La gauche en Aveyron : "Notre réussite est d’être parvenus à nous unir"

Abonnés
  • Les chefs de file du Printemps aveyronnais : Bertrand Cavalerie (PS), Corinne Compan (PCF), Guilhem Sérieys (LFI) et Laurent Renaudin (EELV).
    Les chefs de file du Printemps aveyronnais : Bertrand Cavalerie (PS), Corinne Compan (PCF), Guilhem Sérieys (LFI) et Laurent Renaudin (EELV).
Publié le
Christophe Cathala

Union de la gauche et des écologistes pour les Départementales, le Printemps aveyronnais n’a pas confirmé dans ses résultats la dynamique électorale que l’on pouvait attendre. Bertrand Cavalerie (PS) confie son analyse.

Ce devait être la dynamique du succès pour les élections départementales, force est de constater que le Printemps aveyronnais, union du Parti socialiste, parti communiste, France insoumise et Europe Écologie les Verts est resté sur sa faim. Pire encore, l’opposition dans son ensemble a perdu six sièges dans l’hémicycle. Un échec ? Bertrand Cavalerie, premier secrétaire fédéral du PS s’en défend.

La stratégie d’union du Printemps aveyronnais pour ces départementales n’a pas été payée en retour. Quels enseignements en tirez-vous ?

D’abord, ce n’était pas une stratégie, mais une volonté de se retrouver. Sur la base d’un constat : nous sommes faibles, mais toute la société l’est aussi, c’est une société de l’abstention dans beaucoup de domaines.

Dès lors, est-ce que l’on peut faire quelque chose ensemble, est-ce que l’on est capable de se parler, de s’organiser ? 90 % de notre électorat se pose la même question.

Il n’y avait pas de dynamique à gauche, et notre réussite est d’être parvenus à nous unir, à être plus forts ensemble. Créer un mouvement d’union, d’organisation, de projet et de valeurs, c’est un premier pas pour la gauche aveyronnaise.

Plus forts, certes, mais en situation d’échec face à la progression de la droite aveyronnaise…

Il faut analyser tous les paramètres du scrutin. Le grand vainqueur, c’est l’abstention et c’est une catastrophe. On en comprend le contexte, à cette période. Je souhaitais que les départementales soient déplacées en octobre. Il n’en fut rien, on a eu une campagne trop courte qui plus est, de trois semaines maximum.

L’abstention est-elle une excuse quand elle concerne tous les candidats qu’ils soient ou non de gauche ?

Non, mais elle profite aux sortants. On a été de fait sur une élection de notoriété. Les municipales de l’an passé ont été la vraie matrice de cette notoriété et la gauche a mal négocié ces municipales. Il nous faut travailler l’incarnation dès cet échelon municipal.

La prime aux sortants n’a pas aidé Corinne Compan, du Printemps aveyronnais, à conserver son canton de Millau-1. Ni Régis Cailhol les Monts du Réquistanais…

Mais Corinne Compan a gagné dix points par rapport à 2015. Et Régis Cailhol a glissé vers la République en marche. Comme ce fut le cas pour Anne Blanc en Ceor Ségala, pour Stéphane Mazars sur le Vallon : ils sont devenus LREM en cours de mandat et même s’ils ne se représentaient pas, les cantons ont basculé.

Les électeurs ne rejettent-ils pas les étiquettes partisanes ? De nombreux "divers gauche" ont tiré leur épingle du jeu, comme ce fut le cas à Sévérac.

Les "sans étiquette" ne m’intéressent pas. Quand on fait de la politique, on dit qui on est. Et ne pas faire de politique quand on est candidat, c’est être invertébré.

Divers gauche et divers droite ont eu du succès, c’est vrai. Et à Sévérac, on n’a présenté personne, le maire Edmond Gros a été dans la dynamique des municipales, il l’a emporté. Une fois encore, la notoriété a joué.

Dans un département qui vote à plus de 60 % pour la socialiste Carole Delga aux régionales, n’avez-vous pas quand même des marges de progression ?

Ces deux scrutins, départementales et régionales, ont été corrélés alors qu’ils n’ont rien à voir. La Région correspond plus à un cadre d’accords nationaux, les départementales sont, une fois encore, de "super municipales". Mettre les deux ensemble, c’est banaliser le scrutin et nos concitoyens n’y comprennent plus rien. C’est une bêtise. La période est dramatique en termes d’engagements, or les scrutins intermédiaires comme les départementales sont importants.

Ce succès de Carole Delga est aussi celui de la socialiste Emmanuelle Gazel, tête de liste départementale aux régionales et maire de Millau. Elle a porté la dynamique de gauche vers un succès avéré, ce que n’est pas parvenu à faire le Printemps aveyronnais. Êtes-vous encore légitime à diriger le PS en Aveyron ?

Ceux qui parlent de légitimité ne sont pas au PS. Ou en sont sortis. A ce sujet, s’il y a eu des exclusions, elles sont pour leur part légitimes. Une voie a été choisie par le parti, au niveau national : on ne pourra pas travailler avec des formations politiques qui ne sont pas de gauche, telle la République en marche. J’entends bien, sur ce point, que ça râle ici ou là, mais on assume la position que l’on a choisie et nos électeurs nous en sauront toujours gré : s’ils se détournent, c’est qu’ils en ont marre des candidats qui privilégient des parcours personnels. C’est une pratique courante à droite, pas chez nous.

Pour revenir à la légitimité, je n’ai pas vocation à être leader de la gauche pas plus que du Printemps aveyronnais. Emmanuelle Gazel est une amie avec laquelle, au sein de la fédération, on fait tous ensemble un excellent travail. Et mon vœu, par-dessus tout, est de travailler avec ces mêmes personnes dans une même dynamique.

Guilhem Sérieys : "Ne pas refuser les logiques de rassemblement"

Chef de file en Aveyron de La France insoumise, partie intégrante du Printemps aveyronnais, Guilhem Sérieys partage l’analyse de Bertrand Cavalerie et déplore "une abstention colossale, prisme déformant de la réalité sociale et politique" mais aussi une double élection "qui n’aide pas à la compréhension des enjeux". Guilhem Sérieys reconnaît "une grosse prime à la notoriété" et un choix des électeurs "pour éviter le changement". Il prévient toutefois : "L’union de la gauche ne suffit pas à propulser une dynamique, mais il ne faut pas refuser les logiques de rassemblement. Pour les Insoumis, nos 11 candidats titulaires ont construit localement, pour l’avenir". L’avenir du Printemps aveyronnais passera-t-il par les législatives ? Pas évident pour La France insoumise : "Ce sont des élections très liées à la dynamique présidentielle, qui est nationale. On peut se mettre d’accord sur des projets locaux, mais au national, il faut incarner un vrai choix".
Cet article est réservé aux abonnés
Accédez immédiatement à cet article
2 semaines offertes