À deux mois des élections, la majorité départementale se déchire

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  • La position portée parle président Jean-François Galliard l’a finalement emporté.
    La position portée parle président Jean-François Galliard l’a finalement emporté. Archives J.-A.T.
  • Le dossier de Station A est lui aussi bloqué.
    Le dossier de Station A est lui aussi bloqué. Centre Presse - Mathieu Roualdés
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Guilhem Richaud

Vendredi dernier, lors de la commission permanente du conseil départemental, la majorité de droite et du centre s’est fracturée sur le sujet du développement touristique de l’Aubrac.

La campagne s’annonce tendue. Les élus du Département le savent : dans les deux prochains mois, l’avenir politique de certains va se jouer. Et cela génère forcément quelques tensions. Si la gauche, ses unions et ses désunions font régulièrement l’actualité, c’est cette fois la droite qui se divise.

Ce n’est pas la première fois, ni la dernière. Mais alors que jusque-là, elle avait tendance à laver son linge sale en famille, cette fois, c’est plus compliqué. Parce que l’alliance de la droite et du centre est tiraillée entre deux mouvements au sujet de la future présidence de l’instance. Alors même que les deux premiers tours, programmés dans les urnes des 23 cantons aveyronnais les 20 et 27 juin prochains, n’ont pas eu lieu, tout le monde pense déjà au troisième.

Dans les rangs de la droite et du centre, qui n’ont jamais connu autre chose que la majorité au Département depuis 1949, la question de la future présidence se pose déjà. Jean-François Galliard, qui défend son bilan et la continuité, voudrait bien poursuivre sa mission démarrée en 2017. Mais, Arnaud Viala, le député du Sud-Aveyron, l’envisage également et a de plus en plus d’adeptes au sein de l’équipe dirigeante actuelle. La situation est connue depuis plusieurs mois, mais plus le scrutin approche, plus les choses se tendent.

Au point que vendredi dernier, en commission permanente, une instance qui n’est pas ouverte au public ni à la presse, mais qui réunit tous les élus, la majorité s’est déchirée sur le sujet des quatre saisons de l’Aubrac. À première vue, le dossier n’a rien d’épineux. Il prévoit de travailler sur un projet touristique à l’année pour le territoire, et non plus seulement l’hiver. Sauf que depuis plusieurs semaines déjà, une partie de la majorité, celle qui verrait bien la présidence changer en juin prochain, freine des quatre fers pour que le projet soit décalé de quelques semaines. En effet, s’il n’y a pas d’opposition frontale sur le fond, les élus s’inquiètent, sans l’afficher officiellement du fait que Jean-François Galliard puisse récupérer dans son bilan une telle avancée. Ils auraient préféré attendre le scrutin avant de mettre ce dossier au vote, dans une période où ils espèrent que le président aura changé.

Deux camps désormais bien marqués

Avant la commission permanente de vendredi matin, la majorité, comme à son habitude, s’est réunie entre elle pour valider les points à entériner. Là, selon nos informations, les "opposants" ont demandé à Jean-François Galliard de retirer le texte de la séance à venir. Ce que le président a refusé de faire. Avec ses soutiens, il a quitté la réunion et s’est rendu dans l’hémicycle départemental où les autres groupes, interloqués par la drôle d’ambiance qui régnait, attendaient le début de la séance.

C’est à Jean-Luc Calmelly, en tant que président de la commission tourisme qu’est revenue la tâche de présenter le texte, non sans une certaine gêne, car plutôt partisan d’un report. Dans la foulée, André At a demandé une interruption de séance, afin de faire redémarrer les discussions pour le retrait du texte. Le président, mais aussi la gauche, par les voix notamment de Jean-Dominique Gonzales, de Bertrand Cavalerie et de Sarah Vidal, mais aussi de LREM, via Stéphane Mazars, ont refusé, et le débat a continué. Les dissidents ont multiplié les arguments. Jean-Philippe Abinal a demandé un engagement de la Région, ce à quoi Jean-François Galliard tout comme Vincent Alazard, le maire de Laguiole, très attaché au projet, ont apporté des réponses.

Surtout, Valérie Abadie-Roques a pris la parole pour lire un texte glissé par Jean-Claude Luche, absent, mais qui lui avait laissé procuration. Dans celui-ci, il demandait également le report de la délibération. " Parce que je pense qu’il faut intégrer dans la réflexion le Sivu de Brameloup (qui gère la station, NDLR), qui est en difficulté, justifiait-il, après coup, samedi. Je pense qu’il fallait réfléchir à comment l’aider. " Cette série d’interventions, et les réponses qui ont suivi, a jeté une grande confusion chez les "frondeurs" et au moment de la mise au vote du texte, alors même qu’ils avaient prévu de s’opposer, beaucoup ne savaient plus quelle position adopter.

Dans la confusion, le vote de Valérie Abadie-Roques pour Jean-Claude Luche a été enregistré comme contre. L’élue s’est ensuite abstenue pour elle-même, comme six autres de ses collègues de la majorité. Les autres, conscients que la situation allait s’ébruiter en dehors de l’hémicycle et de l’image désastreuse de bloquer, pour des raisons politiques, un texte structurant pour le territoire, se sont finalement ravisés et ont suivi l’avis de Jean-François Galliard et de ses proches, tout comme les oppositions, devenues alliées d’un jour pour le président, qui buvaient du petit-lait à la sortie de la séance, amusés de voir la droite s’entre-déchirer. La conclusion de cette session est en tout cas bien claire : à deux mois des élections, la campagne, qui a mis beaucoup de temps à démarrer, est bel et bien lancée.

Une situation de conflit similaire sur le dossier de Station A, à Rodez

Le dossier sur l’intégration du syndicat mixte qui gère le développement touristique de l’Aubrac est le second en quelques semaines sur lequel la majorité départementale se déchire.

Il s’est en effet passé la même chose pour les Haras de Rodez, propriété de l’institution, où est installé Station A. Les porteurs de ce projet de tiers lieu à proximité directe du centre-ville de la préfecture de l’Aveyron attendent une promesse de bail à construction, pour lancer des travaux nécessaires à l’aménagement du lieu. Là aussi, si le fond du dossier n’est pas remis en cause, une partie de la majorité départementale préférerait attendre le prochain mandat pour faire avancer le dossier. La encore, la principale raison semble politique. S’il est passé en force pour le dossier de l’Aubrac, Jean-François Galliard ne l’a pas fait pour Station A et a ajourné la délibération. Pour le moment du moins.

En effet, il reste encore une commission permanente, au mois de mai, avant la fin de la mandature…

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