A Paris, la "guerre" est arrivée au bistrot d'à côté

  • Des personnes déposent des bougies en hommage aux victimes des attentats rue de Charonne à Paris, le 14 novembre 2015
    Des personnes déposent des bougies en hommage aux victimes des attentats rue de Charonne à Paris, le 14 novembre 2015 AFP - JOEL SAGET
  • Le corps d'une victime des attaques terroristes évacué le 14 novembre 2014 rue de Charonne à Paris
    Le corps d'une victime des attaques terroristes évacué le 14 novembre 2014 rue de Charonne à Paris AFP - LOIC VENANCE
  • Des fleurs déposées près du Bataclan le 14 novembre 2015 à Paris
    Des fleurs déposées près du Bataclan le 14 novembre 2015 à Paris AFP - PATRICK KOVARIK
  • Attaques à Paris et près du Stade de France
    Attaques à Paris et près du Stade de France AFP - I.Véricourt/L.Saubadu/S.Malfatto, sim/fh
Publié le , mis à jour
Centre Presse Aveyron

Abasourdis devant la "boucherie" du Bataclan, consternés rue de Charonne: samedi, aux abords des lieux des attentats de la veille à Paris, tous décrivent des "scènes de guerre", une attaque sans précédent contre leur "mode de vie".

"La différence avec Charlie, c'est que là, c'est le crime de masse. Pas des journalistes, des Juifs, des flics: c'est toi et moi dans notre bar, notre salle de concert, là où on va avec nos gosses", dit Sylvain, la petite quarantaine, évoquant les attentats parisiens de janvier contre le journal satirique Charlie Hebdo, des policiers et un supermarché casher.

Dans un café près de la rue de Charonne, où l'un des attentats a fait 19 morts, Nessim, trentenaire au look de hipster, est atterré: "Ils ont visé des lieux emblématiques de la tolérance, dit-il d'une voix douce. Les quartiers bobo de Paris où la mixité a un sens, le Bataclan: la culture partagée. Ils ont visé le Stade de France: le foot, la religion des laïcs."

Au Bataclan, c'était "une boucherie, des gens avec des balles dans la tête, des gens qui se sont fait tirer dessus alors qu'ils étaient à terre", lâche un policier qui a participé à l'intervention dans la nuit.

Dans cette célèbre salle de concert de l'Est parisien, au moins 82 morts. Les quatre assaillants sont morts aussi, trois en se faisant exploser.

"J'étais au fond de la salle, c'est ce qui m'a sauvé", témoigne Anthony. Il a distingué un assaillant, "pas cagoulé", qui s'est approché "à quelques centimètres" de lui: "J'attendais la balle fatale, j'étais à découvert, avec un mec au-dessus de ma tête". "Je rampe, patauge dans le sang et sors à l'air libre", indemne.

Le quartier demeurait bouclé en fin de journée et des dizaines de badauds venaient spontanément se recueillir devant les barrières, allumer des bougies et déposer des fleurs, ont constaté des journalistes de l'AFP.

Marc, auteur de fiction télévisuelle, est venu apporter un bouquet de roses rouges. "C'est une barbarie sans nom. Pas de chance, ils se sont attaqués à la ville Lumière, ils ne gagneront pas", dit-il.

- "Sans un cri" -

Au total, les six attaques de vendredi soir ont fait au moins 128 morts à Paris et près du Stade de France, au nord de la capitale, où se jouait un match de football France-Allemagne.

Rue de Charonne, où le périmètre de sécurité a été levé à la mi-journée, on aperçoit onze impacts de balles à travers le rideau de fer baissé du bar La Belle équipe. Un père les montre à sa fille d'une dizaine d'années, pour qu'elle "sache". A l'intérieur, deux bougies brûlent. Par terre, une flaque sombre.

"J'ai entendu des coups de feu vers 21H30. Je suis allé à la fenêtre. J'ai vu deux hommes", témoigne Jean-Luc, kinésithérapeute, qui vit juste au-dessus du bistrot. "Blouson foncé, jean et baskets. Ils étaient tête nue, visage découvert. L'un tirait vers le bar, l'autre avait l'air de surveiller autour."

Ému, il poursuit: "A un moment, les deux tiraient. A la kalachnikov. C'était froid, sans un cri. Je n'ai pas l'impression qu'ils aient dit quoi que ce soit. Ils avaient l'arme à la hanche et tiraient, sans arrêt. Cela a duré au moins quatre minutes. A la fin, l'un des deux tirait balle par balle. Ils sont repartis en voiture". En bas, "du sang partout, des corps déchiquetés": "Je suis secouriste, j'ai pris ma trousse, j'ai fait ce que j'ai pu".

Devant le bistrot, badauds et bouquets s'accumulent. Une jeune femme enfouit son visage dans le cou de son compagnon, secouée de sanglots. Des équipes de psychiatres ont été mobilisées pour parcourir le quartier.

Marlène Chabaud, 23 ans, larmes rentrées, est venue se recueillir, avant d'aller donner son sang. "Je passe là tous les jours. J'ai eu besoin de m'arrêter." "Il faut du courage mon petit, on est en guerre", dit Gérald Bloncourt, 89 ans, ancien grand reporter, télé-objectif en bandoulière.

Source : AFP

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