Grèce: le nouveau ministre des Finances va devoir balayer devant sa porte

  • Le nouveau ministre des Finances grec Guikas Hardouvelis, le 10 juin 2014 à Athènes Le nouveau ministre des Finances grec Guikas Hardouvelis, le 10 juin 2014 à Athènes
    Le nouveau ministre des Finances grec Guikas Hardouvelis, le 10 juin 2014 à Athènes AFP - Louisa Gouliamaki
  • Des agents de nettoyage, et femmes de ménage licenciées du ministère des Finances grec s'opposent à la police, le 12 juin 2014
    Des agents de nettoyage, et femmes de ménage licenciées du ministère des Finances grec s'opposent à la police, le 12 juin 2014 AFP - Louisa Gouliamaki
  • Le campement des femmes de ménage licenciées devant le ministère des Finances grec, le 7 mai 2014
    Le campement des femmes de ménage licenciées devant le ministère des Finances grec, le 7 mai 2014 AFP/Archives - Louisa Gouliamaki
  • Une femme de ménage licenciée s'effondre après un affrontement avec la police devant le ministère à Athènes le 12 juin 2014
    Une femme de ménage licenciée s'effondre après un affrontement avec la police devant le ministère à Athènes le 12 juin 2014 AFP - Louisa Gouliamaki
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AFP

Le nouveau ministre grec des Finances n'a pas seulement hérité du dossier épineux de la dette, il doit aussi faire face à la présence embarrassante d'un bataillon de femmes de ménage licenciées qui campent dans les entrées de son ministère.

Depuis mi-mai, la scène est devenue familière dans cette artère vibrante du centre d'Athènes: sous les arcades d'un immeuble du ministère des Finances, une tente, des tables et parmi une forêt de banderoles, un slogan: "les femmes de ménage licenciées en lutte".

Le sort des 595 agents d'entretien mis en "disponibilité" pour cause de rigueur dans les services centraux et divisions des impôts de tout le pays est devenu une affaire délicate politiquement, socialement et juridiquement pour Athènes.

Et encore plus depuis que chaise roulante et béquilles sont apparues dans le décor: après de premières échauffourées la semaine dernière, les protestataires, souvent quinquagénaires, se sont de nouveau heurtées jeudi aux forces antiémeutes alors qu'elles manifestaient.

Visages aplatis contre des boucliers, une manifestante à terre souffle coupé, une autre prise à la gorge: les images ont tourné en boucle dans les médias, jusqu'à provoquer, vendredi, l'annonce de la suspension d'un policier filmé équipé d'un poing américain. Une enquête a également été ouverte par le ministère de l'Intérieur.

- Brèche juridique ? -

Pour Roula Psilias, 44 ans, les faits se résument à un coquard violet dissimulé derrière des lunettes de soleil et des bleus sur tout un bras: "je n'ai rien dit mon mari, il travaille en Angleterre, il s'inquièterait pour moi et les enfants" de 12 et 15 ans.

Employée dans un service des impôts d'Athènes, elle a appris comme ses collègues, en septembre 2013, qu'elle passait sous statut de "disponibilité", soit sans travail avec les trois-quarts de son salaire de 550 euros pendant huit mois.

La Grèce, sous assistance financière internationale, a mis depuis 2012 environ 20.000 fonctionnaires en disponibilité, pour un objectif de 25.000 d'ici fin 2014, conformément aux exigences de ses créanciers.

C'est à l'approche de l'expiration des huit mois, et d'un probable licenciement, que les femmes de ménage ont installé leur campement, après avoir manifesté tous les jours devant le ministère depuis septembre.

"Un automne, un hiver, un printemps, qui aurait cru qu'on serait encore là", soupire Georgia Oikonomou, 48 ans, qui touchait 600 euros à raison de quatre heures de ménage quotidiennes.

Le ministre lui, n'est plus le même: Guikas Hardouvelis, un économiste de banque formé aux Etats-Unis, a remplacé aux Finances Yannis Stournaras, qui devrait devenir le prochain gouverneur de la Banque centrale grecque.

- Un bivouac anti-austérité -

Le bivouac est devenu le lieu de ralliement de tout ce que la Grèce compte d'opposants à la politique d'austérité. Celle-ci ne fait plus descendre des milliers de gens dans les rues, comme ces dernières années, mais suscite toujours de nombreuses mobilisations catégorielles.

Les protestataires voudraient que la lutte des femmes de ménage ouvre une brèche juridique dans la mise en oeuvre des mesures de la troïka UE-BCE-FMI.

C'est en septembre que la Cour suprême se prononcera sur le fond sur la mise en disponibilité des femmes de ménage.

Jeudi, le ministère a été autorisé par la Cour suprême à ne pas les réembaucher provisoirement comme l'avait ordonné en mai un tribunal de première instance.

Ce dernier avait jugé leur limogeage et le recours à un prestataire privé pour faire le travail des femmes de ménage "contraire à l'intérêt public et lésant de façon disproportionnée les plaignants dans leur droit au travail et dans leur existence matérielle".

Dans un audit de l'économie grecque publié cette semaine, le FMI estime que des décisions de justice invalidant les mesures d'austérité risquent de faire déraper le budget grec.

Vendredi, le Conseil d'Etat grec a jugé anticonstitutionnelle une baisse des salaires des policiers, soldats, pompiers et personnels maritimes.

Cette juridiction, saisie de nombreux recours contre les mesures d'austérité, doit encore rendre plusieurs décisions importantes. Elle a récemment partiellement bloqué la privatisation de la société des eaux d'Athènes.

Au Portugal, autre pays européen sous assistance de l'UE et du FMI, le gouvernement a dû renoncer cette semaine à la dernière tranche d'aide de son plan de sauvetage, estimant ne pas être en mesure de trouver rapidement des mesures de rigueur pour compenser celles invalidées par la justice.

Source : AFP

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