Le culte de saint Amans à Rodez : l’eau et la foudre

Depuis la mort de saint Amans autour du Ve siècle, les habitants de Rodez ont toujours manifesté leur confiance envers leur saint patron, considéré comme à la fois l’apôtre, le défenseur et le bienfaiteur de la ville. Les divers genres de calamités étaient tout autant d’occasions d’invoquer l’intercession du saint homme.

"Tous les éléments étaient soumis au pouvoir du saint pontife, souligne le chanoine Louis Servières dans son ouvrage consacré à saint Amans. Les eaux lui obéissaient aussi bien que le feu.

L’hiver de l’an 1826, d’une rigueur exceptionnelle, avait couvert d’une épaisse couche de neige les montagnes et les vallées. Une pluie torrentielle déclencha une débâcle subite. L’Aveyron, enflé par cette crue extraordinaire, déborda d’une manière effrayante, inonda au loin la vallée et menaça d’une catastrophe les habitations voisines de la rivière. Le flot montait incessamment.

Dans cette extrémité, les riverains désolés songèrent à leur puissant patron. Sur leur demande, le curé de Saint-Amans, l’abbé Sadoux, convoqua une procession générale pour conjurer le fléau.

La population s’y rendit en foule malgré la pluie battante.

Le chef de saint Amans fut solennellement porté, au chant des litanies des saints. La procession présidée par l’abbé Annat, vicaire de la paroisse et plus tard curé de Saint-Merry à Paris, se dirigea vers la croix de l’avenue des Quinze-Arbres qui domine l’Aveyron.

Là on chante l’hymne, l’antienne et l’oraison de Saint-Amans, et pendant ce temps un homme, nommé Cazes, fut délégué pour aller puiser un seau d’eau à la rivière en crue.

Le chef de saint Amans ayant été plongé dans le seau, le même homme redescendit et jeta sur les flots en fureur l’eau à laquelle le contact de l’insigne relique avait communiqué la vertu du saint évêque.

La confiance générale fut aussitôt justifiée avec éclat. Le saint sut calmer l’impétuosité de cette inondation. À peine l’eau sanctifiée eut-elle touché les flots, que l’on vit la rivière toujours grossissante jusque-là, abaisser subitement son niveau d’un mètre environ ; ce que toute la population put constater facilement par l’inspection des murs des maisons inondées. Dès ce moment, les eaux ne cessèrent de diminuer petit à petit ; tout danger fut conjuré. La procession, reprenant alors le chemin de l’église, fit éclater son action de grâces par le chant du Te Deum."

Dans son ouvrage Les Saints en Rouergue, l’archiviste Jean Delmas enquête sur les pèlerinages et les dévotions populaires et recueille le témoignage d’une habitante d’Olemps assurant que selon une tradition très ancienne, jamais la foudre n’a tué sur le territoire de sa commune, à cause de la protection de saint Amans. En effet, Olemps faisait jadis partie de la paroisse de Saint-Amans. Un sceptique objecta un jour que la foudre était tombée une fois à Puechcamp, blessant même un habitant. Mais Puechcamp serait de la paroisse du Monastère !