Ces chocolatiers de l'Aveyron à l’autre bout du monde pour l’éthique du chocolat

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  • Agnès et Pierre au Cameroun, où ils se sont engagés auprès d’une coopérative dirigée par Aristide (ci-dessus) et engagée sur l’éthique et la qualité. Agnès et Pierre au Cameroun, où ils se sont engagés auprès d’une coopérative dirigée par Aristide (ci-dessus) et engagée sur l’éthique et la qualité.
    Agnès et Pierre au Cameroun, où ils se sont engagés auprès d’une coopérative dirigée par Aristide (ci-dessus) et engagée sur l’éthique et la qualité.
  • Ci-dessus le voilier qui a acheminé la première cargaison de fèves pour le chocolat de Castelnau. Ci-dessus le voilier qui a acheminé la première cargaison de fèves pour le chocolat de Castelnau.
    Ci-dessus le voilier qui a acheminé la première cargaison de fèves pour le chocolat de Castelnau.
  • De l’Aveyron à l’autre bout du monde pour l’éthique du chocolat De l’Aveyron à l’autre bout du monde pour l’éthique du chocolat
    De l’Aveyron à l’autre bout du monde pour l’éthique du chocolat
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    De l’Aveyron à l’autre bout du monde pour l’éthique du chocolat
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Olivier Courtil

En Aveyron, des artisans chocolatiers se lancent dans une démarche éthique pour proposer de la qualité tout au long de sa chaîne de fabrication jusqu’à son acheminement.

Les confinements ont parfois eu du bon, celui d’une prise de conscience sur l’état du monde et sur son propre sort. Donner un sens à sa vie, en somme. Cela allant de pair avec la nécessité d’agir pour le bien-être de la planète, au niveau environnemental comme social.

À l’heure où le cours du chocolat est le plus haut jamais atteint depuis 1979, des artisans chocolatiers Aveyronnais s’engagent pour changer, à leur échelle, le cours de leur action dans la société. "Agir, c’est connaître le repos", a écrit Fernando Pessoa. À Castelnau-de-Mandailles, Laëtitia Herri et Cédric Da Costa Faro de Lucifèves d’Aubrac, poussent le bouchon à faire venir les fèves de cacao par voilier. Chiffres à l’appui : une tonne de cacao acheminée par ce transport économise vingt-sept automobiles aux États-Unis qui ne roulent pas pendant un an. Dix tonnes correspondent ainsi à 300 véhicules, et ainsi de suite. C’est la fable du colibri qui consiste à chacun de faire sa part. "Cela participe à l’impact écologique et relance une économie locale." Ainsi, ce voilier, parti du Belize, a rejoint en quatre mois le port historique et non commercial de Hambourg. "On mutualise avec d’autres artisans. Nous travaillons avec dix pays en Afrique, Amérique centrale et Asie qui sont dans le respect des conditions de travail et dans la démarche qualitative."

Cette démarche est celle aussi, entreprise par Agnès & Pierre, artisans chocolatiers à Rodez qui fêtent cette année leurs dix ans d’existence de la plus belle des façons. "Nous avons été contactés cet été par Christophe Bertrand à la tête de la confédération des chocolatiers qui a fondé l’association Chocolatier engagé pour sortir du système et aider à travailler main dans la main", raconte Pierre dans son atelier de fabrication, zone de Bel-Air, à Rodez. Ainsi, il est parti fin septembre, avec Agnès et des bagages remplis de cahiers, stylos pour les enfants, direction Nkog-Ekogo au Cameroun.

Là-bas, une coopérative vient de naître, "L’instant cacao", portée à bout de bras par Aristide. "Nous avons eu un coup de cœur pour les habitants et leur démarche. Mettre des visages, c’est touchant, on voit l’envers du décor, ce fut notre premier voyage en Afrique. Les planteurs amènent directement les fèves à la coopérative qui travaille sans intermédiaire, c’est le circuit court. Cela oblige les planteurs à disposer d’un compte en banque pour épargner, à travailler en transparence pour se structurer. Les enfants ne sont pas exploités au travail et contrairement aussi à la Côte d’Ivoire, le pays voisin, la biodiversité est maintenue car le Cameroun n’a pas déforesté. Le cacaoyer pousse à l’abri des forêts ce qui garantit les fèves de cacao, sans engrais."

"L’éthique n’a pas de prix"

La coopérative, cahier des charges à l’appui pour la traçabilité, a permis d’exporter 73 tonnes l’an dernier et fait travailler désormais cent producteurs dont trente-deux femmes. "On voit naître un pays qui veut faire de la qualité. L’objectif est que d’ici dix ans, cette démarche se fasse dans dix pays, l’éthique n’a pas de prix. " De retour à Rodez, Agnès et Pierre, portés à leur tour par cet élan de solidarité, viennent de mettre au point une tablette de chocolat noir élaborée avec le cacao du Cameroun qui porte symboliquement le nom de Nkog-Ekogo. "Cela donne un chocolat avec de belles notes fruitées et boisées", décrit-il.

L’emballage, le choix du graphique (avec Sophie Roube, installée à Rodez), l’impression, tout a été conçu en circuit court. Dans l’esprit voulu par le couple d’artisan chocolatier. Le couple qui ne se remet pas encore de l’émotion de son périple. "On a visité une école où il y a 80 enfants dans une classe. C’est la misère, on a eu l’impression d’abandonner les gens, le voyage était éprouvant. Il y a un avant et un après. " Le départ a été un déchirement mais, hasard ou coïncidence, Agnès et Pierre ont retrouvé le mari d’Aristide qui se forme au métier de… chocolatier lors du Salon du chocolat fin octobre à Paris. Outre l’émotion des retrouvailles, Agnès et Pierre sont aussi revenus avec une (nouvelle) médaille d’or. Histoire de récompenser la qualité et la démarche engagée dans le développement durable. Cette prise de conscience coïncide avec le mode de consommation. "Les gens achètent moins mais mieux. Ils sont sensibles à l’impact social et environnemental" Le cercle devient ainsi vertueux.

Une démarche qui s’avère nécessaire. "On est une goutte d’eau avec six salariés mais on fait notre part", conclut Pierre. C’est la légende du Colibri appliquée. Tout comme le font aussi Laëtitia et David à Castelnau. "Nous travaillons avec l’entreprise française Towt qui fabrique actuellement les deux premiers cargos à voile. Le premier cargo devrait être opérationnel début 2024. On y croit et il faut le faire", insiste David. Et lui aussi, se voir récompenser de son engagement. Lucifèves vient de décrocher deux médailles d’or aux trophées Epicures dont l’une pour son chocolat fabriqué avec du lait de brebis bio de l’Aveyron. "On travaille avec une dizaine de chefs étoilés dont tous ceux de l’Aveyron. On commence à prendre notre vitesse de croisière. " Avec l’espoir de voguer vers un idéal commun.

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