Laurent Peyrelade : « Attention à la saison d’après, attention »

  • L'entraîneur ruthénois prudent sur la saison à venir.
    L'entraîneur ruthénois prudent sur la saison à venir. Archives Centre Presse Aveyron
Publié le , mis à jour
Propos recueillis par Romain Gruffaz

Alors que Rodez va attaquer le championnat demain, par un déplacement à Lyon-Duchère, Laurent Peyrelade, son entraîneur, s’est confié il y a quelques jours au sujet de la deuxième saison de son équipe en National, qu’il a présentée comme  « différente » de la première, « mais excitante ».

Après une saison 2017-2018 usante sur le plan physique et mental, avez-vous pu mettre à profit la trêve estivale pour recharger les batteries ?
Oui, mais les vacances sont toujours trop courtes (sourire) ! J’ai fait une coupure de quinze jours, chez moi, tranquillement. J’ai pu profiter de ma femme, de ma fille, mais ça ne s’arrête vraiment jamais, surtout cette année, où ç’a été un peu mouvementé.

Justement, comment avez-vous vécu cette intersaison « mouvementée », comme vous le dites, avec beaucoup de départs, et notamment ceux de joueurs cadres ?
C’est quelque chose d’inévitable. On est à Rodez, le groupe a fait une magnifique saison l’an dernier et on avait peu de joueurs protégés. Beaucoup de clubs ont des moyens et des projets sportifs supérieurs aux nôtres. Il était inévitable que nos joueurs soient sollicités et inévitable que l’on ne puisse pas les garder ou qu’ils soient attirés par d’autres destinations. Après, chaque mec fait ses choix, et on n’est pas là pour juger. Certains font des choix sportifs, d’autres financiers, d’autres encore familiaux, de cadre de vie ; c’est comme ça, bienvenue dans une certaine sphère du football, tout simplement. Si on avait terminé douzièmes, on aurait peut-être gardé tout notre groupe mais ça n’a pas été le cas. Il ne faut pas être frustré ni désolé, ni passer son temps à regarder ce qui a été fait ; il faut regarder devant et profiter.

Si des joueurs sont sollicités et partent, c’est aussi, quelque part, une forme de reconnaissance du travail effectué…
Je ne l’avais pas perçu comme ça (rire) ! Pour moi, il ne faut pas mesurer ça sur une saison. Ce groupe avait commencé à travailler ensemble il y a trois ans. Ce n’est pas comme s’il y avait eu un coup de baguette magique en un an.

Non, mais le championnat de National offre plus de visibilité que celui de CFA et donc un écho différent aux performances…
Oui, c’est sûr que l’année où l’on est montés de CFA (à l’issue de la saison 2016-2017, NDLR), pas un joueur n’a été sollicité par une équipe de National. Ce que je veux dire, c’est que les mecs ne se sont pas découverts comme ça, il n’y a pas eu de magie. Le groupe s’est construit au fur et à mesure, petit à petit. L’alchimie s’était faite, les connexions étaient bonnes, on avait trouvé le bon discours, eu du temps pour travailler les affinités entre les joueurs. On était à un niveau (CFA) qui était moins exigeant et on avait donc un peu plus de confort pour travailler, mais c’était un travail sur plusieurs années, pas sur un an.

Cette alchimie dont vous parlez, craignez-vous de ne pas parvenir à la recréer immédiatement, dans cet effectif largement remodelé ?
De toute façon, il ne faut pas croire qu’on va la créer comme ça. On repart avec un autre groupe, on reconstruit des choses. On a changé les musiciens et on essaye de mettre tout le monde dans le bon ton, dans le même accord, et de faire commencer tout le monde en même temps ; d’avoir des idées claires sur ce que l’on veut faire et la façon dont on veut le faire, de créer des connexions, d’ajuster le discours ou la charge de travail à ce groupe-là, qui est différent. Il y a du boulot mais c’est ce qui est intéressant. Le problème du football est qu’on n’a pas de temps pour le faire. On est au tout début de notre aventure, on en est juste à créer des affinités, à faire en sorte que les nouveaux comprennent les anciens et inversement, et qu’ils s’adaptent au club et à l’entraîneur.

Le recrutement effectué vous satisfait-il, dans l’absolu et compte tenu des départs ?
L’entraîneur veut toujours les meilleurs joueurs (rire). Le révélateur, c’est la compétition. Est-ce que les gars avec qui l’on a envie de travailler cette année vont répondre présent et être performants ? ça, on ne le saura que dans dix mois. Aujourd’hui, les attitudes sont bonnes, l’état d’esprit est là, mais ce qui est certain est que l’on a beaucoup de joueurs qui devront élever leur niveau. La plupart d’entre eux n’ont jamais joué en National et ceux qui en ont l’expérience sont ceux qui étaient là l’an dernier. Il va falloir répondre rapidement aux exigences du National : être costaud dans les duels, très discipliné, concentré. On n’est pas là pour jouer au foot, on est là pour faire de la compétition, pour gagner des matches. Dans ce championnat, il n’y a pas de place pour les agneaux. Si tu en es un, tu te fais manger.

