Louis Aliot : «Les ruraux se sentent abandonnés»

  • Louis Aliot: «Il serait plus judicieux de distribuer directement les 9 md€ de la Politique agricole commune à nos agriculteurs.»
    Louis Aliot: «Il serait plus judicieux de distribuer directement les 9 md€ de la Politique agricole commune à nos agriculteurs.» Michel Labonne
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Centre Presse Aveyron

Louis Aliot porte les listes Front national pour les 13 départements de la nouvelle région. Précision importante: cet entretien a été réalisé avant les attentats de Paris.

Louis Aliot porte les listes Front national pour les 13 départements de la nouvelle région. Précision importante: cet entretien a été réalisé avant les attentats de Paris.

Vous critiquez souvent les autres partis sur leur mode de désignation des candidats. Pourtant, on a l’impression que vous vous êtes autoproclamé tête de liste ? Non. Il y a eu un vote du bureau politique qui était chargé de la sélection des candidats. Pas de primaires donc ?

Non, parce qu’il n’y avait pas d’autres candidats. Il y aurait pu avoir Julien Sanchez (maire de Beaucaire, conseiller régional LR, Gilbert Collard député du Gard)... Mais, je m’y suis collé. Il faut dire que j’avais un avantage sur les autres candidats possibles, je suis un peu des deux régions. Je suis né à Toulouse, j’ai grandi à Ax-les-Thermes, j’ai fait ma scolarité à Foix et mes études à Toulouse. J’ai été élu au conseil régional de Midi-Pyrénées dès 1998 et, ce mandat terminé, j’ai été élu en Languedoc-Roussillon, d’où j’ai démissionné après mon élection au parlement européen.

La campagne pour les régionales est lancée. Au niveau national, on entend certains leaders de parti parler d’insécurité, d’islamisation. En quoi cela concerne concrètement et légalement un conseil régional ?

En matière de compétence, par exemple sur l’immigration, ça ne le concerne pas. Mais, On voit tout de même que Martin Malvy (président de la région Midi-Pyrénées) a attribué un million d’euros pour l’accueil des migrants financés par la Région. Donc, l’air de rien et d’une matière détournée, ça concerne un peu. Mais, c’est vrai que sur les compétences pures cela ne concerne pas la Région. Sauf, en matière d’insécurité, où la Région gère des lycées et des transports où elle est aussi tenue de réparer des incivilités. Vu que l’Etat n’a pas les moyens d’assurer la sécurité aux abords des lycées ou dans quelques lignes de transport, je pense que l’on pourrait imaginer quelques personnels de la Région - des référents sécurité dans les transports ou aux abords des lycées - qui seraient chargés d’observer, de surveiller et de mobiliser la police en cas de problème. Je ne veux pas refaire un corps de police régionale des transports comme je l’entends. C’était notre proposition en 1998. La police cela veut bien dire quelque chose dans notre pays, donc j’appelle cela des référents sécurité.

Cela coûterait beaucoup d’argent ?

Sûrement. Mais, la prochaine grande région, on ne sait pas combien elle va coûter elle-même. Toutes les notes que j’ai fait faire par des spécialistes des finances publiques me disent que l’on est aujourd’hui incapable de nous donner le budget 2016 de la future région fusionnée. Yann Marec. En quoi, vous, en arrivant au pouvoir à la Région, vous amélioreriez concrètement la sécurité ? Je vous l’ai dit. En améliorant l’ordinaire dans certaines zones à risques, où nous mettrions éventuellement des agents régionaux, fonctionnaires territoriaux, en mission d’observation ou de veille dans les transports, les gares et aux abords des lycées. Je suis aussi très attaché à faire de la lutte contre la drogue dans les lycées une grande cause régionale. En matière de pédagogie, la région peut s’en saisir. Je suis très inquiet de ce qui se passe dans ou aux abords de nos lycées et je n’ai pas l’impression que les politiques sont mobilisés sur ce sujet.

Vous allez embaucher donc ?

