Au tribunal de Rodez : quatre ans de prison pour le patron qui abusait d'enfants

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  • Interrogé par le tribunal sur les raisons de son passage à l’acte, le quadragénaire condamné a souvent cité « le suicide d’un ami » lors de l’audience.
    Interrogé par le tribunal sur les raisons de son passage à l’acte, le quadragénaire condamné a souvent cité « le suicide d’un ami » lors de l’audience. JAT
Publié le , mis à jour
Mathieu Roualdés

Le patron d'une blanchisserie du Massegros en Lozère, a été condamné à quatre de prison ferme, vendredi 11 mars par le tribunal de Rodez.

"Ce dossier tord les boyaux, l’estomac". La phrase est de Me Christelle Cordeiro durant sa plaidoirie. Et comment donner tort à l’avocate ruthénoise ? Ce vendredi au palais de justice de Rodez, elle faisait face à un quadragénaire dégarni, au physique de « Monsieur tout le monde ». Il y a encore quelque temps, ce dernier était un patron « respecté » du Massegros, en Lozère.

À la tête d’une blanchisserie dans le petit village, il embauchait 19 personnes et ne rechignait pas à prendre plusieurs jeunes l’été. Il y a peu, il s’affichait même dans la presse pour défendre le sort d’un ancien mineur non accompagné sous le coup d’une expulsion administrative. Personne ne se doutait alors que derrière cet homme se cachait un véritable prédateur sexuel attiré par les enfants…
Jusqu’au 28 juin 2019, où la gendarmerie de Séverac-d’Aveyron reçoit la plainte d’un jeune de 17 ans. Le patron de la blanchisserie est son ancien beau-père. Dans les derniers mois de relation de celui-ci avec sa mère, le jeune en avait peur, jusqu’à dormir avec un couteau caché sous l’oreiller… Mais surtout, il dit aux enquêteurs avoir été abusé durant près de quatre ans.

« Sans cette plainte, il y aurait une troisième victime »

Cela a commencé lorsqu’il avait 10 ans. Au bord de la piscine, son beau-père lui descend son maillot de bain et le masturbe. Ces faits, il les multipliera ensuite, lors de sorties en quad ou de soirées devant la télévision lorsqu’ils se retrouvent seuls… « C’était un rituel, il a détruit ma vie », dit-il. Dans le cercle familial, personne ne se doutait de rien. Lorsqu’il est entendu par les gendarmes, le patron avouera d’emblée. Il livrera même de son propre chef le prénom d’une autre de ses victimes. Il s’agit cette fois du fils d’une « amie », mère célibataire également. « Je lui ai fait une confiance totale et je m’en veux encore. Quand la gendarmerie m’a appelée, le monde s’est écroulé », témoigne-t-elle devant le tribunal. Son fils était âgé de 12 ans à l’époque. Et lorsqu’il s’endormait, le prévenu en profitait pour le caresser. Et prendre son sexe en photo. Une quarantaine de ces clichés « abjects » seront retrouvés sur son ordinateur, avec d’autres images pédopornographiques, certains d’enfants âgés de seulement trois ans ! Ces photos, l’homme les qualifiera de « trophées ». Et il assume ce mot devant le tribunal.

En revanche, sans les nier, il revient peu sur les faits malgré les interrogations de la présidente, Geneviève Boussaguet, et de la procureur, Émilie Passier. L’homme parle de lui et… de lui. De son enfance durant laquelle il aurait été violé par un camarade au collège, de sa famille « dans laquelle on garde tout pour soi », de sa psychothérapie beaucoup. « J’étais malade, je n’ai pas contrôlé mes démons. Aujourd’hui, j’ai ouvert les yeux », dit-il le regard pourtant baissé vers ses chaussures. ace à l’une des victimes, âgé aujourd’hui de 19 ans, il lance : « J’espère que tu t’en remettras, il faut parler ». Le jeune homme pleure. Puis, le prévenu reprend la parole, d’une voix basse : « Sans cette plainte, il y aurait eu une troisième victime ».

« On ne peut s’empêcher de penser qu’il y en a eu d’autres ! », reprend Me Cordeiro, conseil de la mère de la deuxième victime. « Vous séduisiez des femmes seules, dans des moments vulnérables, pour vous en prendre à leurs enfants », avait pointé du doigt la juge lors des débats. Avant de condamner le prévenu à quatre ans de prison ferme. Et un suivi sociojudiciaire pour la même durée à sa sortie de prison : obligation de soins, interdiction d’entrer en contact avec les victimes, d’exercer un métier en contact avec les mineurs.

L’ombre d’un « ami »

Interrogé par le tribunal sur les raisons de son passage à l’acte, le quadragénaire condamné a souvent cité « le suicide d’un ami » lors de l’audience. Un « ami » qu’il fréquentait dans un club de moto du Sévéragais et qui, comme le tribunal n’a pas manqué de préciser, était lui aussi impliqué dans une affaire d’agressions sexuelles sur un jeune homme à Séverac-d’Aveyron… Un mineur qui n’était autre que le beau-fils du prévenu à l’époque des faits !
 

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