"Nous pensions être davantage préservés, mais non" : en Aveyron, la biodiversité est sur le déclin

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  • Rodolphe Liozon est arrivé en Aveyron à 34 ans. Il est directeur de l’antenne départementale de la LPO.
    Rodolphe Liozon est arrivé en Aveyron à 34 ans. Il est directeur de l’antenne départementale de la LPO. A.D.
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Aurélien Delbouis

Les dernières études témoignent d’une accélération du déclin des espèces et des écosystèmes. Le directeur de la LPO s’en inquiète.

Malgré le lancement d’un nouveau jeu à gratter visant à financer une vingtaine de projets de "restauration du vivant", rien ne va plus pour la biodiversité. Emprise territoriale, surexploitation des ressources, pollution, invasion d’espèces exotiques… les maux dont souffrent les espèces animales et végétales sont légion et augurent déjà d’une prochaine et probable extinction de masse.

Un constat sans équivoque, qu’ils sont pourtant nombreux à dénoncer - depuis parfois plus d’un demi-siècle.
Parmi eux, la Ligue de Protection des oiseaux (LPO) qui depuis l’Aveyron participe à une "nécessaire prise de conscience". Au fil des parutions toutes aussi alarmistes, Rodolphe Liozon, directeur de la délégation territoriale de l’Aveyron, garde fermement le cap, conscient de "l’urgence" et des politiques gouvernementales "très déficientes sur le sujet".

"Sans paraître trop défaitiste, j’ai la volonté que ça bouge. Mais au bout de 50 ans d’actions, on constate que ça ne marche pas".

Fondée il y a 111 ans, en 1912, la LPO et ses 70 000 adhérents - dont 540 en Aveyron - protègent les espèces sauvages menacées, s’investissent dans la recherche scientifique, valorise la connaissance, coordonne ou participe activement à des projets européens, tel que le "LIFE gypaètes" qui a permis, notamment dans le Sud-Aveyron, de réintroduire une trentaine de ces vautours casseurs d’os.

Les pesticides : "Un problème majeur"

Une action à 360° qui l’amène à un constat sans ambiguïté, l’environnement souffre et avec lui la biodiversité dans sa globalité. "Je fais confiance aux publications scientifiques qui sont normalement bien documentées, valide le directeur. Il y a quelques années, l’une d’entre elles a démontré la chute d’une biomasse d’insectes de 75 % dans des espaces protégés en Allemagne", affirme-t-il.

"L’an dernier des communications ont fait état de la diminution des oiseaux en Europe et notamment des oiseaux des champs. Et en ce début d’année, un dernier rapport a permis de mettre en évidence les principales causes de ce déclin : l’intensification de l’agriculture et l’usage de pesticides".

Selon lui, "un élément très important à retenir sur lequel il faut se pencher en priorité". "Si vous me demandez ce qui menace aujourd’hui la biodiversité je vais vous dire que c’est très compliqué, les facteurs sont effectivement très nombreux : artificialisation, pollution, espèces envahissantes… Mais il faut vraiment garder à l’esprit que l’utilisation de pesticides est aujourd’hui le problème majeur".

Pas question pour autant de tirer à boulet rouge sur la profession agricole avec laquelle collabore l’antenne aveyronnaise de la LPO.

"En Aveyron, nous avons décidé depuis 2003 de travailler avec les agriculteurs. Notre conseil d’administration a toujours été très proche des exploitants, des commerciaux, des chambres", plaide Rodolphe Liozon, conscient, dans le département, que la moitié des espaces naturels ou semi-naturels sont justement gérés par des agriculteurs. Conscient aussi qu’on ne peut pas changer de système d’exploitation du jour au lendemain.

L’Aveyron loin d’être épargné

"Tout ça se prépare. Il faut des aides, une volonté politique qui, on peut le constater avec la question de l’utilisation du Glyphosate notamment, a beaucoup de mal à émerger !" En Aveyron comme ailleurs, le problème reste entier. Malgré ses paysages de carte postale, le département est loin d’être épargné.

En atteste, le résultat du dernier programme participatif de Suivi temporel des oiseaux communs (STOC) en Occitanie qui compile plus de 20 ans de données liées à la présence des oiseaux des champs, indicateur s’il en est de l’état des milieux.

"Au niveau national, les oiseaux généralistes comme les pies ou les tourterelles des bois se portent plutôt bien. Mais les oiseaux spécifiques à certains milieux, comme les milieux agricoles, sont très impactés", commente le directeur, curieux de comparer la tendance hexagonale à celle de la région Occitanie. Là encore sans véritable surprise.

"Nous pensions être davantage préservés en Occitanie avec des milieux - comme l’agriculture de montagne - relativement préservés de l’utilisation de pesticides. Mais non. Les tendances sont les mêmes, valide cette nouvelle étude. On a en Occitanie, c’est un fait, une meilleure biodiversité, mais comme partout, nous subissons malheureusement le même déclin".

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