Il faudra bien embaucher. J.L. Pourtant, une étude récente assure que la future grande région est déjà surdotée en fonctionnaires territoriaux... Il faudra ne pas renouveler les départs à la retraite dans certaines administrations. Mais, n’est-ce pas pour cela que la fusion a été faite. En fusionnant, on devrait dégager un certain nombre de fonctionnaires qu’il faudra réaffecter. Peut-être que pour ces enjeux de sécurité, il faudra des embauches, mais à dose homéopathique. Je ne suis pas plus royaliste que le roi. L’Etat s’est désengagé de nombreuses compétences sans donner aux régions les moyens de les assumer. En revanche, il a maintenu sa fiscalité. Pour les citoyens, c’est la double peine. Ils sont obligés de faire face aux impôts locaux qui augmentent, mais aussi à la fiscalité nationale qui augmente également. Tout ça pour un service qui n’est plus rendu, ou moins bien rendu. La future région devra, là aussi, clarifier les choses.

Au cours d’une de vos campagnes électorales, vous vous êtes accaparé la statue de Jean-Jaures, assassiné après une campagne des nationalistes et des ultranationalistes. Pour vous qui êtes nationaliste, n’est-ce pas une contradiction, voire une escroquerie intellectuelle ?

Pas du tout. D’ailleurs même Saurel (Philippe Saurel, maire de Montpellier et candidat aux régionales) m’a rendu hommage lors d’un débat en disant que Jaurès appartient à tout le monde. Je m’inspire de Jaurès pour sa fameuse citation “à celui qui n’a plus rien, la patrie est son seul bien“. Elle résume ce que devrait être le combat de la classe politique. Au moment où les gens perdent toujours plus d’emplois, où ils vivent de plus en plus dans la précarité, la patrie n’est plus protectrice. Je ne me revendique pas de l’héritage jauressien, mais, je ne vois pas pourquoi on ne pourrait pas citer Jaurès comme l’on cite De Gaulle. Il n’appartient pas à la gauche.

Il opposait quand même l’idée de nationalisme à celle de patrie ?

Bien sûr. C’était un personnage complexe, mais, une fois de plus je ne m’interdis pas de le citer. Comme je viens en plus d’une famille ariégeoise, plutôt de gauche, moi, je prends tout.

Vous parlez beaucoup de ruralité dans votre campagne. Que comptez-vous faire pour favoriser cette ruralité et en particulier pour le maintien des services publics dans les zones de montagne ou rurales ?

Il y a deux aspects là. D’abord la lutte permanente contre l’idéologie de l’Europe. Pour elle, dès que vous touchez à un dossier, c’est libéralisme partout, à l’image de la libéralisation du transport des voyageurs, adoptée d’ailleurs par le gouvernement. C’est donc encore une fois la Région qui doit se substituer. Elle doit prendre sa part de responsabilité d’aménageur du territoire puisque l’Etat l’a abandonnée. La ruralité est un autre aspect. J’ai vu disparaître petit à petit tout ce que l’on avait dans nos campagnes. Je l'ai vécu à Ax-les-Thermes. Il y avait une DDE, une gendarmerie... petit à petit les gendarmeries se sont évaporées autour des cantons, pareil pour la poste, la douane ; des perceptions vont disparaître... Il faut se battre contre ça. Je suis stupéfait de la manière dont on agglutine les entreprises autour de Toulouse, et un peu autour de Montpellier, au détriment du reste du territoire. Je me souviens être intervenu sur le dossier du Cancéropôle qui est un instrument magnifique. Il a été construit à Toulouse, sous un couloir aérien, à côté d’une rocade qui voit passer des milliers de véhicules et sur une zone qu’il a fallu dépolluer, puisque c’était l’ancienne zone AZF. Je trouvais ça un peu cavalier. Pourquoi ne pas mettre ce Cancéropôle et ses 6000 emplois ailleurs, dans le Gers ou dans l’Ariège par exemple, puisqu’il n’y a plus de textile, ni Péchiney. Il existe des routes, des autoroutes, des trains régionaux, pourquoi ne pas mettre ce genre d’équipements à 100 km de Toulouse, à moins d’une heure de route. Malvy m’avait dit que tous ces chercheurs voulaient aussi une vie culturelle et sociale et à Toulouse, ils la trouveraient toujours plus. On a un gros souci d’aménagement du territoire et il faudra que la Région soit pilote pour initier. Il faudrait recréer une Direction à l’aménagement du territoire régionale qui fasse participer l’ensemble des collectivités. Il faudra déconcentrer l’agglomération toulousaine. Il ne faudrait pas non plus que l’on se retrouve avec une hégémonie des deux métropoles toulousaine et montpelliéraine qui accapareraient un certain nombre de compétences au détriment de la Région.

