Fred Saurel : "Je n’avais encore jamais joué un tel registre à l’écran"

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  • Dans “Baron Noir”, Fred Saurel joue le rôle d’un professeur de biologie et blogueur politique.
    Dans “Baron Noir”, Fred Saurel joue le rôle d’un professeur de biologie et blogueur politique. Repro CP - ML
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Victor Guilloteau, ML

Le comédien aux attaches saint-affricaines, Fred Saurel, est l’un des personnages-clé de la saison 3 de Baron Noir, diffusée sur Canal +. Il y campe le rôle de Christophe Mercier, professeur de biologie et blogueur à l’ascension politique éclair.

Comment votre collaboration avec la série Baron Noir est-elle née ? J’ai passé un casting via mon agent. On m’a simplement fait jouer une scène, j’avais très peu d’informations sur le rôle. Très vite, je me suis demandé ce que c’était que ce personnage, sorte d’hybride entre “gilets jaunes” et Étienne Chouard (blogueur, enseignant et théoricien). Il fallait lire entre les lignes, mais j’ai compris que c’était un personnage important.

Comment avez-vous travaillé le personnage, celui d’un blogueur politique, partisan du tirage au sort et plus généralement du “dégagisme” ?

J’ai bossé comme un fou ! Je me suis imposé une grosse charge de travail pour arriver prêt au casting. J’ai d’abord senti que c’était magnifiquement écrit. J’ai trouvé ça puissant. C’est toujours mieux d’apprendre un rôle avec un très bon texte. En poussant le travail plus loin, on parvient à s’approprier un récit. On lui donne un sens plus profond.

Qu’est-ce qui vous a plu dans ce rôle ?

Jouer avec l’ambiguïté d’un personnage, c’est du nectar pour un acteur. Je me suis entièrement confié à Thomas Bourguignon (qui réalise les épisodes 5 à 8 de la saison 3). Je me suis totalement laissé prendre dans cette gestion de l’ambiguïté, dans la peau de cet homme à la bonhomie sympathique, mais au regard de plus en plus inquiétant.

Comment rend-on crédible un personnage de fiction ?

Je me suis approprié toutes ses idées. Je suis rentré dans sa psychologie, dans son argumentaire. Je me suis demandé comment, si j’avais moi-même été prof de biologie, j’aurais pu amener le déséquilibre ? Il fallait jouer quelqu’un de sincère, qui n’est pas un politique non plus. Mercier a une élocution, il est posé, imperméable aux émotions. Mais je n’ai jamais eu le sentiment de jouer le “méchant”. Il y avait simplement cette ambiguïté très présente dans l’écriture, d’un personnage en désaccord avec l’ordre en place.

On vous connaît davantage pour des rôles comiques. Ce n’était pas forcément un costume taillé sur mesure…

J’ai totalement retiré cette vista comique pour les besoins du rôle. Je me sens, bien sûr, comédien. J’ai un peu l’image du gars avec le pétard et l’apéro au coin des lèvres. Au casting, ils ont vu défiler plein de Mercier, ils ont essayé plein de choses. Ce personnage existait sur le papier, mais il fallait trouver un physique, une personnalité, un Mercier convainquant qui collait au rôle. Moi, j’y suis allé avec ma sincérité.

Mercier, malgré ses références explicites, n’a pas (encore) d’équivalence dans le paysage politique français. Son ascension vous semble-t-elle crédible ?

Il est le grain de sable dans la machine politique. C’est le chaos qui s’exprime. Baron Noir est porté par des auteurs passionnés de politique. Ils ont compris les remises en question actuelles, la perte de confiance dans le politique, le fait que le gouvernant soit l’homme à abattre… Ce contexte, avec la progression des partis populistes, l’abstention, et le terme “d’irresponsables politiques” utilisé par Mercier, cela raisonne dans l’esprit des gens.

Que pensez-vous de cette façon qu’il a de faire de la politique ?

Si les “gilets jaunes” avaient réussi à désigner un leader, il aurait pu s’appeler Christophe Mercier. Ses arguments paraissent solides. Il pourrait exister. C’est un personnage issu de l’esprit des auteurs, mais né des réseaux sociaux… Aujourd’hui, le politique ne peut plus faire sans cet espace d’expression.

Certes fictive, que dit cette saison de notre démocratie et de nos institutions ?

Le problème, c’est qu’on ne peut pas demander à tout le monde d’avoir une conviction politique. C’est parfois normal, quand les gens ont besoin d’une solution immédiate à leur problème, de plonger dans la facilité. Mais il faut faire attention à ce que pourrait donner une Révolution ou une nouvelle République. La montée du populisme est quelque chose qui fait peur. Je crois qu’il faut s’en méfier. Certains voudraient faire tomber Macron pour des raisons qui ne sont pas les miennes (rires) !

On ne veut pas tous faire la même Révolution. Dans Baron Noir, le personnage de Rickwaert se pose justement en gardien de la démocratie. Il croit en la politique, car il croit en la République.

Avez-vous le sentiment d’avoir montré autre chose de vous dans ce rôle ?

C’est certain. Je n’avais encore jamais joué une telle partition à l’écran. J’ai le sentiment qu’on m’a laissé ma chance. En général, je participe à un ou deux jours de tournage. Comment être remarqué ? Comment susciter le désir dans ces conditions ?

Votre interprétation semble avoir été remarquée par la critique. Pensez-vous que ce rôle peut vous ouvrir de nouvelles perspectives professionnelles ?

Beaucoup de professionnels du métier vont regarder la série. J’ai espoir que certains tombent sur Baron Noir et se disent : “Fred Saurel est pas mal !” (rires). Cela peut m’ouvrir de nouvelles perspectives, j’en suis convaincu. Pour ceux qui doutaient de ma capacité à apprendre des textes, ils ont la réponse ! Il n’est jamais acquis qu’il y ait des retombées, mais oui, j’espère secrètement qu’il y aura une belle suite à cette interprétation.

 

“Baron Noir”, diffusé sur Canal +. Épisodes 5 et 6 lundi 24 février, 7 et 8 lundi 2 mars.
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