Problème de recrutement dans la restauration en Aveyron : "On court à la catastrophe"

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  • Michel Santos, président de l'Umih Aveyron.
    Michel Santos, président de l'Umih Aveyron. Centre Presse - José A. Torres
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C'est devenu presque banal. Tous les jours, ou presque, des annonces fleurissent sur les devantures ou bien sur internet : "restaurant cherche collaborateur". On n'y prête même plus attention. Pourtant, "l'heure est grave", selon Michel Santos, président de l'Umih (Union des métiers et des industries de l'hôtellerie) dans le département. "On court à la catastrophe", ne cache-t-il pas, alors qu'il ne sait plus quoi répondre aux appels de confrères désespérés devant ce manque de main-d’œuvre. Dans un entretien à Centre Presse, le restaurateur ruthénois tire la sonnette d'alarme.

La saison estivale débute, le manque de main-d’œuvre dans votre secteur vous inquiète-t-il ?

Bien entendu, c'est de pire en pire. Je n'ai jamais vu ça. Cela fait plusieurs semaines que je tire la sonnette d'alarme auprès des pouvoirs publics car on court à la catastrophe et on ne pourra pas accueillir nos clients comme il se doit. La France vit du tourisme et beaucoup d'établissements seront contraints de fermer un voire deux jours par semaine pour pallier ce manque de main-d’œuvre. Quelle image renvoie-t-on aux vacanciers, nous le pays de la gastronomie où nous ne sommes même pas capables d'ouvrir 7/7 et où il faudra certainement faire 30km pour trouver un restaurant traditionnel ouvert ? C'est la pire des saisons qui s'annonce !

Les "saisonniers" aussi se font-ils de plus en plus rares ?

C'est fini le temps où l'on trouvait des jeunes à chaque coin de rue. En service, c'est devenu impossible. Je me pose la question de savoir ce que font ces jeunes aujourd'hui ? Car tous les secteurs cherchent du personnel. Nous, dans la restauration, on n'a cessé de faire des efforts mais même cela ne suffit pas.

Les salaires et les horaires sont souvent pointés du doigt dans la restauration...

On souffre encore de cette image où l'on travaille 60 heures par semaine pour pas grand-chose. Mais c'est totalement désuet. Désormais, nos serveurs ont des week-ends, on fait tout pour qu'ils ne travaillent pas trop en "coupé". Quant aux salaires, en avril dernier, on a accordé une revalorisation de 16% : quel autre secteur a fait cela ? Les salaires sont gelés partout, nous, on augmente et on paie les heures supplémentaires ! Aujourd'hui, on peut commencer le métier à 1600€ net et ça va jusqu'à 3000€ net en Aveyron, sans compter les pourboires... Avec cela, on vit bien chez nous quand même.

Comment expliquer le manque de main-d’œuvre dans ce cas ? Est-ce dû à la crise Covid ?

Avec les fermetures de notre cher ministre Olivier Véran, plusieurs employés se sont tournés vers d'autres métiers, c'est vrai. Mais beaucoup sont revenus. Le problème, selon moi, est plus global. Récemment encore, j'ai un salarié qui m'a clairement indiqué qu'il pouvait bien gagner sa vie en étant au chômage et en faisant quelques services "au black" dans le mois... Que peut-on répondre à cela ? C'est au gouvernement de trouver des solutions car le problème n'est pas que pour la restauration. Il est le même dans le bâtiment et les services de l'Etat ont, eux également, du mal à recruter.

Le problème dans notre secteur, c'est que le problème n'est que français. Si vous allez en Espagne, au Portugal ou en Italie, les établissements sont ouverts 7/7 et tous tournent avec plusieurs employés. Le risque, c'est que les touristes se dirigent de plus en plus vers ces pays et je peux les comprendre !

Au niveau de l'Umih, des solutions ont-elles été trouvées ?

Pour cet été, on a élaboré un partenariat avec la Tunisie. L'activité n'a pas totalement repris là-bas donc nous ferons venir 4 000 personnes pour travailler. Mais même cela, ce n'est pas suffisant. Il nous faudrait bien plus de monde... Ce n'est qu'une solution pansement.

On constate néanmoins que l'activité a particulièrement bien repris depuis la sortie de crise Covid. Partagez-vous ce constat ?

Oui, cela a très bien repris. 

La casse annoncée a donc été évitée ?

On doit reconnaître que notre secteur a été très bien aidé. Cela ne fut pas pareil dans tous les pays... Même si nous aurions préféré rester ouverts sans ces aides.

L'inquiétude était notamment forte sur les établissements de nuit. Preuve en est que l'activité y a bien repris également...

Les deux branches de nos métiers les plus impactés par la crise sont les traiteurs et les discothèques. Et cela va mieux. Même si les boîtes sont désormais confrontées à un nouveau problème avec le phénomène des piqûres. Nous travaillons à renforcer la sécurité en espérant que cela disparaisse au plus vite...

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