Irak: Fuyant les batailles, des réfugiés redoutent aussi les privations

  • Un camp de tentes pour accueillir les réfugiés-déplacés, monté par le HCR à Aski Kalak, à 40 kilomètres à l'ouest d'Arbil dans la région autonome du Kurdistan, le 17 juin 2014
    Un camp de tentes pour accueillir les réfugiés-déplacés, monté par le HCR à Aski Kalak, à 40 kilomètres à l'ouest d'Arbil dans la région autonome du Kurdistan, le 17 juin 2014 AFP - Karim Sahib
  • Des enfants dorment sous une tente érigée par le HCR pour accueillir les familles chassées par la violence dans le nord de l'Irak, à Aski Palak, le 12 juin 2014
    Des enfants dorment sous une tente érigée par le HCR pour accueillir les familles chassées par la violence dans le nord de l'Irak, à Aski Palak, le 12 juin 2014 AFP/Archives - Safin Hamed
  • Une mère qui fait partie des milliers de personnes ayant fui les violences du nord de l'Irak tente de laver son enfant au camp de réfugiés d'Aski Palak, près d'Arbil, le 13 juin 2014
    Une mère qui fait partie des milliers de personnes ayant fui les violences du nord de l'Irak tente de laver son enfant au camp de réfugiés d'Aski Palak, près d'Arbil, le 13 juin 2014 AFP/Archives - Safin Hamed
  • A Aski Kalak, à 40 kilomètres d'Arbil dans la zone autonome du Kurdistan irakien, des enfants dont les familles ont été déplacées tentent de se distraire sous une tente du HCR, le 17 juin 2014
    A Aski Kalak, à 40 kilomètres d'Arbil dans la zone autonome du Kurdistan irakien, des enfants dont les familles ont été déplacées tentent de se distraire sous une tente du HCR, le 17 juin 2014 AFP - Karim Sahib
  • Déplacées par la violence qui s'est emparée du nord de l'Irak, ces femmes s'enregistrent dans un camp de réfugiés à Aski Kalak, à 40 kilomètres d'Arbil dans la région autonome kurde, le 17 juin 2014
    Déplacées par la violence qui s'est emparée du nord de l'Irak, ces femmes s'enregistrent dans un camp de réfugiés à Aski Kalak, à 40 kilomètres d'Arbil dans la région autonome kurde, le 17 juin 2014 AFP - Karim Sahib
Publié le
AFP

Sur un terrain poussiéreux au bord d'une grande route dans le nord de l'Irak, Faiçal regarde son fils de trois semaines pleurer sous la tente qui lui sert désormais de maison.

La température tourne autour des 40°C, et la tente de Faiçal n'a pas encore reçu l'aide, dont des matelas et des ventilateurs, distribuée dans le camp.

Il a amené sa famille ici il y a quelques jours, fuyant la ville stratégique et majoritairement chiite de Tal-Afar, entre Mossoul et la frontière syrienne, où l'armée tente encore de résister à l'assaut des insurgés sunnites.

"Nous sommes partis après leur arrivée. Je suis sunnite, mais je savais qu'il fallait se battre et tuer, et je ne voulais faire ni l'un ni l'autre", explique-t-il, les pieds nus couverts de poussière.

Mohamed, un autre déplacé de 25 ans,se tient debout à côté de lui. Il a fui Mossoul, deuxième ville du pays et premier succès majeur de l'offensive des insurgés lancée au début du mois.

- Les tatouages sont mal vus -

"Ils sont venus me voir et m'ont dit que même si j'étais musulman, je devais leur jurer fidélité et aller à la mosquée pour proclamer de nouveau ma foi !", s'exclame-t-il.

"Ils me considèrent comme un infidèle", ajoute-t-il en montrant les tatouages sur ses bras, que les jihadistes radicaux considèrent comme une violation de la loi islamique.

Mohamed a décidé de partir sur-le-champ, avec sa femme Ghajar et Myriam, leur bébé de 10 mois.

Leur camp se trouve juste à la limite de la région autonome du Kurdistan, où les non-résidents ne peuvent pénétrer sans un laisser-passer.

Ces permis sont accordés largement ces jours-ci aux personnes fuyant l'offensive des insurgés, en particulier les minorités comme les chrétiens.

Mais les sunnites doivent trouver quelqu'un en territoire kurde pour parrainer leur demande, et beaucoup comme Faiçal et Mohamed n'y parviennent pas.

Tous les deux sont heureux d'être en sécurité, mais répètent que les conditions de vie sont rudes dans le camp parcouru de tourbillons de poussière qui font voler de vieilles bouteilles en plastique au-dessus des enfants désœuvrés errant entre les tentes.

"Cela fait deux jours que nous sommes là, et nous devons attendre d'être inscrits sur les listes pour pouvoir recevoir de l'aide", explique Faiçal avant de se joindre, plein d'espoir, à des voisins qui se dirigent vers une distribution d'aide.

- Des rebelles, pas des bandits -

Non loin, Paysan Youssef, une volontaire de 19 ans, passe de tente en tente pour inscrire leurs occupants et distribuer des coupons d'aide. Autour d'elle, une foule d'hommes en colère l'accuse de ne pas aller suffisamment vite.

"Je fais de mon mieux, regardez la liste. J'essaye juste de faire mon travail", se défend-t-elle tant bien que mal.

Les Kurdes irakiens ont souffert sous la dictature de Saddam Hussein, mais Paysan l'assure, elle ne ressent aucune amertume à l'encontre des sunnites. "Moi même je suis une réfugiée", avoue-t-elle dans un rire. "Je suis Kurde de Syrie, de la ville de Qamishli, que j'ai quittée à cause des combats. Alors je sais ce qu'ils ressentent".

Un peu plus loin sur la route qui mène à Erbil, la capitale du Kurdistan irakien, les voitures s'amassent devant un point de passage gardé par les forces de sécurité kurdes, les Peshmergas.

"Nous protégeons les zones kurdes, et nous faisons particulièrement attention aux Arabes", explique Nechirvan Jazah, 24 ans, en vérifiant les papiers d'un conducteur. "Ils ne peuvent pas entrer sans autorisation et quelqu'un qui les parraine au Kurdistan".

A côté, des centaines d'Arabes irakiens attendent, implorant, d'entrer.

Nombreux sont ceux qui, comme Faiçal et Mohamed, ont fui les insurgés. Mais certains avouent sans mal être heureux de l'arrivée des jihadistes et de leurs alliés.

"Les hommes armés à Mossoul sont corrects, ils traitent bien les habitants", raconte une femme qui souhaite se faire appeler "Oum Abdallah", ou "la mère d'Abdallah".

"Ce n'est pas à cause d'eux que nous partons, nous partons parce le gouvernement bombarde Mossoul, et a coupé l'eau et l'électricité", ajoute-t-elle, couverte d'un niqab.

"Honnêtement, je suis heureuse qu'ils aient pris Mossoul. Pour moi, ce sont des rebelles, pas des bandits".

Source : AFP

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