Rodez. Assassinat de Pascal Filoé : la défense veut plaider le crime passionnel

  • Me Isabelle Gharbi-Terrin consacre 80 % de son activité à la cause animale.
    Me Isabelle Gharbi-Terrin consacre 80 % de son activité à la cause animale. Repro CP
Publié le
Christophe Cathala

Ce serait inédit en France. L’avocate d’Alexandre Dainotti, qui a assassiné Pascal Filoé le 27 septembre 2018 à Rodez, est spécialiste de la cause animale, et estime que son client a agi par amour… pour son chien.

Avocate au barreau de Marseille, Me Isabelle Gharbi-Terrin est l’une des grandes spécialistes de la défense des animaux et de leur cause auprès des humains. Mais c’est l’assassin présumé de Pascal Filoé, cadre de la mairie de Rodez, poignardé à mort en pleine rue le 27 septembre 2018 qu’elle s’engage à assister, à sa demande.

Alexandre Dainotti, 39 ans, marginal, est passé à l’acte car sa victime était, à ses yeux, responsable de lui avoir retiré son chien sur mesure administrative. Voilà le lien avec l’animal. Et l’amour que lui portait son maître vient à justifier son mobile meurtrier, selon Me Gharbi-Terrin qui compte plaider, avec sa collaboratrice Stéphanie Bénita, "le crime passionnel" quand l’accusé passera à la barre de la cour d’assises.

Faire savoir

L’avocate est convaincue d’avoir une ligne de défense unique en France pour une telle affaire et veut le faire savoir. C’est elle qui a pris contact avec notre rédaction pour nous l’annoncer et nous expliquer sa motivation : "S’il est vrai qu’Alexandre avait un casier, il n’en aimait pas moins ce chien, qui était l’être vivant sur lequel il cristallisait son amour, son affect. En lui retirant son chien, on lui a enlevé sa part d’humanité, de compassion, son compagnon, sa famille… Il a ressenti qu’il n’avait plus rien à perdre. Nous sommes en plein dans le crime passionnel, celui-là même dont la seule motivation, l’unique mobile est l’amour porté à un être. Et l’être aimé est un chien."

La démonstration résistera-t-elle à l’émotion, la douleur et la colère suscitées bien au-delà de Rodez par l’effroyable assassinat de Pascal Filoé ? On peut en douter. "Mais je ne cherche en rien à minimiser l’extrême gravité de son acte, se défend Me Gharbi-Terrin. Si j’arrive à faire entendre qu’il n’a pas tué pour de l’argent, que l’on est en dehors de la vilenie humaine, crapuleuse, alors cela doit jouer pour qu’il obtienne des circonstances atténuantes octroyées au crime passionnel. On peut gagner quelques années sur une peine qui s’annonce lourde."

Elle ne se fait pas d’illusion : Dainotti a revendiqué son acte, il risque la réclusion à perpétuité. "Plus c’est difficile, plus l’avocat se sent déterminé à défendre, plus la plaidoirie a de la valeur. C’est un très beau dossier pour un avocat, c’est un cas exceptionnel."

Des nouvelles de son chien

L’avocate marseillaise peaufine son grand œuvre en s’imprégnant de son client, incarcéré actuellement à Narbonne. "Je suis allée à la maison d’arrêt pour lui montrer des photos de son chien qui a été adopté. Je me suis engagée à lui en donner des nouvelles le plus souvent possible. Dans sa cellule, il ne pense qu’à son chien baptisé Poutine. Il était pour lui son unique sujet d’amour, et reste dans un état de passion. Il n’est pas exclu que j’aille dans la nouvelle famille de Poutine, incognito, juste pour m’assurer qu’il va bien, qu’il gambade et a trouvé le bonheur."

Étrange partition, difficile à comprendre. Mais le rôle de la défense n’est pas de se mettre à chaque instant à la place de la partie civile. Que l’accusé n’éprouve à ce jour, inquiet de l’avenir de son chien, aucun remords selon Me Gharbi-Terrin, ne laisse pas d’interroger. La cour d’assises, qui ouvrira le procès dans deux ans environ, étudiera cette plaidoirie "inédite" sans désemparer.

Pour l’heure, c’est à l’opinion d’en juger.

La réaction de Me Elian Gaudy

Ténor du barreau de l’Aveyron, rompu aux procès d’assises, Me élian Gaudy défend l’épouse et les enfants de Pascal Filoé. "Je trouve curieux, voire choquant, de prendre l’initiative de se déclarer ainsi dans les colonnes de la presse. Il ne faudrait pas confondre tribune et tribunal. Je suis saisi de ce dossier depuis plusieurs mois, et je ne me suis jamais exprimé. Je suis respectueux de l’instruction". Et sur le fond de cette ligne de défense ? "Le crime passionnel n’est pas une qualification juridique. C’est du roman, ce n’est pas du droit. Mais la liberté de la défense permet de plaider ce que l’on veut…"

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