Dans les zones rurales, l’économie c’est surtout l’agriculture, secteur dont on connaît les difficultés. Or, votre parti prône moins, voire plus d’Europe. Pensez-vous que les éleveurs soient prêts à entendre ce message alors qu’ils sont sous perfusion des aides européennes ?

Sous perfusion ?! C’est un peu comme un circuit de chauffage, l’eau elle part toujours de la chaudière. Ce qui alimente l’Europe, c’est le budget français. Je rappelle aux agriculteurs, que l’on a trompé sur ce sujet, la France donne 20 milliards d’euros à l’Europe. C’est pas rien. L’Europe nous en restitue, politique agricole commune comprise, 13 milliards. Nous en sommes de notre poche de 7 milliards. Je pense qu’il serait plus judicieux de distribuer nous-même les 9 milliards de la PAC à nos agriculteurs. Mais, le sujet pour la Région, c’est demain que va-t-on faire avec les productions locales ? Je suis favorable aux circuits courts. Il faudra le généraliser. Il faut que, dans les établissements publics qui détendent de la Région, nous instaurions l’obligation de se fournir directement chez les producteurs locaux. C’est nécessaire pour la qualité de ce que l’on mange, pour le respect de l’environnement et pour faire vivre les producteurs locaux. Nous serions ainsi une région pilote. L’image de notre région c’est aussi une certaine qualité de vie.

Depuis plusieurs années, le FN progresse dans les zones rurales. Or en Aveyron, tant aux élections départementales qu’à la dernière législative partielle, il n’est pas parvenu à se qualifier au second tour. Avez-vous le sentiment que votre programme est entendu par le monde rural ?

Il y a des parties du territoire où il est moins entendu qu’ailleurs. Pour l’Aveyron, ce sont peut-être des pesanteurs politiques, des verrous, mais qui sautent petit à petit. On l’a vu en Ariège, Haute-Garonne, dans le Lot... Des pesanteurs sautent parce que les gens qui vivent la ruralité ont l’impression d’être abandonnés. Ils entendent parler de l’argent investi dans les banlieues, avec des résultats somme toute très modestes, et eux, ils n’ont plus de Poste, plus de médecins... donc leur indignation est légitime. J’ai toujours défendu la ruralité. L’ADN de la France, ce sont ses territoires, sa paysannerie. Nous sommes des ruraux et il n’y a pas à avoir honte de cela.

Pour rester un peu dans l’agriculture et davantage dans la culture. De Vic-Fezensac à Nîmes nous sommes dans une région de tradition taurine. Que pensez-vous la tauromachie, de ses spectacles, de ses élevages et de son économie ?

Je ne suis pas un aficionado. Je suis allé voir une corrida avec mes parents en Espagne. Je devais avoir 9 ou 10 ans, je n’y ai plus jamais mis les pieds. Sauf cet été, à Béziers, à l’invitation de Robert Ménard. Parce que les anti-corridas me font pousser quelque fois des boutons. Je les trouve d’une telle intolérance. On peut combattre sans la violence, comme ils l’ont fait à Millas (P.-O.) où ils ont scié la statue du torero. Je ne vais pas aux corridas, mais je ne vois pas pourquoi on les interdirait. En revanche, je suis contre le fait que des enfants en bas âges aillent voir ces corridas. Quant à l’élevage de toros, cela demeure une filière importante. Elle préserve des espèces taurines. Comme pour la filière équestre, il y a tout un monde de tradition, d’identité culturelle et une économie que l’on ne peut pas négliger au nom de la souffrance animale. A ce compte-là, il va falloir interdire d’autres domaines.

