Tennis : Les Crognier, épris de court

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    Tennis : Les Crognier, épris de court Jean-Louis Bories
  • Alexandre (18 ans), Laurent (47 ans), Jean-Jacques (72 ans) et Annie (68 ans)<ET>: trois générations de Crognier unies par les liens du sang mais aussi du tennis et de ces courts ruthénois (ici à Vabre) qui les ont vus grandir tour à tour.
    Alexandre (18 ans), Laurent (47 ans), Jean-Jacques (72 ans) et Annie (68 ans): trois générations de Crognier unies par les liens du sang mais aussi du tennis et de ces courts ruthénois (ici à Vabre) qui les ont vus grandir tour à tour. Jean-Louis Bories
Publié le
Maxime Raynaud

Dans le monde du tennis aveyronnais, s’il est un nom qui résume presque à lui seul ce sport, c’est bien celui-ci : Crognier. Une famille, trois générations et une passion qui s’articule autour d’une balle jaune. Nous les avons réunis.

À peine arrivée, Annie tend un papier. «C’est l’article que je donne à tout le monde. C’est ma vision du tennis». Un coup d’œil à la prose du dénommé James E. Loehr suffit à comprendre. «Donner un sens au tennis», le titre est sans équivoque. Le tennis, un sens, rien de bien sorcier. Sauf qu’avec les Crognier, cela veut dire beaucoup plus.

Alexandre Solinhac, en formation au Stade ruthénois tennis pour le diplôme d’entraîneur, le résume en une phrase et un rire : «Crognier et tennis, c’est pareil !» Il n’est pas bien loin du compte. Car depuis 40 ans, la petite balle jaune et la famille ruthénoise ne font qu’un.

Au point que les rencontrer revient à jouer au jeu des sept familles tennistiques: tout en bas de l’arbre généalogique, ils sont 9 petits-enfants, dont Alexandre, 18ans; puis les trois enfants-Lionel, Laurent et Claire-et enfin Annie et Jean-Jacques, ceux par qui tout est arrivé. Tout et surtout une vie de tennis. Mais promis, juré, avant des «repas de famille où le tennis occupe presque toute la place», se marre Alexandre, ce n’était d’abord rien de sérieux.

Pas franchement intéressé par l’école comme elle était proposée, Jean-Jacques, né en 1944, avait bien tâté de la raquette sur les terrains de l’ASPTT Rodez, sous le Foirail, «mais c’était seulement pour nous occuper. Parce qu’il n’y avait rien d’autre à faire !», glisse dans son phrasé atypique le futur pédiatre, comme son papa.

À Sfax, «on n’avait qu’un salaire, trois enfants, donc on a joué»

Et puis, il y eut le coup de foudre. Un départ à Sfax, en Tunisie, pas vraiment le pays du tamis, et tout s’est emballé. Jean-Jacques, fraîchement diplômé, y est envoyé en «coopération militaire» pour 16mois dans l’hôpital local, en 1970. Elle, aussi diplômée en physique chimie de l’université d’Orsay, Annie, rencontrée à 15 ans alors qu’il en avait 19, suit. Les trois enfants aussi. «On était un peu atypique, déjà, pendant nos études avec nos trois gamins dans la résidence universitaire à Bayeux», sourit-elle, de retour de Guadeloupe où elle a assisté à la Coupe Davis. Mais c’est donc là, quelques années plus tard «à l’ombre de la Médina», se souvient Jean-Jacques, que tout a commencé.

«On n’avait qu’un salaire, celui de Jean-Jacques, trois enfants et on ne pouvait pas faire de tourisme, raconte Annie. Donc on a joué.» Tous les jours, les coups droits rythment le quotidien de la famille Crognier. Un tempo qui ne les lâchera plus. Pas même lors de leur retour à Rodez. «On n’avait pas de raison de décrocher», glisse, malicieux, le patriarche. Ce fut d’abord le Stade ruthénois tennis puis vite les responsabilités. Commission d’arbitrage pour Jean-Jacques, représentation des femmes au comité départemental et monitorat pour Annie.

«Mais en fait, le truc qui nous a accrochés, c’est que les enfants, eux aussi, ont accroché au tennis», dit-elle. Laurent, 47 ans, le deuxième fils devenu rhumatologue, témoigne : «On a très tôt baigné dedans. C’était le boom, les années Noah. On ne faisait que ça.» Et un peu de basket aussi. Puis il a fallu choisir. Alors que Jean-Jacques devient président du SRT pour un mandat de deux ans (1983-84) puis prend la direction du comité départemental en 1985-qu’il dirige toujours depuis, soit 8 mandats et 31 ans à sa tête! -, Annie, elle, continue l’entraînement des trois bambins.

«Tous les dimanches, on louait le court du Cedeq, pour être discrets, ne pas bloquer le terrain car on restait trois heures.» Le rythme est intense mais quand certains seraient tentés de faire le raccourci avec les méthodes à la dure qui ont souvent marqué ce sport (cf Agassi), les Crognier, eux, sont plus terre à terre. «Le tennis, ce n’était pas une plaisanterie, c’était cadré, exigeant, explique Annie. Mais le seul but, c’était d’atteindre le meilleur niveau de chacun, pas de viser Wimbledon.» 

Tennis : Les Crognier, épris de court
Tennis : Les Crognier, épris de court Jean-Louis Bories

«Championnite» et «temps qui passe»

Les résultats, aussi, seront là. Lionel, l’aîné, Laurent et Claire seront tous champions des Pyrénées, trimballés de tournois «alimentaires», comprenez pour le (petit) gain, en tournois «pour perfer», c’est-à-dire pour le classement, explique Jean-Jacques. Toute cette petite troupe se déplace alors dans le camping-car familial dans une joyeuse ambiance, assure Laurent.

«On se régalait. Mais on n’a jamais eu la “championnite”. C’était seulement l’envie de tout donner. Grâce au tennis, j’ai tout connu», s’enthousiasme-t-il. Tout connu au point d’y consacrer une partie de sa vie. Quand son frère est devenu directeur de Staps à Dijon et Claire employée de l’école des Mines d’Albi, lui a repris le flambeau du club ruthénois, dont il est président depuis 2012. Un peu par «envie d’être redevable envers ce sport qui (lui) a tant donné», sûrement beaucoup par passion aussi, même s’il s’apprête à passer le témoin et jure qu’on ne le verra pas au comité. Il y avait peut-être également une part de mimétisme, dans les pas d’un père toujours directeur du tournoi international à 72 ans et qu’il avoue «engueuler» afin qu’il lâche un peu les courts.

Mais Jean-Jacques a la parade : «On travaille, on ne se pose pas de questions», dit-il. «Et on ne s’aperçoit pas du temps qui passe», ajoute Annie. Pourtant il file. Le tennis, lui, est toujours là, repris par la troisième génération. Celle d’Alexandre, deuxième des trois enfants de Laurent, et le seul à avoir continué à monter au filet. Guillaume (20ans) est parti au hand, Camille (15 ans) au cheval. Mais «Alex», un temps partenaire de double de Lucas Tousart, aujourd’hui footballeur pro à Lyon, a voulu «voir s’il y avait bien du Crognier dans (ses) gênes.» Et l’étudiant en Staps ajoute, dans une malice tout héréditaire : «Mes enfants, je leur mettrai la raquette. Je ne les forcerai pas. Mais ça me plairait.» L’histoire des Crognier n’a pas fini de s’écrire. Avec le tennis pour donner un sens à leur vie. Elle est peut-être là la vraie signification de l’article d’Annie. 

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