Enlevé et torturé à Capdenac sur fond de trafic de stupéfiants : cinq ans de prison

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  • De nombreux militaires avaient été déployés entre Capdenac et Boisse-Penchot pour retrouver le jeune homme enlevé.
    De nombreux militaires avaient été déployés entre Capdenac et Boisse-Penchot pour retrouver le jeune homme enlevé. Archives - BHSP
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Un Ruthénois de 27 ans a été condamné pour l'enlèvement, la séquestration et les actes de violence d'un autre homme à Capdenac-Gare en 2021. Une affaire de règlement de compte sous fond de trafic de stupéfiants.

Dans l’impitoyable univers du trafic de stupéfiants, la fiction se mélange bien trop souvent à la réalité. L’actualité récente, de Nîmes à Marseille, le prouve. Les règlements de compte, toujours plus nombreux, ont souvent des allures de films de gangsters… Et si l’Aveyron peut paraître loin de tout cela, il n’échappe pas à la règle et aux codes d’un monde particulièrement violent.

Le 10 novembre 2021, à Capdenac-Gare, une jeune femme se fait appréhender dans la rue par trois hommes. Ils sont déguisés en policiers, portent un brassard siglé et se disent « de la BRI de Toulouse ». Ils veulent savoir où se trouve son compagnon. Elle ne dira rien, malgré une arme pointée sur sa tempe. Ils retrouveront néanmoins la trace du conjoint quelques minutes plus tard en bas de son domicile. Cette fois, les présentations sont écourtées. Il est entravé aux mains, aux chevilles, bâillonné et jeté dans une fourgonnette blanche.

Il est 14 h 30 et sa compagne donne l’alerte à la gendarmerie. Des recherches sont lancées et de grands moyens sont déployés. On retrouvera trace cinq heures plus tard du jeune homme. Il est nu, présente des traces de coups sur tout le corps. Il s’est réfugié chez une commerçante de Boisse-Penchot. Il explique alors avoir été enlevé, séquestré, torturé. Parmi la longue liste de sévices : des coups de marteau, des aiguilles chauffées à blanc plantées sur tout le corps, des brûlures, la tentative de percer son genou avec… une perceuse. Tout cela avec une arme pointée sur lui.

« Il parle trop, beaucoup trop »

Une enquête est rapidement ouverte et confiée au pôle criminel de Montpellier. Que lui voulait-on ? Selon ses dires, cela serait en rapport avec un trafic de stupéfiants ruthénois dans lequel son frère a été condamné quelques jours auparavant… « Il parle trop, beaucoup trop ! », lui auraient lancé ses agresseurs. Ces derniers réclament aussi une dette de 400 000 €. Ils ne repartiront finalement qu’avec 3 000 € en liquide, présents dans la sacoche de la victime… De l’argent lié à un trafic ? Non, assure-t-il.

En attendant, les enquêteurs piétinent pour retrouver ses agresseurs. Ces derniers étaient cagoulés et la victime décrira seulement « un Européen aux cheveux grisonnants » et « un rebeu avec l’accent ». L’enquête se concentre alors sur le fourgon. Celui-ci a été loué quelques jours plus tôt par une jeune ruthénoise. Son entourage est sondé et un nom ressort : celui d’un de ses amis, connu dans le quartier de Ramadier. Son portrait est montré à la victime : il le reconnaît. La jeune femme, locataire du fourgon, abonde dans ce sens. « Je me suis faite pigeonner, je lui ai prêté le fourgon », avoue-t-elle. L’homme est placé en détention. Hier, il comparaissait pour ces faits, passibles d’une présentation devant la cour d’assises.

Âgé de 27 ans, il compte plusieurs condamnations pour usage de stupéfiants et violences. Lors de la perquisition à son domicile, les forces de l’ordre ont retrouvé 12 grammes de cocaïne, 1 000 € en liquides, plusieurs téléphones, une balance, une machette… Pourtant, depuis son incarcération à Nîmes dans le cadre de cette affaire, il jure « n’avoir rien à voir avec ! ». Il a nié sa participation dans le commando hier encore face à la juge Geneviève Boussaguet. « On était à l’école ensemble à Rodez avec la victime. Et ça me fait mal ce qui lui est arrivé, cela aurait pu être mon frère. C’est de la barbarie mais je n’ai rien à voir avec cela. Je n’ai pas besoin d’argent sale », explique-t-il, tout en précisant qu’il avait créé sa société dans le bâtiment avec son frère lors de cette période.

« Le seul regret, c’est de ne pas avoir retrouvé les autres »

Pour l’accusation, représentée par Émilie Passier, tout concorde en revanche : son téléphone a borné à Capdenac-Gare la veille des faits, des messages envoyés dans lesquels il appelle sa conjointe « à se taire », son refus de communiquer les codes de son téléphone en garde à vue, l’argent retrouvé chez lui « qui, si on le divise par trois, le nombre d’agresseurs, correspond à l’argent volé… » Cinq ans ont été requis à son encontre. Le tribunal a suivi ces réquisitions. Tout en interdisant au prévenu de paraître en Aveyron durant autant d’années lors de sa sortie de prison. « La violence dans le trafic de stupéfiants devient surréaliste dans notre pays. Mais il faut faire attention à ne pas attraper le premier venu et en faire un coupable idéal. Car j’ai tout l’impression que ça l’est et qu’il porte le chapeau pour d’autres », avait plaidé son conseil du barreau de Montpellier.

« Le seul regret dans ce dossier, c’est de ne pas avoir retrouvé la trace des deux autres agresseurs », a pour sa part souligné la substitut du procureur. Les victimes étaient, elles, absentes de l’audience. « Elles n’osent plus sortir », a expliqué leur avocate, Me Cécilia Fraudet.

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