La future région compte un très grand nombre de festivals et manifestations culturelles qui sont très souvent aidés par les conseils régionaux sortants. Faut-il revoir la politique culturelle, faire un tri, employer de l’argent à d’autres fins ?

Il y a deux aspects sur ce domaine culturel. Il y a le volet patrimoine historique, culturel, religieux, qui nécessite une politique de préservation de sites déjà initiée qu’il faut poursuivre. Et puis, il y a les festivals. Contrairement à ce que je lis, je pense que la culture doit s’adresser à tout le monde. Il y a des manifestations culturelles qui ne me plaisent pas, mais pour autant, elles ont leur public. Même s’il y a des petits gaspillages, je pense que les grands festivals de la Région doivent être maintenus. Et même que l’on pourrait en créer d’autres. A Perpignan, j’avais proposé pendant les municipales de créer un grand festival des musiques gitanes qui n’existe pas, alors que nous avons une des plus vieilles communautés gitanes sédentarisées de France. Ce serait un atout. Il faudra effectivement faire des choix, mais ils ne se feront pas sur des critères purement idéologiques. La clause de compétence générale disparaissant, les présidents de région auront moins le loisir de distribuer comme ça à tours de bras.

La formation et notamment la formation professionnelle sont une compétence les plus importantes de la région. Est-ce que ce sera la priorité de votre mandat ?

Il faut là aussi simplifier. Il y a trop de guichets et, parfois, il y a une inadéquation totale entre les formations proposées et les métiers effectifs sur le terrain. Des secteurs d’activité ne trouvent pas d’embauche. Il faut donc un guichet unique. Mais, pour le réaliser il va falloir rassembler tous ceux qui proposent des formations : Région, organismes publics, parapublics ou privés. Et là, les chambres de commerce et des métiers ont un rôle essentiel à jouer. Il faudra créer une agence régionale pour la formation professionnelle qui mettre autour de la table tous les acteurs. C’est essentiel.

La construction des lycées est aussi une compétence de la Région. Trouvez-vous des manques en la matière dans la future grande région ?

Il faut reprendre les projets et les chantiers qui existent. Les lycées dans la ruralité sont des outils qui permettent de déconcentrer et de faire vivre le tissu rural. Je ne vais pas vous dire où et comment, mais je suis favorable à la construction de nouveaux lycées. C’est une compétence apolitique et cela a été relativement bien fait par les présidents de région successifs des deux régions. Il faut évidemment continuer cette politique.

Souvent le FN joue sur les peurs et notamment au sujet des quartiers... Mais, Valls aussi joue sur le phénomène des peurs...

Vous visitez un de ces quartiers, vous rencontrez un de ces jeunes en difficulté, quelle serait la conversation que vous auriez avec lui ?

La première question serait comment tu vois ton avenir. Ils sont pour beaucoup dans l’oisiveté, la drogue, la violence... Il y a des jeunes qui veulent s’en sortir et s’en sortent. Aux autres, il faut leur dire que l’avenir d’un jeune ne peut être que de vivre de substrats illégaux. Il faut leur proposer des solutions s’en sortir. Vous savez qu’avec ce discours, il est déjà parti... D’accord, mais encore une fois ce n’est pas le président de région qui réglera ça. Mais, en revanche, je pense que c’est, par tout ce que l’on mettra en place en terme d’apprentissage et de formation, que l’on remettra sur le chemin d’une vie sociale intégrée un certain nombre de jeunes qui veulent s’en sortir. Sur le reste, il va falloir que l’Etat fasse son travail. Après, il faudra aussi lutter contre la radicalisation dans certains quartiers. L’Etat doit le faire et je ne crois pas qu’il s’y prenne de la bonne manière.

C’est quoi la bonne manière ?

