Jacques Chirac et l’Aveyron

  • Jacques Chirac est venu à plusieurs reprises en Aveyron. Comme président du RPR, Premier ministre et Président de la République. Mais jamais, paradoxalement, comme ministre de l’Agriculture. 
    Jacques Chirac est venu à plusieurs reprises en Aveyron. Comme président du RPR, Premier ministre et Président de la République. Mais jamais, paradoxalement, comme ministre de l’Agriculture.  Archives José A. Torres
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Joël Born

Jacques Chirac, décédé jeudi à l'âge de 86 ans,  est venu à plusieurs reprises en Aveyron. Comme président du RPR, Premier ministre et président de la République. Mais jamais, paradoxalement, comme ministre de l’Agriculture. 
 

Le rapport de Jacques Chirac, le Corrézien d’adoption, avec le département de l’Aveyron est finalement une longue histoire, dont on retrouve trace à plusieurs reprises à des périodes et dans des contextes très différents. Lors des visites officielles du Premier ministre et du Président de la République (mais jamais, paradoxalement du ministre de l’Agriculture), ou celles du secrétaire du RPR, comme lorsqu’il était venu, en 1980, soutenir la candidature de Michel Lombard, lors de la législative partielle, pour la succession de Robert Fabre. Sans parler des visites privées qu’il rendait à quelques amis aveyronnais, loin des caméras et des appareils photos des journalistes.

« Bourreau de travail »

Car, Jacques Chirac et l’Aveyron, ce sont aussi des histoires d’amitié avec quelques fidèles. Et des liens souvent très amicaux avec certains Aveyronnais de Paris.
Notre ancien confrère de la Dépêche du Midi, Roger Lajoie-Mazenc se souvient très bien des premiers pas politiques de Jacques Chirac, alors qu’il était tout jeune journaliste à La Montagne. « Mon chef d’agence était un gaulliste. Jacques Chirac arrivait sur la scène politique corrézienne. Il était alors au cabinet de Pompidou. C’était un bourreau de travail. Régulièrement, il dormait sur un lit de camp, dans son bureau parisien. On le croisait régulièrement sur le champ des foires et dans les comices agricoles. Il commençait déjà à caresser le cul des vaches. » Ces vaches qu’il a souvent croisées, en terres aveyronnaises, ou dans les travées du Salon de l’Agriculture, dont Jacques Chirac était un fervent adepte. Toujours prêt à serrer quelques poignes et à partager un moment de convivialité autour d’une dégustation de produits de terroir.

L’arrêt de mort de la sidérurgie decazevilloise

Si la mémoire de Jacques Chirac est, bien évidemment, profondément enracinée dans le monde agricole et les pays d’élevage, le nom de l’ancien Président de la République fut également associé à celui de l’Aveyron, pour d’autres raisons. Plus politiques. Ainsi, au milieu des années 80, le gouvernement de Jacques Chirac, et son ministre de l’industrie Alain Madelin, sonnèrent le glas de la sidérurgie decazevilloise. Ce qui donnera lieu à quelques échauffourées et vaudra la tête du préfet de l’époque, à l’occasion de la venue de Jacques Chirac, alors Premier ministre de l’alternance, début 1987, en mairie de Rodez. Jean-Paul Boyer témoigne : « Madelin venait de remettre en cause le plan acier et Decazeville allait en payer les pots cassés. Les investissements engagés par le gouvernement Fabius pour créer une aciérie électrique, étaient stoppés alors que les machines étaient sur le point d’arriver. Le couperet n’était pas encore tombé, mais l’inquiétude était grande. » C’est dans ce contexte tendu que Jacques Chirac fut reçu, à l’hôtel de ville, par le maire de Rodez Marc Censi. « La CGT avait organisé une manif sur fond de polémique et de division, raconte le syndicaliste. On s’est finalement retrouvé en force, on a réussi à s’approcher du perron de la mairie et la colère s’est exprimée. Des barrières ont sauté, il y a eu des bousculades et des jets d’œufs ont éclaboussé Jacques Chirac. Quelques jours après, le préfet était démis de ses fonctions. Mais au-delà de l’anecdote, je retiens surtout que le concept industriel défendu à l’époque était le bon et que ce fut un énorme gâchis. »

La reprise des essais nucléaires

Quelques années plus tard, en juin 1995, alors qu’il vient tout juste d’être élu Président de la République et qu’il décide de relancer les essais nucléaires, un vaste mouvement de contestation se dessine à travers tout le pays. Y compris jusqu’en Aveyron. Du 19 août au 12 septembre 1995, une délégation du Larzac, parmi laquelle on trouve José Bové et Christian Roqueirol, participe à un voyage de contestation des essais nucléaires à Papeete et participe, à Mururoa, à l’action de Greenpeace. Après la manifestation, les quatre du Larzac ainsi que plusieurs Tahitiens sont mis en examen. Le procès des antinucléaires a lieu en septembre 1998 devant le tribunal correctionnel de Papeete. Le 20 octobre, les quatre du Larzac seront dispensés de peine, mais des Tahitiens seront lourdement condamnés. Entre-temps, cette dernière campagne d’essais nucléaires, au nombre de six, dans le Pacifique prit fin le 27 janvier 1996. Quelques mois plus tard, la France signait le traité d’interdiction complète des essais nucléaires.