Emouvoir sans choquer : le cinéma au service de la sécurité routière

  • Patrick Chesnais le 5 décembre 2013 à Paris
    Patrick Chesnais le 5 décembre 2013 à Paris AFP/Archives - Francois Guillot
Publié le , mis à jour
AFP

Moins de violence, plus d'émotion: pour continuer à toucher un public saturé d'images choc, la prévention routière fait appel à des cinéastes qui préfèrent raconter les vies brisées plutôt que de choquer en montrant les accidents.

Après Guillaume Canet, Rémi Bezançon, Mathieu Amalric ou Erick Zonca, Eric Toledano et Olivier Nakache sont les derniers à s'être prêtés à l'exercice avec un court métrage intitulé "Le bon vivant", sorti mercredi et réalisé pour l'association Ferdinand -créée par l'acteur et réalisateur Patrick Chesnais suite à la mort de son fils dans un accident- avec la Fondation Vinci Autoroutes.

Les réalisateurs d'"Intouchables" y montrent Lucas, meneur d'une bande de potes avec qui il se déguise à la fac, s'incruste en soirée, rencontre des filles, et qui a "adoré la vie". "J'aurais juste aimé qu'elle dure plus longtemps", précise-t-il alors que son visage s'efface sous un drap de morgue.

Dans ce film, comme dans les autres, aucune image d'accident. Quasiment pas de voitures. Les cinéastes racontent la vie heureuse qu'un accident peut briser, les relations difficiles d'un couple après l'accident, le quotidien qui doit continuer en l'absence d'un conjoint tué sur la route ou avec le poids de la responsabilité d'un accident mortel...

"On a voulu créer un choc mais en le déplaçant: célébrer la vie +normale+ de gamins de 20 ans insouciants mais qui peut, sur un moment, avoir une fin plus +trash+", qui contraste avec la "légèreté ambiante", explique Eric Toledano. Erick Zonca, césarisé pour "La vie rêvée des anges" et auteur d'un court métrage pour la Sécurité routière sorti le 5 mai, a, lui, voulu montrer "de la vie, qui file entre les doigts comme du sable".

Se concentrer sur l'après-accident

Les images choc d'accidents ont longtemps été un ressort pour la prévention routière, avec une efficacité reconnue. Mais aujourd'hui, "les jeunes vivent dans une société d'images, ils en ont tout le temps, partout", explique Patrick Chesnais, qui a impulsé ce renouvellement avec une +carte blanche+ à Guillaume Canet en 2013.

"Ils voient des choses mille fois plus trash, ce n'est pas un choc monumental pour eux de voir un accident", souligne Toledano. "Avec cette génération en surplus d'images, on se dit qu'on est peut-être plus fort dans la suggestion que dans la démonstration", complète Olivier Nakache.

La Sécurité routière a également pris ce virage. "On a choisi de travailler sur l'après-accident, de ne pas montrer l'accident pour des raisons de budget -ça coûte cher- mais aussi pour être plus fort dans l'émotion (...) avec une fibre plus intime", explique Pascal Couvry, directeur de création chez Publicis qui élabore les scénarios des campagnes de la Sécurité routière.

Les cinéastes apportent leur savoir-faire technique et un parti pris artistique. Toledano et Nakache ont ainsi filmé une scène au smartphone, donnant "un grain d'image identifiable" par les jeunes selon François-Brice Hincker de la Fondation Vinci Autoroutes; Guillaume Canet avait choisi de clore son film avec 25 secondes d'écran noir couvert du son d'un accident.

Patrick Chesnais veut, lui, continuer à renouveler le genre avec des "petites oeuvres cinématographiques". "Comme pour le cinéma, il y a différents registres: du gore, du burlesque, du fantastique... Tout est possible", estime le réalisateur, qui rêve que Maïwenn rejoigne son projet l'an prochain.

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