La fermeté sur la laïcité. “Tu rendras à dieu ce qui est à dieu et à César ce qui et à César“. La religion est dans la sphère privée, même si nous vivons sur une histoire et une culture judéo-chrétienne qui a tout façonné. Aucun musulman n’est interdit de prier son dieu, mais, on n’est pas obligé de demander des régimes particuliers dans la sphère publique. Voilà, c’est tout. Et il faut être ferme. Le cadre de la République une, indivisible, sociale et laïque n’est pas négociable. Si on redonne de l’autorité à ce concept, vous verrez que les intégrismes religieux soit quitteront le territoire, soit reculeront et l’on pourra enfin créer des choses avec des citoyens français de religion musulmane.

Depuis quelques temps on assiste à une concentration d’administrations ou des CCI et chambre des métiers. Que comptez-vous faire pour enrayer cette concentration sur Montpellier ou Toulouse ?

Je pars sur un schéma : le futur président de région aura plusieurs directions régionales : agriculture, économie, transfrontalier, viticulture - qu’à mon avis il faut dissocier de l’agriculture - et d’autres qu’il faudra délocaliser. Je pense, par exemple, que Perpignan pourrait accueillir une ou deux directions régionales à intégrer pourquoi pas au Centre du monde. Je pense à la viticulture, au transfrontalier ou à l’énergie. On doit dispatcher sur le territoire les compétences de la Région. Si on fait des efforts sur le numérique, sur les axes de communication, de transport c’est pour fluidifier le territoire, sinon ça n’a aucun sens.

Quelles délégations comptez-vous accorder aux conseils départementaux ? S’agira-t-il de délégations d’ensemble ou au cas par cas en fonction de la spécificité de chaque département ? 

Pour le transport scolaire qui n’arrivera dans la sphère de compétence de la Région qu’en 2017, c’est vrai que ce sont des choses qu’il faudra traiter au niveau local. Vous savez, moi, je suis un départementaliste. On me dit souvent pourquoi alors tu te présentes aux régionales ? Dans ma vision de l’avenir, pour moi la vie ça reste le département. La région est un échelon qui aurait pu avoir sa raison d’être sur l’aménagement du territoire. Ce sera peut-être à faire demain, parce que sur ces fusions de région, rien n’est figé. Oui, sur le tourisme, le transport scolaire, l’élevage, l’agriculture de montagne, la chasse ou la politique de l’eau, les départements doivent garder la main. Mais, pas que les départements, les petites communes doivent aussi être associées. Je prévois une conférence annuelle des petites communes de moins de 3500 habitants pour évoquer, en direct avec elles, les problèmes qui se posent et éventuellement les régler par le biais de l’aide que pourrait apporter la Région. Autre dossier de l’eau, les retenues d’eau qui risquent de manquer à l’agriculture, il en faudra d’autres ? Notamment pour la culture du maïs très exigeante en eau. La retenue de Charlas (près de Saint-Gaudens) va manquer. Il faudra bien trouver un stock d’eau disponible dans les 50 ans qui arrivent. Il y a aussi le problème de Sivens (Tarn). Là encore, dès que vous avez un projet qui est utile à la collectivité, vous avez des opposants. On peut discuter de la violence de l’opposition. Mais, je pense que c’est le genre de projet auquel il faut faire participer le citoyen. Dans une démocratie, le peuple est souverain. Un projet comme celui-ci doit être adoubé par le peuple directement. Au moins, il est alors incontestable. Sur les élus pèse aujourd’hui une suspicion permanente de choses troubles. Regardez l’aéroport de Nantes, regardez Sivens avec le drame de ce jeune. On doit donc à tout prix consulter les bassins de population et en tenir compte. Il faut des référendums populaires. Si vous étiez élu quelle serait votre action pour le chaînon manquant Montpellier-Perpignan de la ligne LGV ? Il faut être cohérent. Il faut demander à l’Etat d’abandonner le Dax-Bordeaux au bénéfice du Montpellier-Perpignan. Aux yeux des Espagnols, on passe pour des rigolos. Il faut de la continuité si on veut que cette ligne fonctionne. Il faut du flux venant de Lyon et Paris. Il faut réaliser ce TGV et pour l’instant il n’y a pas l’ombre de la moitié d’un rail. Les Espagnols eux sont à Perpignan. Au pouvoir, je ferais tout pour accélérer le dossier. L’Europe a sa responsabilité sur ce dossier. Elle a mis beaucoup d’argent sur les grandes lignes d’intérêt européen, celle-ci en est une. L’Europe doit la faire. Sur les 7 milliards de budget, l’Europe doit mobiliser des fonds.

