TDAH : faut-il craindre les effets du traitement ?

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    TDAH : faut-il craindre les effets du traitement ?
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Destination Santé

Une étude parue dans The Lancet révèle que le traitement du "trouble déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité", ou TDAH, est souvent arrêté trop tôt. Qu’en pense le Dr Thiébaut-Noël Willig, pédiatre spécialisé dans les troubles du neurodéveloppement et membre de la Société française du trouble déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité ?

Le trouble déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH) est un trouble du neurodéveloppement qui apparaît durant l’enfance. Il se caractérise par l’association de trois symptômes dont l’intensité est variable : un déficit attentionnel, une hyperactivité motrice et une impulsivité. Selon les chiffres d’Ameli.fr, le TDAH concernerait 5,9 % des moins de 18 ans et 2,8 % des adultes. Le méthylphénidate (Ritaline, etc.), un stimulant du système nerveux central, est à ce jour le seul traitement disponible en pharmacie pour les personnes TDAH. Il a pour objectif d’améliorer la concentration, les capacités d’attention et le niveau d’éveil. Ce traitement pharmacologique fait partie d’une prise en charge globale.

Une étude internationale vient de conclure que l’arrêt précoce des traitements du trouble "déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité" (TDAH) est trop fréquent. Qu’en pensez-vous ?

Dr Thiébaut-Noël Willig: Tout d’abord, elle souligne les différences notables dans les habitudes de prescription entre les pays. Aux États-Unis, le taux d’abandon initial du traitement est élevé, atteignant 50 % au cours de la première année. En revanche, dans d’autres pays occidentaux tels que le Danemark, l’Irlande et le Royaume-Uni, le taux d’arrêt est beaucoup plus bas, autour de 10 %. Cette disparité est probablement due à une sur-prescription aux États-Unis, ou des prescriptions non justifiées qui conduisent à arrêter rapidement le traitement, faute d’amélioration, voire aussi une couverture d’assurance mutuelle insuffisante.

Un deuxième aspect soulevé par cette étude concerne l’observance (le bon suivi du traitement) chez les enfants et les pré-adolescents. Environ 65 % des enfants ont une bonne observance du traitement pendant plusieurs années. Cependant, une rupture de parcours peut survenir au moment du passage à l’âge adulte.

Les données en France sont rares, mais a-t-on quelques indices ?

Nos données en cours d’analyse dans la région Occitanie suggèrent un faible taux d’arrêt chez les enfants, avec une amélioration de l’accès au traitement. Plus on est âgé, plus on a tendance à l’arrêter, avec moins d’arrêts chez les enfants et plus chez les adolescents. L’adhésion au traitement chez les adultes est plus irrégulière, avec davantage d’abandons, car peut-être vécu comme une contrainte imposée.

L’arrêt précoce peut être aussi dû aux nombreuses interrogations autour du traitement du TDAH. Quelle est l’attitude des familles ?

C’est un équilibre délicat entre des idées préconçues, dont certaines peuvent émaner du monde médical lui-même, pharmaciens comme médecins. Lorsqu’on annonce un diagnostic et la possibilité d’un traitement chez un enfant, il est essentiel de prendre le temps d’y réfléchir, d’en discuter, sans pression, en présentant les avantages et les effets indésirables. Dans l’ensemble, la majorité des parents accepte quasiment d’emblée la possibilité d’un traitement. 15 à 20 % des familles peuvent être réticentes au premier abord. Mais un certain nombre de familles réticentes reviennent après plusieurs mois, voire années, face à des situations qui se sont dégradées. Il faut savoir que le méthylphénidate offre une très bonne efficacité, chez environ 85 à 90 % des personnes sous traitement.

Face aux idées préconçues sur le méthylphénidate, quel message souhaitez-vous transmettre ?

Le traitement du TDAH, notamment avec le méthylphénidate, est relativement simple à prescrire par rapport à d’autres médicaments plus complexes, tels que les antidépresseurs, les neuroleptiques ou les anxiolytiques, qui présentent des effets indésirables plus importants et des risques de dépendance.

Bien qu’il soit classé comme stupéfiant (pour ses propriétés psychostimulantes, ndlr), le méthylphénidate ne présente pas de risques de dépendance ni d’épuisement de son efficacité à long terme. Il peut être administré de manière intermittente, d’où une flexibilité appréciable, sans risque de dégradation de l’état de la personne si le traitement est interrompu et repris ultérieurement.

N’y a-t-il pas de risque de dégradation de l’état en cas d’arrêt ?

Non, car l’efficacité du méthylphénidate est généralement observée en mode "on-off" une fois que la posologie optimale a été atteinte de manière progressive : l’effet sur les symptômes est présent les jours où le traitement est pris, et les symptômes sont présents en fin de dose ou en l’absence de traitement. Le traitement suspend les symptômes au quotidien. Les effets s’estompent entre 8 et 12 heures après la prise, nécessitant une administration quotidienne.

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