Etats-Unis: une nouvelle exécution par injection létale reportée

  • La Cour Suprême des Etats-Unis à Washington
    La Cour Suprême des Etats-Unis à Washington AFP/Archives - Saul Loeb
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AFP

La Cour suprême américaine a reporté mercredi soir à quelques heures de la fin du compte à rebours une injection létale prévue dans le Missouri, la troisième depuis la longue agonie d'un condamné à mort qui avait choqué le pays fin avril.

Intervenant pour la première fois dans la controverse qui agite les Etats-Unis, la plus haute juridiction américaine a reporté l'exécution de Russell Bucklew, condamné à mort pour le meurtre en 1996 de son rival amoureux et le viol de son ancienne compagne.

Au moment où le pays s'interroge sur le bien fondé de l'injection létale comme méthode de mise à mort, la Haute Cour a préféré, dans son bref arrêt, renvoyer le sujet devant une cour d'appel fédérale, plutôt que de se saisir immédiatement de la polémique et trancher sur la constitutionnalité des exécutions par intraveineuse.

Au début des années 80, cette méthode d'exécution avait été généralisée à l'ensemble des 32 Etats américains pratiquant encore la peine capitale. En 1976, la Cour suprême l'avait jugée conforme au 8e Amendement de la Constitution qui interdit les "châtiments cruels et inhabituels".

Mais depuis que les fabricants européens refusent de leur fournir des barbituriques à des fins d'exécutions humaines, les Etats américains ont adopté de nouveaux produits pour faire face à la pénurie, forçant la justice à se prononcer à nouveau tôt ou tard.

Aux quatre coins du pays, les recours judiciaires se multiplient pour contester l'origine des nouveaux barbituriques, le secret qui les entoure et les souffrances inconstitutionnelles que les condamnés risquent d'endurer.

La polémique a atteint son summum le 29 avril en Oklahoma, lorsque Clayton Lockett a succombé dans d'apparentes souffrances 43 minutes après l'injection d'un nouveau cocktail létal, contre une dizaine de minutes habituellement.

Cette exécution avait soulevé des protestations jusqu'à la Maison Blanche, où Barack Obama l'avait qualifiée de "profondément dérangeante". Le président américain en avait profité pour appeler à une révision complète des procédures d'injection létale dans le pays.

- Provenance des barbituriques -

Dans la confusion, les deux exécutions prévues après celle de Lockett avaient été reportées, en Oklahoma et au Texas, un moratoire de six mois avait été décrété en Oklahoma, le temps de revoir ses procédures, et le New Hampshire envisageait de devenir le 19e Etat à abolir la peine capitale.

Troisième sur la liste, l'exécution de M. Bucklew se trouve à son tour reportée. Elle devait utiliser du pentobarbital fabriqué par un préparateur en pharmacie, non homologué au niveau fédéral, dont le Missouri refuse de dévoiler le nom.

Dans ses ultimes suppliques, M. Bucklew, qui souffre de tumeurs vasculaires et de troubles circulatoires héréditaires, affirmait qu'une exécution par injection lui ferait endurer les mêmes souffrances que Clayton Lockett.

Il implorait la Haute Cour de se pencher sur son cas, arguant des souffrances contraires à la Constitution qu'il risque de subir. "Ce qui pourrait être constitutionnel pour un prisonnier peut constituer un risque grave et même une torture pour un autre", plaidait son avocate Cheryl Pilate dans son recours.

A l'instar de plusieurs condamnés à mort avant lui, en particulier ceux dont l'exécution était programmée, M. Bucklew conteste en outre la règle du secret sur la provenance des barbituriques.

"Pour envisager des méthodes alternatives d'exécution, un prisonnier doit pouvoir obtenir des renseignements de l'Etat du Missouri sur les produits qui doivent être utilisés, leur origine et les ingrédients qui les composent, des informations que l'Etat s'obstine à cacher comme s'il s'agissait de +secrets d'Etat+", selon Cheryl Pilate.

Les avocats du condamné se sont dits "extrêmement satisfaits et soulagés" de la décision de la Cour suprême. "Le sursis d'aujourd'hui donnera du temps aux tribunaux inférieurs pour examiner la plainte de M. Bucklew, selon laquelle son exécution violerait ses droits en vertu du 8e Amendement à se voir épargner un châtiment cruel et inhabituel", a déclaré Me Pilate dans un communiqué.

Malgré la polémique, une majorité de 59% des Américains reste favorable à la peine capitale. Mais selon un récent sondage, les deux tiers prônent une autre méthode d'exécution que l'injection létale, comme la chaise électrique, la chambre à gaz ou le peloton d'exécution.

Source : AFP

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