Martin Malvy le dit depuis des années pour le Bordeaux-Toulouse-Narbonne...

Il est allé jusqu’à financer le Tours-Bordeaux pour faciliter la chose. Je ne comprends pas comment nos élus locaux, dans les P.-O notamment, dont les partis ont été successivement au gouvernement, à droite comme à gauche, n’ont pas obtenu de leurs gouvernements des décisions fermes. Qu’ont-ils fait pour le TGV les Alduy sénateur, Blanc sénateur, Mach et Calvet députés... Sarkozy était à l’Elysée et ça n’a pas avancé d’un pouce.

La Catalogne est notre voisine, que pensez-vous de son désir d’indépendance ?

Je pense que la défense d’une identité et de la langue côté catalogne sud est quelque chose de normal, de souhaitable, de salutaire. C’est quelque chose qui ne me choque pas. Je pense en revanche que la demande d’indépendance à ce point est un luxe qu’elle ne peut pas se payer. Elle est déjà pratiquement autonome, que lui faut-il de plus ? Il y a juste le problème de la fiscalité. Le parti populaire espagnol aurait pu desserrer un peu la tuyauterie pour permettre plus d’autonomie fiscale. Je trouve que la Catalogne n’a aucun intérêt à quitter l’Espagne, car cela pose des problèmes au niveau de l’Europe, des problèmes diplomatiques, économiques...

Si l’Espagne dit demain, je ne reconnais pas la double nationalité, ils vont faire quoi les Catalans qui sont aussi espagnols ? Que vont faire la moitié des Espagnols qui n’ont pas voté pour l’indépendance qui vivent en Catalogne et qui sont aussi Catalans ? Pourquoi vouloir à tout prix créer un désordre qui peut leur coûter cher à force... Parler sans cesse d’affrontement contre l’Etat espagnol, ça ne va pas réjouir les industriels, ni tous ceux qui veulent investir en Catalogne. Sans se mêler des affaires espagnoles, je suis assez réservé sur l’indépendance à tout prix.

Quelles pourraient être selon vous les incidences sur les relations économiques avec la future grande Région ?

Je pense que cela n’aurait aucune incidence. Nous sommes déjà dans une économie intégrée avec la Catalogne. Pour nous ici, ça ne changera pas grand-chose. Barcelone ne regarde pas Perpignan avec envie ! Et vice-versa contrairement à ce que l’on croit.

De nombreux artisans se plaignent que des entreprises du Sud raflent des marchés ?

Si vous êtes élu instaureriez-vous la préférence locale ou régionale pour les marchés publics ? On va d’abord être obligé d’appliquer la loi. La loi qui le permet en fait. Deux critères sont rarement pris en compte dans les marchés publics et ils ont leur importance. Le critère environnemental d’abord. Il est bien évident qu’une entreprise locale est bien plus efficace en bilan carbone qu’une entreprise venant d’Espagne. Le critère social ensuite. Dans les bassins d’emploi en difficulté, vous avez le droit de privilégier les entreprises locales. Ces deux critères devraient permettre d’offrir un peu d’oxygène à nos entreprises locales. Mais, ces concurrences déloyales sont avant tout un problème national et européen qui n’est pas traité et devra l’être. La Région, sur les marchés qui lui incombent, devra privilégier évidemment les entreprises locales.

Quelles seront vos principales mesures économiques si vous êtes élu ?

Le cœur de cible de nos aides doit être pour les TPE, les PME, les commerces et les artisans qui sont les principaux employeurs de nos deux régions. L’action économique de la Région est aujourd’hui de 100 millions d’euros sur un budget d’1 milliard. Mais, 75 % des budgets des agences économiques des régions sont mobilisés sur les frais de fonctionnement. A un moment donné, il faut faire des choix. En regroupant, en simplifiant, il faut aider ce tissu économique.

