"Il y a des personnes qui ont vraiment besoin de nous" : les pompiers refusent de prendre en charge une adolescente qui va décéder
Après 30 minutes passées au domicile d'Aïcha, ils décrètent que l'adolescente de 13 ans simule un malaise et repartent. Elle faisait une hémorragie cérébrale. Une nouvelle affaire de "syndrome méditerranéen" ?
Les faits se sont déroulés le 20 juin dernier à Paris, mais Médiapart a révélé l'affaire ce dimanche 3 décembre. Aïcha, 13 ans, est subitement prise de malaise, avec difficulté à rester consciente, du mal à parler, le regard à la dérive... Inquiets, ses parents appellent le 18 et les pompiers arrivent peu de temps après. C'est là que tout bascule, raconte La Dépêche du Midi citant l'enquête de Médiapart : les deux pompiers vont passer 30 minutes auprès de l'adolescente semi-consciente pour finalement décréter qu'elle simule. Cette conversation audio a été enregistrée :"Vous voyez, elle force pour garder les yeux fermés", "elle tient la main de mon collègue (...) elle n'est pas inconsciente", lance l'un des pompiers qui finalement ne prendront pas en charge Aïcha, rangeant l'inquiétude de sa mère Mariama sur le "côté maternel" et la "fierté".
Trois pompiers ont passé 30min à décréter qu’Aïcha, 13 ans, simulait un malaise. Ils sont partis en laissant sa famille en détresse.
— David Perrotin (@davidperrotin) December 3, 2023
Elle est finalement décédée à l’hôpital d’une hémorragie cérébrale.
Mediapart révèle l’enregistrement de l’intervention. \u27a1\ufe0fhttps://t.co/w0jig5xTbt pic.twitter.com/rPRWJPHikM
Ce sont finalement les parents d'Aïcha qui amèneront eux-mêmes leur fille aux urgences de l'hôpital où elle décèdera, quelques jours plus tard, d'une hémorragie cérébrale.
"Secret professionnel"
Depuis sa parution sur Médiapart, l'histoire d'Aïcha a agité les réseaux sociaux plus que la préfecture de Paris, en charge des pompiers de Paris, ou d'autres autorités supérieures. L'enquête du journaliste révèle que les pompiers qui sont intervenus au domicile d'Aïcha n'ont depuis été ni convoqués, ni sanctionnés, ni mis à pied par leur hiérarchie, et ne se sont pas expliqués. Le Préfecture brandit le "secret professionnel" pour ne délivrer ni informations, ni explications, notamment sur "l'état de santé de la victime au moment de l'intervention".
Interrogé brièvement sur le cas d'Aïcha lors de l'émission C à vous sur France 5 ce lundi 4 décembre, Bruno Le Maire, le ministre de l'Economie, ce dernier a répondu qu'il fallait attendre les résultats d'une enquête... qui n'a pas encore été ouverte.
Le "syndrome méditerranéen" ?
Parmi les nombreuses réactions sur les réseaux sociaux à propos de cette dramatique affaire apparaît l'expression de "syndrome méditerranéen". Selon Wikipédia, ce terme désigne "un stéréotype culturel à dimension raciale du monde médical, consistant pour les professionnels soignants à considérer que les personnes nord-africaines, noires, ou d'autres minorités vivant autour de la Méditerranée exagèrent leurs symptômes et leurs douleurs, ce qui entraine une défaillance de la prise en charge médicale de ces populations". Ce syndrome méditerranéen, existant dans de nombreux pays occidentaux sous des appellations similaires et décrit depuis la Seconde guerre mondiale, n'a été enseigné en France au cours des études médicales qu'en 2022.
Le cas de Naomi Musenga, une jeune femme de Strasbourg de 22 ans moquée par des opératrices du Samu au cours d'une conversation téléphonique interminable, qui décèdera d'un infarctus et d'un accident vasculaire abdominal 5 heures après cet appel, a été souvent imputé à ce syndrome méditerranéen.
J'ai déjà un compte
Je me connecteVous souhaitez suivre ce fil de discussion ?
Suivre ce filSouhaitez-vous recevoir une notification lors de la réponse d’un(e) internaute à votre commentaire ?