Cap’Cinéma est devenu 4e opérateur national

  • Philippe Dejust, patron de Cap’Cinéma : "Je ne veux pas transformer le cinéma en simple marchandise".
    Philippe Dejust, patron de Cap’Cinéma : "Je ne veux pas transformer le cinéma en simple marchandise". Repro CP
Publié le , mis à jour
Joël Born

Plein cadre. Le patron de Cap’Cinéma, Philippe Dejust, est à la tête de 24 sites, dont 12 multiplexes. Il nous a expliqué sa façon de diffuser le cinéma en s’adaptant aux besoins des villes et des collectivités. Comme à Rodez.

Le patron de Cap’Cinéma, Philippe Dejust, est à la tête de 24 sites, dont 12 multiplexes. Il nous a expliqué sa façon de diffuser le cinéma en s’adaptant aux besoins des villes et des collectivités. Comme à Rodez.

Chez vous, le cinéma est d’abord une histoire familiale ?

Tout à fait, mon grand-père exploitait déjà des cinémas dans les années 50, à Béziers et à Périgueux. Mon beau-père, dirigeait lui, une salle de cinéma à Blois, où il s’était installé au début des années 60. Il a voulu que j’assure la gestion des salles et j’ai eu l’idée un peu saugrenue de construire un multiplexe de 9 salles à Blois.

Pour un exploitant indépendant, dans une ville moyenne, c’était novateur. J’ai eu l’idée d’associer divers services, comme à Rodez, avec un restaurant, une garderie... en me disant que si ça marchait, on allait doubler la fréquentation. La première année, on est passé de 200 000 à 400 000 entrées, tout en conservant un cinéma art et essai en centre-ville. C’est devenu une grande salle, une référence en art et essai, avec tous les labels, qui fait 70 000 entrées. J’ai reproduit ce schéma, d’abord à Périgueux. Chaque fois, c’est un projet mené en concertation avec la collectivité.

Cap’Cinéma est devenu 4e opérateur national. Comment expliquez-vous cette réussite ?

Dans trois semaines, nous ouvrons un douzième multiplexe à Cagnes-sur-Mer. Ce sera le 24e site de Cap’Cinéma et cela portera le nombre d’écrans à 160(1). Je crois surtout qu’il y avait une place à prendre dans les villes moyennes où il n’y avait pas cette envie de faire et, surtout, l’argent pour le faire. Avec un investissement d’environ 8 M par multiplexe, amortissable sur 15 ans, il faut un gros volume financier. J’ai décidé de gérer différemment pour ne pas être obligé d’attendre ce retour sur investissement, en répondant aux projets de chaque ville.

L’avenir du cinéma est plutôt en centre-ville, comme à Rodez, ou en périphérie, comme à Montauban ?

Peu importe quand c’est bien fait. À Montauban, il n’y avait pas de place en ville et cela a permis de renforcer une nouvelle zone d’activités. À Rodez, il y avait le musée Soulages. Il fallait d’abord réussir le pari architectural. La ville a réalisé la construction et nous sommes locataires. Nous nous adaptons aux souhaits des élus. À Paris, Porte des Lilas, nous avons créé un multiplexe, sur la couverture du périphérique. Quelquefois, il peut aussi y avoir des ratés. À Agen, la municipalité a changé et nous avons loupé notre coup.

Êtes-vous satisfait de la première année d’exploitation de Cap’Cinéma à Rodez ?

J’ai eu un peu peur au début mais je suis très satisfait. En 2014, nous avons fait 311 000 entrées. En 2015, on devrait atteindre 325 000 entrées, sachant que le bon rythme de croisière est à 320 000.

Comment vous est venue l’idée de lancer la programmation de «All that jazz»?

J’ai été l’un des premiers à vouloir qu’un cinéma soit autre chose qu’un cinéma. Quand j’ai proposé des retransmissions de concerts, on considérait ça comme une hérésie. Je souhaite qu’une salle de cinéma devienne salle de spectacles, que le cinéma devienne un lieu de vie, amener autre chose que ce qui existe déjà. On fait aussi beaucoup de locations de salles.

Un cinéma est utilisé en moyenne 15% du temps, il y a de la marge. L’an dernier, à Rodez, nous avons totalisé 2200 entrées pour les retransmissions de spectacles et les 10 concerts d’All that jazz ont attiré 3330 spectateurs. Je suis fan de jazz, cela permet de présenter des artistes de renom, d’aller chercher des partenaires, dans une approche plus conviviale. Je regrette simplement qu’à Rodez, on n’arrive pas à ouvrir encore plus le cinéma sur l’extérieur, pour l’organisation de concerts, par exemple.

Que pensez-vous de l’initiative «satisfait ou remboursé» récemment lancée par un exploitant ?

Je ne ferai jamais une telle chose. C’est un manque de respect pour la création. L’œuvre peut ne pas vous plaire, mais l’œuvre existe. Je ne veux pas transformer le cinéma en simple marchandise. Je veux encore garder cette dimension de rêve.

Vous êtes au pied du podium derrière trois géants (Gaumont, UGC et CGR). Avez-vous l’ambition de faire encore mieux ?

Je suis avant tout un passionné et ça ne m’intéresse pas. Ils ont mis 100 ans pour y arriver. Ce n’est pas mon objectif. Je veux conserver une structure à taille humaine qui fonctionne. J’ai la chance de connaître tous les gens qui travaillent pour moi. Cap’Cinéma fait vivre 300 personnes. Nous réalisons un chiffre d’affaires de 400 millions d’euros. L’an passé, nous avons enregistré 5 millions d’entrées. En 2015, on devrait en faire 6 millions. Une opportunité s’est ouverte. Le concept du multiplexe a sauvé le cinéma et le cinéma art et essai permet ne pas faire que du commercial, dans un pays où nous avons la chance d’avoir un cinéma qui se porte assez bien. 

(1) Un 13e multiplexe Cap’Cinéma est en cours de construction à Nîmes, où l’ouverture est programmée fin 2016.

Voir les commentaires
Réagir
Vous avez droit à 3 commentaires par jour. Pour contribuer en illimité, abonnez vous. S'abonner

Souhaitez-vous recevoir une notification lors de la réponse d’un(e) internaute à votre commentaire ?