Quel nom préconisez-vous pour la future région ?

D’abord, je suis contre tout ce qui est publicitaire. J’ai entendu Sud de France, des marques de lessive... C’est bien pour vendre des produits locaux, mais une région ne peut se baptiser Sud de France. C’est très réducteur.

C’est parce que Georges Frêche (président de la région LR de 2004 à 2010) l’a trouvé que vous dites ça ?

Pas du tout. L’Occitanie, ça me parle, mais ça va jusqu’en Italie. Je me disais que comme on a abandonné en Languedoc-Roussillon la capitale à Toulouse, on pourrait au moins vendre notre nom, c’est-à-dire Languedoc-Roussillon. C’est ce que je proposerais.

Accepteriez-vous un débat avec Carole Delga et Dominique Reynié chez David Pujadas sur France 2 ?

Pourquoi que ces deux-là seulement. Il y en a d’autres. Onesta est bien meilleur que Delga en débat. Pas que sur la forme, sur le fond des dossiers aussi. Mme Delga qui se revendique ancienne ministre du commerce et de l’artisanat pendant son “ministère“, son “magistère“, de 16 mois je crois, il y a eu 62 000 faillites d’entreprises en France ! Et 6 000 dans notre Région ! C’est donc la ministre de la faillite des entreprises, des commerces et de l’artisanat. Je ne vois pas comment elle pourrait réussir demain chez nous ce qu’elle n’a pas pu faire comme ministre.

Votre principal adversaire, c’est Carole Delga ?

Oui. C’est elle qui est la représentante à la fois de la politique du gouvernement et de la politique des deux exécutifs régionaux d’Alary et Malvy. Et comme je considère que Reynié n’est pas loin d’être l’allié objectif de madame Delga dans cette élection... Si l’on en croit les sondages, vous seriez en tête au premier tour, mais comme à chaque fois vous plafonneriez au second tour... On verra bien. Je pense que si on sort en tête au premier tour, Reynié va s’effondrer. Les gens vont se dire “le seul qui peut battre la gauche, c’est quand même Aliot “. Je peux siphonner Reynié, car il n’a pas l’image d’un homme de droite, anti socialiste, comme auraient pu l’être d’autres candidats dans la Région. Là, j’ai un terreau favorable de second tour. Et souvenez que lors des régionales de 2010 en LR, on est passé de 12 % au premier tour à 19,5 % au second, en triangulaire et sans apport de voix. Il faudra aussi savoir ce qu’est devenu l’électorat de Georges Frêche ? Je pense que Frêche était un handicap pour nous. Ils nous a siphonné des voix populaires. On va retrouver cet électorat. Alary est un sombre inconnu dans la Région. Comme Mme Delga en Midi-Pyrénées.

 Vous avez un discours clivant lorsque vous évoquez les bilans. Or, que trouvez-vous de positif dans la gestion de Malvy ?

Les lycées, parce que ce ne sont pas des projets de droite ou de gauche. Ce que je reproche aux socialistes, ce n’est pas d’être socialiste, c’est d’être sectaire. Martin Malvy est quelqu’un de sectaire, en tout cas avec nous. Vous savez Valls est un formidable agent électoral pour nous. Beaucoup de gens de gauche ne comprennent pas son discours de mise en cause permanente par rapport à nous. Je n’arrive pas en bottes, avec un casque et un Panzer. Ces gens nous disent qu’il y a un problème avec le discours de Valls et ce que nous représentons sur le terrain.

Parce vous avancez un peu masqué dans une dynamique de quête du pouvoir, mais, une fois au pouvoir cela peut changer. Vous tenez à chaque catégorie de population, le discours qu’elle veut entendre. Vous simplifiez à l’extrême ?

Au contraire, je pense être très cohérent. Je ne me suis jamais considéré comme un extrémiste, mais comme quelqu’un de bon sens. Et je me rends compte que ce bon sens est partagé par des gens qui étaient de droite ou de gauche.

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