Hausse des prix du carburant : "la petite station en milieu rural va dérouiller", les craintes après les annonces du gouvernement

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  • Jacques Vaysse et Robert Bassols, de la Fédération nationale de l'automobile, ont été reçus à Bercy.
    Jacques Vaysse et Robert Bassols, de la Fédération nationale de l'automobile, ont été reçus à Bercy. Photo - Jacques Vaysse
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Jennifer Franco

Vente à perte envisagée par le gouvernement ou à prix coûtant effectif depuis vendredi, pour les stations indépendantes, c’est une menace sur leur survie en milieu rural. La Fédération nationale de l’automobile, dont l’Aveyronnais Jacques Vaysse préside la branche carburants, plaide pour un fond centralisé.

Jacques Vaysse ne décolère pas. Alors que les prix à la pompe flambent flirtant avec le litre à 2 € et que la grogne des automobilistes se fait ressentir dans les stations-service dans un contexte d’inflation, le gouvernement a tenté d’instaurer comme levier la vente à perte du carburant. "C’est une mesure injuste. Quelles entreprises peuvent se permettre de vendre à perte ?", plaide ce patron avec sa casquette de président de la branche carburants de la Fédération nationale de l’automobile (FNA).

"Personne ne peut vivre en perdant de l'argent"

Estimées à 5 800 en France dont 2 300 petites et très petites, les stations traditionnelles (hors grande distribution) ne sont pas prêtes à vendre à perte pour garder leur clientèle. "La vente à perte, c’est vendre moins cher que ce que l’on a acheté, donc on perd de l’argent. Personne ne peut vivre en perdant de l’argent. La différence avec les grandes surfaces, c’est qu’elles peuvent compenser en augmentant les prix sur d’autres produits, nous, on ne peut pas", explique le garagiste-mécanicien et gérant de Pareloup automobile à Salles-Curan.

"La petite station en milieu rural va dérouiller"

Face à la levée de boucliers des stations indépendantes mais aussi des grandes surfaces qui ont refusé la vente à perte, Emmanuel Macron a finalement tranché pour le prix coûtant et une aide pour les plus modestes pouvant aller jusqu’à 100 € par an et par voiture. Là encore, Jacques Vaysse s’agace. "Que ce soit la vente à perte ou à prix coûtant, ce sera non, ce n’est pas possible. C’est comme si on nous demandait de nous suicider et de dire merci", fustige-t-il. "Une fois encore, c’est la petite station en milieu rural qui va dérouiller. Nous sommes toujours le dernier maillon de la chaîne", regrette-t-il. Nous ne dépendons pas d’une marque. Nous achetons le carburant à un raffineur et ensuite nous payons le transport en plus. Nous, on vend un service à petite marge."

Vente à perte et à prix coûtant, explications

La vente à perte revient à commercialiser un produit en dessous de son prix d’achat effectif, c’est-à-dire "le prix unitaire net figurant sur la facture d’achat, minoré du montant de l’ensemble des autres avantages financiers consentis par le vendeur et majoré des taxes sur le chiffre d’affaires, des taxes spécifiques afférentes à cette revente et du prix du transport", explique le ministère de l’Économie sur son site internet. Une pratique interdite en France depuis 1963 où les contrevenants s’exposent à une amende de 75 000 € maximum pour une personne physique et 375 000 € pour une personne morale.

La vente à prix coûtant, c’est commercialiser un produit au prix auquel il a été acheté ou fabriqué, sans faire de bénéfice. Normalement, le prix de vente est composé du prix coûtant et de la marge.

Reconnues et défendues comme un service essentiel, les stations indépendantes sont nombreuses à assurer ce service de proximité utile en milieu rural comme, ici, en Aveyron. Sur certains territoires, ce sont même les collectivités qui gèrent la station-service du village.

"Un litre est imposé à 60 %"

Coupiac, par exemple, au moment du départ à la retraite du pompiste, la mairie a racheté en 1990 la station-essence, aujourd’hui automate. Elle en est toujours la propriétaire mais la gestion est assurée par une association de bénévoles. Mardi, Olivia Grégoire, la ministre déléguée en charge des TPE-PME, du Commerce, de l’Artisanat et du Tourisme, a reçu à Bercy en présence de sa directrice et de son conseiller en charge des professions, Jacques Vaysse et Robert Bassols, le président national de la fédération. "Ils nous ont convoqués car nous avions déjà tapé du poing sur la table lors de la mesure de gouvernement sur les 15 centimes puisque nous avions été les oubliés du gouvernement."

Autour de la table, la FNA milite pour la (re) création d’un comité professionnel de la distribution de carburants (CPDC). Autrement dit, "une enveloppe qui autrefois était allouée à cet organisme qui s’occupait au cas par cas des stations-service en aidant un jeune voulant investir, mettre un automate comme, je l’ai fait à titre personnel il y a quinze ans. Ou un futur retraité à se mettre aux normes et à pouvoir partir sereinement". Au-delà, pour Jacques Vaysse, "l’état doit baisser les taxes sur le carburant, sur les produits de première nécessité dont il fait partie. Un litre est imposé à 60 %".

"Il faut prendre sa calculatrice"

Et Jacques Vaysse d’en appeler aussi aux clients. "Nous sommes indispensables au maillage du territoire. On se bat pour cela. Il faut prendre sa calculatrice. Il y a des gens qui font des kilomètres ou passent des heures dans une file d’attente pour quelques euros sur un plein. Il faut savoir que cinq centimes de baisse sur 50 litres, cela ne représente que 2,50 €. C’est une baisse infirme. On ne parle que du prix mais il y a aussi la qualité du carburant dont on ne parle pas. Un carburant de bonne qualité engendre moins de problèmes mécaniques et une consommation moindre !"

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