Des artistes et du bien-vivre au village de Montolieu
L’ancienne manufacture drapière du village, qui fut érigée manufacture royale, est devenue un pôle culturel, qui abrite aujourd’hui des ateliers d’artistes, des galeries, des salles d’expos et de spectacles, un restaurant gastronomique, un bar lounge et des chambres d’hôtes. Un lieu original et plein de vie artistique.
C’est l’histoire d’une ancienne manufacture textile, qui fut érigée en manufacture royale, en 1734. La manufacture royale de Montolieu connut son apogée de 1770 à 1790. Le village a vécu pendant plusieurs siècles une longue tradition drapière de nombreux artisans s’étant établis sur les bords de la Dure, dont les eaux sont réputées pour leur pureté. Plusieurs fois transformée, agrandie, après bien des péripéties, l’usine a fini par rendre définitivement son âme industrielle dans la première moitié du XXe siècle. Sur le fronton surplombant la porte d’entrée de l’un des bâtiments magnifiquement restauré par le nouveau propriétaire des lieux, les mots Manufacture… de Montolieu sont gravés dans la pierre. La mention royale a disparu. Éliminé pendant la Révolution. Dans ces lieux, chargés d’histoire, où furent internés pendant plusieurs mois de l’année 1939, des réfugiés républicains espagnols, les machines ont laissé place à l’énergie créative des artistes. Une partie des bâtiments et du domaine de 14 000 m2, rachetés par un investisseur privé, qui a aménagé chambres d’hôtes, restaurant gastronomique et bar lounge, est aujourd’hui occupée par plusieurs artistes regroupés au sein du collectif associatif de l’Envol artistique. Plusieurs dizaines de milliers de touristes et de visiteurs fréquentent chaque année le village des livres. Comme nous, la plupart sont surpris de pénétrer dans ce lieu particulièrement insolite. Décalé. Un brin surréaliste. Mais tellement agréable.
"Un lieu fantastique"
Chapeau sur la tête, foulard autour du cou, Didier Almon, ancien journaliste devenu photographe vagabond, a rejoint l’équipe de l’Envol artistique et installé sa galerie de la Compagnie des voyageurs, dans l’une des grandes salles de cette ancienne friche industrielle qui ne manque pas de charme. "C’est un lieu fantastique, où l’on se sent vraiment bien", résume ce baroudeur. Didier Almon a séjourné plusieurs fois en Inde, l’un de ces pays préférés, dont il a ramené de nombreux reportages photographiques. Il a aussi parcouru l’Australie sur les traces notamment des chercheurs de jade. L’hiver dernier, il s’est retrouvé confiné sur l’île de Bali… Après nous avoir offert son café de bienvenue, il nous sert de guide pour faire le tour du propriétaire.
Dans l’immense salle Ramel, ministre des Finances de 1797 à 1799, natif de Montolieu, sont actuellement exposées des tableaux sculptures, de l’artiste ruthénois JiCé, qui puise son inspiration dans un univers industriel et urbain. Sous ses magnifiques lustres cuivrés très design, cet espace sert également de salle de spectacles et de répétitions pour diverses compagnies. Le propriétaire de la Manufacture y organise aussi des réceptions. À l’autre bout de la cour, la salle de la Verrerie accueille les œuvres en noir et blanc d’un jeune artiste, Phil, qui a fait de la structure linéaire du trait sa marque de fabrique.
De vastes espaces
Moyennant un loyer particulièrement modeste pour autant d’espaces, l’association présidée par Willy Bas occupe, gère, anime et entretient les lieux. Et chacun met la main à la pâte selon des règles collectives bien établies.
Après d’importants travaux d’aménagement, l’étage, désormais ouvert au public, abrite des ateliers d’artistes des salles d’exposition et un espace librairie. On y découvre, entre autres, les superbes sculptures en terre cuite d’Eliette Chalet, et celles en papier mâché de Dorothée Fréau. Il y a même un endroit réservé aux travaux des écoliers du village et des alentours. Plusieurs jeunes créateurs participent à l’aventure. L’un d’entre eux imagine et fabrique des jeux de société. Tous les dimanches matin de la saison estivale, la Manufacture reçoit des producteurs de la région pour son marché des Terres d’ici. L’hiver, à l’heure des fêtes de Noël, la salle Ramel connaît pendant plusieurs jours l’ambiance hautement festive du marché des créateurs.
L’association qui gère les lieux propose également, en partenariat avec plusieurs institutions départementales et régionales, un accompagnement personnalisé pour les artistes plasticiens et ceux du spectacle vivant.
À l’arrière des principaux bâtiments de la Manufacture, Didier nous ouvre les portes de la Jungle, un vaste terrain arboré qui doit faire l’objet d’aménagements futurs. Les murs d’un ancien atelier de l’usine textile, typique de l’architecture industrielle des XIXe et XXe siècles avec ses structures métalliques et ses verrières, ont servi de support à des groupes de graffeurs. Le Zion studio fait régulièrement le bonheur des photographes et autres réalisateurs de clip. Le jour de notre visite, une équipe de tournage se trouvait d’ailleurs sur les lieux. Ainsi va la vie, à la fois douce et trépidante, de la Manufacture.
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