Le rap montréalais ou le "franglais" comme terrain de jeu

  • Greg Beaudin, rappeur canadien des groupes Brown et Dead Obies, surnommé Snail Kid, lors d'un concert à Montréal le 1er avril 2016
    Greg Beaudin, rappeur canadien des groupes Brown et Dead Obies, surnommé Snail Kid, lors d'un concert à Montréal le 1er avril 2016 AFP - Alice CHICHE
  • Les rappeurs canadiens des groupes Rednext Level et Alaclair Ensemble, Ogden Ridjanovic, surnommé Robert Nelson (g) et Olivier Guénette, surnommé Maybe Watson (d), lors d'un concert à Montréal le 1er avril 2016
    Les rappeurs canadiens des groupes Rednext Level et Alaclair Ensemble, Ogden Ridjanovic, surnommé Robert Nelson (g) et Olivier Guénette, surnommé Maybe Watson (d), lors d'un concert à Montréal le 1er avril 2016 AFP - Alice CHICHE
  • Le rappeur canadien des groupes Rednext Level et Alaclair Ensemble, Ogden Ridjanovic, surnommé Robert Nelson, lors d'un concert à Montréal le 1er avril 2016
    Le rappeur canadien des groupes Rednext Level et Alaclair Ensemble, Ogden Ridjanovic, surnommé Robert Nelson, lors d'un concert à Montréal le 1er avril 2016 AFP - Alice CHICHE
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Centre Presse Aveyron

Ils sont nombreux, tous dans la vingtaine, à attendre sur un des grands boulevards de Montréal pour entrer dans une salle de concert où des groupes de rap locaux sont à l'affiche, en "franglais".

Pour Philippe Langlois, c'est le deuxième concert en deux soirs. Avec son groupe d'amis, il a fait le voyage depuis Québec pour goûter à ce rap montréalais, mélange des langues de Molière et Shakespeare, et miroir d'une génération multiculturelle et bilingue.

Cet alliage d'anglais et de français est le terrain de jeu de la scène rap québécoise. "C'est stimulant de faire rimer un mot anglais avec un mot français, ça ajoute un niveau de plus à la création", explique Greg Beaudin, membre de Dead Obies, un des groupes qui ont émergé au cours des cinq dernières années comme Alaclair Ensemble ou encore le rappeur Koriass.

Ce soir d'hiver qui s'étire, trois groupes se sont succédé sur scène: le duo Rednext Level, le trio Brown avec un père et ses deux fils et enfin Loud Lary Ajust, consacré par le public dès 2014 avec son album Blue Volvo.

Le spectacle dégage "une énergie puissante", avec une "allure de show punk mais avec du rap", juge Philippe Langlois.

Le rappeur Snail Kidl, chapeau vissé sur la tête, parle avec plaisir de ce jeu entre les mots et les sonorités dont il use largement.

L'alternance des langues est une constante dans les chansons de ces groupes, comme par exemple dans l'extrait de "Where they @" de Dead Obies:

"Vas-y claim Montréal but we still runnin' that / Ouh, meilleure chance la prochaine fois/ Sittin' on top pitch des roches su'é mouettes" (Vas-y, revendique-toi de Montréal, on a toujours le contrôle/ Ouh, meilleure chance la prochaine fois / Assis au sommet à lancer des cailloux sur les mouettes).

Les rappeurs puisent leur vocabulaire directement dans la ville qui les a vus grandir, la bilingue Montréal.

"Les gens qui vivent dans des zones urbaines vont naturellement développer un mélange entre les deux langues", soutient Ogden Ridjanovic, membre d'Alaclair Ensemble.

- Koriass à Paris -

Ce mélange a aussi une "fonction esthétique", chaque langue a "des propriétés phonétiques", ce qui donne un immense terrain de jeu pour les rappeurs, dit Greg Beaudin à l'AFP.

Globalement tous ces groupes sont marqués par la culture américaine, omniprésente dans le quotidien des Canadiens. "On a grandi en écoutant de la musique anglophone, en s'inspirant des codes des rappeurs américains déjà établis", note Simon Cliche, rappeur de la formation Loud Lary Ajust.

Cette particularité des groupes québécois a son revers. Il leur est difficile de percer en dehors de la Belle Province. Leur style de musique combiné aux deux langues est une "niche", souligne Simon Cliche. "Ça nous limite quand même à un créneau de personnes qui parlent très bien l'anglais et le français, assez pour le mélanger. C'est limité au Québec", rapporte le rappeur.

Faire une tournée en dehors du Québec "demande beaucoup de travail et de détermination", renchérit Steve Jolin, le manager de Koriass, rappeur vedette de la scène québécoise. Pour s'exporter à l’international, "il faut trouver des gens qui croient au projet" et Koriass est l'un des rares à réussir des deux côtés de l'Atlantique. Son album Love Suprême était attendu le 15 avril en France, avec déjà cinq dates de concerts, dont le 25 avril à Lyon et deux jours plus tard à Paris.

La France est "une porte de sortie possible même si le marché est dur à attaquer", estime Greg Beaudin.

Pourtant, Dead Obies s'est déjà retrouvé en France en 2014 pour sept dates, avec "un accueil très bon", relate Emilie Davaine. Pour cette productrice de la tournée française du groupe, le "franglais" n'est pas un problème face à un public français habitué aux artistes "avec des chansons dans les deux langues".

Source : AFP

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