Rébellion de Wagner en Russie : chef de mafia, ancien cuisinier... qui est Evgueni Prigojine qui se rêve en président ?

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  • Rien ne destinait Evgueni Prigojine à mener, un jour, une tentative de putsch sur la capitale russe.
    Rien ne destinait Evgueni Prigojine à mener, un jour, une tentative de putsch sur la capitale russe. MaxPPP
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De notre correspondant à Moscou, Paul Gogo

Au cœur d’une tentative de déstabilisation du pouvoir, l’ancien cuisinier de Vladimir Poutine s’est lui-même attribué le rôle de patriote en chef.

Il fut longtemps surnommé “le cuisinier de Poutine”. Et pour cause : Evgueni Prigojine était le titulaire, depuis l’arrivée de Vladimir Poutine au pouvoir, du contrat public le plus prestigieux du pays : celui qui consistait à nourrir le président.
Depuis vendredi, les deux hommes sont en guerre ouverte, bien malin qui sait qui nourrit Vladimir Poutine de nos jours… Certainement plus Prigojine.

Pourtant, les deux hommes ont longtemps été proches, le chef de la milice Wagner fait même partie de la bande officieuse dite “de Saint-Pétersbourg”, ces hommes qui ont aidé Vladimir Poutine à accéder au pouvoir. En échange, lui comme les autres, ont bénéficié des avantages en roubles qu’apporte un soutien au président russe. Rien ne destinait Evgueni Prigojine à mener, un jour, une tentative de putsch sur la capitale russe. Celui qui se destinait à devenir skieur de fond professionnel est né en 1961 dans la capitale du nord alors appelée Leningrad. C’est finalement dans les geôles soviétiques qu’il a commencé sa “carrière”, après une série de larcins, des vols et cambriolages, réalisés dans les années 1980. La fin de l’URSS lui permettra de ne pas purger ses 13 ans de prison et de pouvoir se jeter rapidement dans l’anarchie des années 1990 durant lesquelles tout était possible, dans le respect des mafias.

Lui s’est lancé dans la restauration : hot-dog, crêpes, puis rapidement, restaurant de luxe, le tout dans un style de mafieux. Il garde aujourd’hui encore cette attitude, il sait se montrer drôle et séduisant quand nécessaire, impitoyable à broyer des crânes à la masse lorsque ses business sont mis en danger ou qu’un employé s’écarte de la ligne de son entreprise.

Lancé dans la guerre informationnelle

Dans les années 1990, il ne lui a fallu que quelques années pour passer de la prison à restaurateur officiel du Kremlin lors des visites de délégations étrangères. Prigojine a ainsi rencontré Jacques Chirac ou encore Georges Bush, en jouant le serveur zélé. Poussé par Vladimir Poutine, il s’est ensuite lancé dans le business de la guerre informationnelle. Avec ses usines à désinformer, il pollue le web mondial de sa propagande pro Kremlin depuis 2013. Au point, assure-t-il, d’avoir pesé sur les différentes élections américaines, même si les concernés démentent une telle influence.

À la guerre de l’information, il a pour autant vite préféré celle du terrain, militaire et plus lucrative. En créant sa société de mercenariat “Wagner”, il s’est ouvert une manne financière, discrètement financée par le Kremlin. En Syrie et dans plusieurs pays africains, ses milices se démarquent par leurs pillages et crimes de guerre. Prigojine, avec sa milice, s’octroie les ressources des pays et gagne en influence. Mais c’est en Ukraine, où tout a commencé, qu’il a trouvé le meilleur moyen de se construire une aura politique. En faisant mieux que l’armée russe sur le terrain, tout en dénonçant la faiblesse des élites russes, affaiblies par la corruption, il s’est auto attribué le titre de patriote en chef, jusqu’à faire de l’ombre au ministre de la Défense Sergueï Choïgou, devenu son adversaire. Pire, pour Vladimir Poutine, ce loup qui a pris le dessus sur les autres souhaite désormais se lancer dans un duel à mort contre lui. Toujours dans l’esprit d’un mafieux, connaissant la réalité du terrain ukrainien, Prigojine semble avoir détecté une faiblesse chez ses adversaires au Kremlin, fragilisés par une guerre mal menée. Ambitieux et désireux de contrôler à la source ses ressources financières, il n’aura donc pas pu s’empêcher d’essayer de voler le Kremlin à Vladimir Poutine.

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