Globalement, comment jugez-vous la façon dont la préparation estivale s’est passée ?
(Il prend plusieurs secondes avant de répondre) On n’est ni en retard ni en avance sur les temps de passage. On construit quelque chose. Il faut que nos bases soient bonnes tout de suite ; c’est une évidence et je pense qu’elles le sont. Après, la façon dont on joue ensemble, dont on est efficaces, là, il y a des points d’interrogation.

Mais c’est quelque chose de normal, qui ne trouvera de réponse qu’au fur et à mesure de la compétition, non ?
Exactement. Il faut juste que l’on soit très clairs dans ce que l’on veut faire. On a beaucoup de choses à travailler mais l’idée est d’être très précis au sujet de deux-trois points et de construire autour, sinon, on va se disperser, et ça, on n’en a pas le droit. On a un effectif réduit, un groupe jeune, donc on doit être très dynamiques tout de suite et dépenser une énergie dingue pour prendre des points. Sans ça, on aura du mal. Ce n’est pas en attaques placées ou en affinités techniques que l’on pourra franchir les murailles des équipes de National. Il faut que l’on trouve des stratégies qui nous soient adaptées et des outils pour poser des problèmes aux autres.

Compte tenu de tous les changements intervenus à l’intersaison, avez-vous modifié la façon dont vous vous êtes préparés ou avez-vous conservé le même canevas ?
On ne garde jamais le même, même si la trame est identique. L’avantage que l’on avait l’an dernier était que le groupe n’avait pas changé par rapport à la saison précédente : les choses étaient précises, les principes établis, l’identité trouvée. Le championnat aurait pu commencer après trois semaines de préparation, on aurait été prêts. Aujourd’hui, c’est autre chose, un autre contexte. Le groupe a tellement évolué que les priorités ont changé. On a essayé d’inculquer notre état d’esprit aux nouveaux, en leur disant : ici c’est Rodez, voilà comment ça marche, voilà qui on est, ce que l’on doit faire et comment on le fait ensemble. Ils ne sont plus dans une réserve d’équipe professionnelle, ils ne sont plus entourés par des mecs de 28-29 ans qui sont pros. Là, ils doivent montrer les crocs, prendre leur place, écouter et s’imprégner le plus rapidement possible de ce qu’il faut faire pour gagner des matches en National. Il y a des points en jeu, la rigolade est finie. On est en compétition et il faut être efficace.

Avez-vous le sentiment, compte tenu du fait que vous n’êtes plus une équipe promue et que l’effectif a beaucoup changé, que vous allez « redécouvrir » le National ?
Une chose est sûre : le niveau de ce championnat sera beaucoup plus élevé que l’an passé.

Sans parler du niveau, simplement de votre expérience, supérieure à celle que vous aviez en 2017.
Je pense au contraire que l’on avait plus d’expérience l’an dernier que cette année parce qu’on avait un vécu collectif, des souvenirs collectifs, des connexions collectives. On en a gardé mais on doit en créer de nouvelles. Je me sens à la même place que l’an dernier, comme une équipe de CFA qui arrive en National et va devoir se bagarrer pendant trente-quatre journées pour être encore là l’année prochaine. Ce que j’ai en tête est clair : il faut gagner des matches, prendre des points, et ne surtout pas penser que parce qu’on était là l’an dernier, on y sera encore l’an prochain. Je ne dis pas qu’on peut effacer tout ce que l’on a fait, mais c’est tout comme. On n’a pas de points en plus ni de budget plus important parce que l’on a fini quatrièmes. Tout ce qu’on a fait avant servira peut-être dans la structure du club, le fonctionnement général, mais il n’y aura pas de copier-coller. La saison qui commence sera beaucoup plus compliquée que la précédente. Il ne faut pas non plus oublier que les équipes qui avaient joué le haut de tableau il y a deux ans, comme Concarneau et Lyon-Duchère, ont lutté pour le maintien l’an dernier.

C’est quelque chose que vous gardez en tête ?
Je ne pense qu’à ça. Il y a des exceptions, comme Béziers, qui a joué les premiers rôles deux ans de suite, mais ce n’est pas parce que tu l’as fait une saison que tu le referas la suivante. Attention à la saison d’après, attention, car elle est beaucoup plus dure, plus exigeante.

Comment la voyez-vous, d’un point de vue global ?
Pour moi, il y aura huit équipes qui joueront les premiers rôles, quatre-cinq qui seront dans le ventre mou et quatre-cinq qui se battront pour le maintien.

Qui figurera dans la première catégorie selon vous ?
Lyon-Duchère, Boulogne-sur-Mer, Laval, Tours, Quevilly-Rouen, Bourg-en-Bresse, Le Mans et une surprise.

Rodez ?
Quand vous faites une chose deux fois, la deuxième fois, ce n’est plus une surprise. On verra…

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