En France, le "modèle" Merkel attire autant qu'il repousse

  • François Hollande et Angela Merkel au sommet Europe-Asie à Milan, le 16 octobre 2014
    François Hollande et Angela Merkel au sommet Europe-Asie à Milan, le 16 octobre 2014 AFP/Archives - Olivier Morin
  • La chancelière allemande Angela Merkel entourée du président français François Hollande et du ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius, le 16 octobre 2014 à Milan
    La chancelière allemande Angela Merkel entourée du président français François Hollande et du ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius, le 16 octobre 2014 à Milan AFP/Archives - Giuseppe Cacace
  • Le Premier ministre français Manuel Valls et la chancelière allemande Angela Merkel à Berlin, 22 septembre 2014
    Le Premier ministre français Manuel Valls et la chancelière allemande Angela Merkel à Berlin, 22 septembre 2014 AFP/Archives - Odd Andersen
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Centre Presse Aveyron

La chancelière allemande Angela Merkel, triomphalement réélue à la tête de son parti et gardienne de l'Europe, suscite autant d'attirance que de rejet en France, où son "modèle" de coalition peine à trouver une traduction.

Très loin du "Ferme-la" adressé avec fracas par Jean-Luc Mélenchon sur Twitter à Mme Merkel, excédé par ses demandes de réformes pour libéraliser le pays, 72% des Français disent avoir une "bonne opinion" de l'austère chancelière, selon un sondage Ifop JDD diffusé dimanche.

Présidente du parti conservateur CDU depuis 14 ans, et à la tête de l'Allemagne depuis neuf, la popularité de Mme Merkel a de quoi faire pâlir d'envie son voisin socialiste François Hollande, dont la cote - malgré une remontée en fin d'année - se traîne autour de 20%.

"Les Français voient que l'Allemagne s'en sort bien sur le plan du chômage, et Mme Merkel offre une image sérieuse", souligne Hans Stark qui dirige le comité d'études franco-allemandes de l'Institut français des relations internationales (Ifri).

"Ce que les Français admirent en Allemagne, c'est par exemple le système de l'apprentissage", ajoute le journaliste Guillaume Duval, auteur de "Made in Germany, le modèle allemand au-delà des mythes" (Seuil).

Le prédécesseur de Mme Merkel, Gerhard Schröder, était "un pur produit de ce système": "apprenti vendeur de vaisselle sur les marchés à 15 ans, il a fini par devenir avocat pour terminer chancelier, une chose impensable en France", souligne M. Duval, par ailleurs très sévère sur la politique d'austérité impulsée notamment par l'Allemagne dans les pays du sud de l'Europe.

- Pas de germanophobie générale -

Contrairement à l'Italie ou la Grèce, "la France ne connaît pas de germanophobie générale", note M. Stark de l'Ifri, car la France n'a connu que des hausses d'impôts et pas les coupes de salaires et pensions appliquées dans ces pays: "On peut moins accuser l'Allemagne de dégradation des conditions de vie".

Exceptions notables, le dirigeant du parti de Gauche, Jean-Luc Mélenchon et la patronne du Front National, Marine Le Pen, pour laquelle la politique allemande conduira à "l'explosion de l'Union Européenne".

Jusqu'au tacle du Premier secrétaire du parti socialiste Jean-Christophe Cambadélis pour qui l'Histoire sera "sévère" avec la chancelière: "Mme Merkel a trop insisté sur l'équilibre budgétaire" en Europe, a-t-il dit dimanche, évoquant une "réalité allemande pas aussi belle que les médias nous le disent".

De fait, les Français établissent une nette distinction "entre le modèle économique de l'Allemagne qu'ils envient, et le modèle social dont ils ne veulent pas", résume Frédéric Dabi de l'institut Ifop, qui a réalisé le sondage dimanche.

Ainsi, pour 76% des sondés, l'Allemagne connaît des problèmes de bas salaire et de pauvreté: "Les Français ne voient absolument pas l'Allemagne comme pays de Cocagne", ajoute M. Dabi.

- Un modèle de coalition ? -

Sur le plan politique, les choses sont plus complexes. "J'ai l'impression qu'on aimerait bien en France avoir une union sacrée centriste, comme celle qui existe en Allemagne entre la CDU conservatrice et le SPD social-démocrate", relève M. Spark. Union qui a été imposée dans d'autres pays européens, comme la Grèce par exemple.

Il cite à l'appui l'ancien ministre socialiste des Affaires étrangères Hubert Védrine qui a appelé récemment à un rassemblement dépassant les clivages pour sortir de la crise.

L'ex-eurodéputé vert Dany Cohn-Bendit, élu en Allemagne puis en France, souhaite aussi une "coalition de transition" "à même de réformer la France". "Dans ses mémoires, Jacques Chirac regrette de ne pas avoir fait cette grande majorité quand il a gagné contre Jean-Marie Le Pen", relève-t-il dans Paris Match.

Mais la coalition allemande, fruit d'une longue tradition, a été négociée pendant des semaines avant la formation du gouvernement entre Mme Merkel et son opposant Sigmar Gabriel. Cet exercice, qui a abouti à l'introduction d'un salaire minimum et à des augmentations sur les pensions des femmes seules, reste inconnu en France.

"En France, les rassemblements, s'il y en a, se feront dans des triangulaires avec le Front national, mais on est encore très loin d'un rassemblement d'idées", tempère M. Stark.

Celui-ci prévient par ailleurs contre un "écueil" de la politique de consensus: "la montée de mouvements populistes" d'extrême droite et anti-immigration "qui se répandent en Allemagne".

Lundi, la chancelière a fermement condamné une manifestation de 15.000 personnes à Dresde (est) contre "l'islamisation" du pays. "Nous voulons que notre pays garde ses valeurs, se justifiait un manifestant. Est-ce que ça fait de nous des nazis?"

Source : AFP

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