viande de boeuf que pour produire un kilo d'insectes.

"Mais il faut que ce soit bon!", nuance toutefois Seppo : "je ne vais certainement pas manger quelque chose de dégueulasse, même si je sais que c'est meilleur pour moi ou pour la planète".

Les insectes doivent lutter contre les mentalités en Europe, alors que leur consommation est monnaie courante dans de nombreux pays du monde, où environ deux milliards de personnes en mangent régulièrement.

Les Européens rechignent en effet à croquer sauterelles, larves et autres animaux à six pattes, fussent-ils secs, propres et dénués de toute maladie.

"Non, vraiment, je ne comprends pas pourquoi les gens ont un tel dégoût pour les insectes", soutient Seppo, tout en ajoutant les sauterelles au couscous : "franchement, entre un insecte et un fruit de mer comme une huître ou une moule, il n'y a pas la moindre hésitation..."

Pendant ce temps, Mariet malaxe un mélange de vers de farine et de viande hachée pour confectionner les hamburger alors que Richard fait dorer quelques sauterelles à la poêle, dans une marinade à base de sauce soja.

Lyophilisés, les insectes peuvent être conservés jusqu'à un an, selon Arno Snellens, fondateur de la société Insectable, qui collabore avec Cécile Lormans pour organiser les cours de cuisine et est également un grossiste en insectes.

"C'est inévitable, les insectes sont le futur, on ne peut pas continuer à produire de la viande en si grande quantité", affirme-t-il, précisant que son chiffre d'affaires est multiplié par deux tous les six mois environ.

"Les mentalités mettent du temps à changer"

La vente d'insectes reste encore marginale aux Pays-Bas par rapport à la viande, mais Marcel Dicke, entomologiste de l'université de Wageningen (est des Pays-Bas), un des premiers à avoir promu la consommation d'insectes dans son pays, assure que le changement est en marche.

Sortie d'un livre de cuisine, offre et demande accrues, les insectes s'engouffrent désormais dans une niche du marché.

"Il y a quinze ans, les gens demandaient : +quoi, des insectes, vraiment?+", raconte-t-il. "Aujourd'hui, les gens demandent : +ah oui, et où peut-on en trouver?+".

"Les mentalités mettent du temps à changer, certes, mais elle peuvent changer, et je pense que le fait que des gens veulent apprendre à cuisiner est représentatif de cette tendance".

Pour la société Meertens, dans le sud-est des Pays-Bas, les sauterelles pour la consommation humaine représentent 2 à 3% de la production totale, le reste de la production d'insectes étant destiné aux animaux.

Ce chiffre est certes réduit, mais il augmente sans cesse, assure la société, qui souligne en outre que la production pour les humains n'a commencé qu'en 2008.

Problème de taille pourtant : le prix, car la production est encore bien trop petite pour être aussi rentable que celle de la viande. Arno vend par exemple 30 grammes de sauterelles lyophilisées pour 12,50 euros, et 50 grammes de vers de farine lyophilisés pour 8,50 euros...

"Il y a plusieurs solutions pour convaincre les gens, et cela dépend de chacun : certains préfèrent ne pas voir qu'il y a des insectes dans ce qu'ils mangent, que les insectes aient été réduits en poudre dans une quiche par exemple, tandis que pour d'autres, c'est le contraire, ils préfèrent que l'insecte soit encore entier", souligne M. Dicke.

A Sittard, trois convertis se lèchent les babines...

"Un goût semblable aux noix, aux noisettes", assure Seppo après avoir mordu à pleines dents dans son hamburger. Richard soutient de son côté que "ça ne ressemble à rien que je connais, mais ça relève le goût, et c'est croustillant", avant de conclure : "il ne faut pas essayer de comparer cela à quelque chose d'autre, je dirais simplement que ça goûte l'insecte".

Source : AFP

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