#Ensemble / La sécurité pour continuer à bâtir

  • La sécurité sanitaire est le leitmotiv des entreprises du bâtiment depuis la réouverture des chantiers.
    La sécurité sanitaire est le leitmotiv des entreprises du bâtiment depuis la réouverture des chantiers. Midi Libre - ALEXIS BETHUNE
Publié le , mis à jour
Paul Seidenbinder

Les chantiers ont rouvert dès la mi-avril mais dans des conditions particulières.

À partir de l’annonce du confinement le 16 mars, les chantiers avaient tout de paysages post-apocalyptiques. Les bruits quotidiens des pelleteuses, des marteaux-piqueurs qui fracassent le sol, des va-et-vient permanents des camions de transports ont laissé place à des sites désertiques. Où de grosses machines orange restaient là, abandonnées.
Mais ce décor digne des blockbusters américains fut de courte durée. Car le secteur du Bâtiment et des travaux publics (BTP) a été l’un des premiers à repartir (autour de mi-avril), à retrouver des hommes sur le terrain. Pas à n’importe quelle condition bien sûr.

Un guide de la santé

L’OPPBTP (l’Organisme professionnel de prévention du bâtiment et des travaux publics) a imposé un guide de la santé au milieu du confinement, période de reprise de l’activité, où des mesures de sécurité sanitaire drastiques ont été mises en place.
Léo, Montpelliérain et conducteur de travaux chez Eiffage Construction, a revu tous ses plans et réorganisé le déroulement de son chantier (un lycée). "Nous avons dû changer notre manière de faire, modifier les modes opératoires et limiter voire interdire la coactivité", explique-t-il.

Des règles (très) strictes

Chaque matin, le début de service des ouvriers est échelonné. Chacun doit répondre à l’entrée de la zone de construction à un questionnaire précis. Des courbatures ? Une hausse de la température ? De la toux ? La moindre incertitude et le salarié est immédiatement redirigé vers la sortie pour se rendre chez le médecin.
Des points d’eau disposés un peu partout, des gels hydroalcooliques, du savon, des plannings précis, des créneaux pour les pauses repas, des rotations… Tout est calculé pour assurer la sécurité au maximum et éviter un croisement des personnes. "Une société vient désinfecter et nettoyer toutes les deux heures, au lieu de deux à trois fois par semaine, ajoute même Léo. Le port du masque est obligatoire dès que la distanciation sociale ne pouvait être respectée."

Un coordinateur en sécurité sur les chantiers

Sur chaque chantier, un coordinateur en sécurité et protection santé (CSPS), choisi par l’OPPBTP et pris en charge par l’entreprise, vérifie que toutes les règles sont appliquées à la lettre.
Depuis fin mai, l’OPPTBTP a sorti une deuxième version de son guide de la santé. Plus souple. Mais les conséquences sur le long terme pourraient coûter cher aux entreprises de construction sur le plan économique et des délais.

Addition salée et baisse de productivité

Les coûts pour assurer une sécurité optimum sont venus alourdir la note : nettoyage journalier (dix fois plus cher), la prise en charge des CSPS, la nomination de référents pour assurer une formation aux gestes barrières... Mais l’addition la plus salée est ailleurs. "Le pire, c’est l’immobilisation du matériel, craint Léo. On continue à louer les machines. Même si les fournisseurs font des efforts, cela risque de coûter cher."
D’autant que ce matériel n’est pas prêt d’être rendu. Avec les mesures de sécurité sanitaire, on estime une baisse de productivité de 5 à 15 % selon les chantiers. Et donc un impact direct sur les délais.

Manque de vision sur le long terme

À Montpellier, l’ouverture du futur Atrium de l’université Paul-Valéry, prévu en octobre 2021, devrait être retardée d’environ trois ou quatre mois.
Enfin, l’angoisse du BTP reste la vision à long terme, notamment au niveau de la commande publique qui est au point mort avec le décalage des élections municipales. Pour les mairies où le scrutin reste à terminer, aucun conseil municipal ne peut anticiper l’ouverture ou non de nouveaux chantiers. Et là aussi, quelques sueurs froides pourraient apparaître au moment de faire les comptes de fin d’année.

Délais de chantier : les mesures exceptionnelles non prolongées

Ce qui ne plaît pas du tout au secteur de la construction. Le gouvernement estime que "compte tenu des perspectives de reprise de l’activité économique, les mesures portant sur les reports de délais, les pénalités contractuelles, la suspension ou la prolongation des contrats ne sont plus justifiées au-delà de cette date", peut-on lire dans le rapport au président de la République. Une décision qui n’a pas manqué de mettre le feu aux poudres.

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