Millau : Théo Kermel, itinéraire d’un comédien bien lancé pour briller

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  • Près de vingt ans après ses premiers pas sur les planches, Théo Kermel a décroché le premier rôle du long-métrage de Damien Odoul, Théo et les métamorphoses, bientôt en salles.
    Près de vingt ans après ses premiers pas sur les planches, Théo Kermel a décroché le premier rôle du long-métrage de Damien Odoul, Théo et les métamorphoses, bientôt en salles.
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Lola Cros

Formé au Centre d’art dramatique pour comédiens différents (CAD) de Millau, Théo Kermel a réussi son pari : devenir comédien professionnel au théâtre et au cinéma, dans des courts comme des longs-métrages. Un "parcours incroyable" pour ceux qui lui ont mis le pied à l’étrier.

La vraie vie de comédien, un métier difficile qui alterne entre castings et phases de travail intenses : c’est ce que vit Théo, dixit Kévin Pérez, comédien et metteur en scène pour la compagnie Création Ephémère à Millau. Il a un parcours incroyable." Kévin Perez se souvient du jour où il a rencontré Théo Kermel, que son auxiliaire lui avait présenté comme "un jeune passionné de théâtre et de danse", motivé à intégrer le Centre d’art dramatique pour comédiens différents (CAD).

Quand il y entre, Théo Kermel a une vingtaine d’années. Les planches du théâtre, il y a goûté dès l’école et n’en a pas démordu depuis. Enfant déjà, il se souvient " se mettre en scène, se costumer, adorer les comédies musicales ". " Au théâtre ou au cinéma, j’ai le même plaisir : incarner des personnages, être complètement différent du Théo de la vraie vie, me documenter pour m’imprégner, sentir le personnage, témoigne l’intéressé. Bon, j’ai tendance à surjouer, il faut me canaliser, mais je suis très très fier de mon parcours. C’est une sacrée aventure. " Lui aussi se souvient de ses premiers pas au CAD : "Je voulais devenir comédien pour faire des tournées dans le monde, c’est ce que j’ai dit à Philippe Flahaut dès que je l’ai rencontré."

Philippe Flahaut n’est autre que le fondateur du CAD. Soucieux d’intégrer des comédiens porteurs de handicaps dans des formations et une compagnie, la cie Création éphémère, sans en faire des structures spécialisées. Une aventure "ordinaire" dans laquelle Théo Kermel, porteur d’une trisomie 21, a rapidement trouvé sa place. Il se rappelle : "Philippe et Marie, son épouse, m’ont repéré : ils ont même dit que j’étais impressionnant. Alors quand Philippe m’a annoncé que j’étais reconnu comme comédien professionnel, j’étais le plus heureux."

Un premier rôle au cinéma

Dans les mois qui suivent, Théo Kermel décroche premiers rôles sur premiers rôles. D’abord la pièce Roméo, où "Théo portait littéralement la pièce", se souvient Kévin Pérez. À deux sur scène, le comédien ne fait plus qu’un avec son personnage, qui fait encore référence dans sa jeune carrière. Nouveau premier rôle en 2018, dans le court-métrage Œdipe que la compagnie emmènera jusqu’à la médaille d’or du festival de Clermont-Ferrand.

D’autres suivront, jusqu’au premier rôle incarné dans le prochain long-métrage de Damien Odoul, Théo et les métamorphoses, déjà sélectionné au festival de Berlin et à venir sur grand écran. "Nous avons tourné pendant sept semaines, c’était intense, mais c’est surtout une belle expérience, raconte le trentenaire. Damien Odoul m’a parlé comme un adulte, et j’ai pu voir la grosse production de l’intérieur", raconte le trentenaire.

"Nous ne vendons pas du rêve"

"Dans ce film, Théo incarne un jeune trisomique, mais son rôle va bien au-delà, rebondit Kévin Pérez. Nous sommes souvent révoltés de voir que les comédiens différents sont castés que pour leur handicap, et quand on leur demande aussi de grossir les traits de leur handicap. Nous sommes convaincus que nos comédiens peuvent jouer tous les rôles. Mais nous sommes clairs avec l’entourage des comédiens dès le début : c’est un métier difficile, d’autant plus avec le handicap. Nous ne vendons pas du rêve parce que nous savons que beaucoup ne feront pas carrière là-dedans." Malgré les débouchés incertains, le CAD l’affirme : la formation permet aux formés de progresser visiblement, "pour leur confiance en eux, leur expression, leur relation à l’autre". Composée de cinq modules, la formation couvre 245 heures au total. Un parcours que Théo Kermel a complété au Ring, à Toulouse.Et si la pandémie a mis la culture à plat, le trentenaire a tout un tas de projets à l’horizon : un stage avec la compagnie, des enregistrements de voix off à Paris, un nouveau long-métrage et la sortie du film de Damien Odoul. Avec, à la clé il l’espère : le statut d’intermittent du spectacle.

Une centaine de comédiens formés

Le Centre d’art dramatique pour comédiens différents de Millau est adossé à la compagnie Création éphémère, dont fait désormais partie Théo Kermel. Fondé par le metteur en scène Philippe Flahaut en 1991, le Centre s’est ouvert à tous publics depuis 20 ans et a formé plus d’une centaine de comédiens. Financé par la Région au titre de la formation professionnelle, le Centre ne peut, depuis la refonte du plan de formation régional en 2018, accueillir que des demandeurs d’emploi. Une situation qui est rarement compatible avec des profils de jeunes adultes handicapés comme Théo.

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